Affaire BIAC : les vrais voleurs occupent des bureaux climatisés

Mardi 7 juin 2016 - 10:01
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Le scandale était trop grand pour passer inaperçu. Le gouverneur de la Banque Centrale du Congo l’a si bien compris qu’il a décidé  de réagir avec vigueur pour éviter que le feu qui couve à la BIAC n’embrase l’ensemble du secteur bancaire. Depuis le dernier week-end, on le sait, les responsables du gâchis ont été déférés devant les cours et tribunaux. On attend maintenant que la justice, si prompte à se saisir des malnutris, déclenche des enquêtes devant permettre de retrouver les fonds dilapidés et sanctionne les vrais coupables. La vraie question est justement là. La justice, la vraie, sera-t-elle dite dans cette ténébreuse affaire, où des intérêts maffieux semblent côtoyer la boulimie des intouchables ? Il y a quelques années, on s’en souvient, l’Union Zaïroise des Banques, alors seconde banque du pays, a été liquidée dans des conditions ubuesques, cédant dans la foulée ses installations et ses différentes succursales à une nouvelle entité, la Banque Congolaise. Née apparemment sous une bonne étoile et héritant d’un patrimoine immobilier énorme, la nouvelle banque a été très vite soumise à une cure d’amaigrissement sans que l’on détermine avec exactitude les véritables tireurs des ficelles. Le patrimoine immobilier de la banque s’est retrouvé sans transition aux mains des personnes extérieures à celle-ci à la faveur d’opérations menées dans la plus grande opacité et dont on ignorait le véritable donneur d’ordres. La valse qui venait ainsi de commencer a vite fait de toucher au fruit défendu. Quelques personnalités de la ville haute et autres privilégiés de la « République de la Gombe » se sont mis ensemble pour mettre le trésor de la banque en coupe réglée. Des crédits mirobolants évalués en plusieurs centaines de milliers de dollars ont été accordés à chacun d’eux, sur base des dossiers vides et sur le dos des clients de la banque. Couverts par l’immunité que leur conféraient les fonctions publiques occupées, ces individus ont passé leur temps à saigner la banque sans jamais penser un jour à rembourser le moindre dollar. La situation a perduré jusqu’au jour où les caisses ont sonné creux, plongeant la vraie clientèle dans la colère et la perplexité. Mais quand il s’est agi de rendre des comptes, une seule personne est montée à l’échafaud, l’Administrateur-Gérant de la Banque. Aucun bénéficiaire des crédits n’a été bousculé en dépit d’un travail d’audit très documenté mené par un cabinet réputé. On ne dérange pas les intouchables qui continuent à se la couler douce jusqu’à ce jour au détriment des centaines de milliers de clients à qui on n’a rien remboursé. Comme on le voit, le cas de la Banque Internationale en Afrique au Congo n’est pas isolé. Bien d’autres ont laissé des traces indélébiles ad vitam aeternam. Des milliers de nos compatriotes qui ont eu le malheur de choisir la carrière de banquier se trouvent actuellement dans une misère sans nom par la faute de certains hauts cadres. Ils se sont retrouvés du jour au lendemain sur la pavé sans indemnités de sortie ou de rente alors qu’ils ont rendu d’estimables services qui ont pourtant enrichi d’autres souvent tapis dans des salons climatisés d’où ils montaient des sales magouilles à leur propre profit. D’autres se la coulent douce en exerçant des hautes fonctions politiques et à la tête des entreprises commerciales paraétatiques ou privées. Sans jamais être inquiétés le moins du monde alors que des preuves de leur implication dans des manipulations à la base des faillites de ces banques-là sont de notoriété publique. Ils se sont servis de leurs positions privilégiées pour se construire des fortunes colossales grâce auxquelles ils se sont bâtis des investissements immobiliers de grande valeur dont ils se servent pour obtenir des crédits bancaires colossaux. Sanctions exemplaires pour décourager les prédateurs La volonté affichée par la plainte à charge de M.M. Blattner, Losembe et consorts visant à décourager d’autres prédateurs devrait être étendue à d’autres qui sont reconnus coupables des actes similaires, notamment tous ceux qui ont bénéficié des crédits fantaisistes pour se construire des immenses portefeuilles financiers sans être du tout inquiétés mais qui au contraire se la coulent douce dans des bureaux climatisés, voyagent régulièrement vers des paradis fiscaux pour y placer des fortunes amassées malhonnêtement et contourner le fisc. C’est de cette seule manière que l’Etat, par le canal de l’autorité monétaire, particulièrement la Banque Centrale pourra sauver le secteur bancaire, booster les investissements et protéger l’épargne des gagne-petit. F.M.