Les marches de soutien au pouvoir sonnent-elles de retour du mobutisme ?

Mercredi 30 septembre 2015 - 10:24

Dans l’arrière -pays, certaines autorités municipales imposent à leurs administrés de marcher pour soutenir le président de la République. D’autres exigent l’arrêt de toutes les activités socio-économiques pendant la marche de soutien à l’Autorité morale de la Majorité présidentielle. Des pratiques d’un autre âge qui font désormais revivre le mobutisme, pourtant chassé par la révolution du 17mai 1997.

La scène politique congolaise est agitée depuis deux semaines. Ce, à la suit, c’est selon, de l’exclusion ou de 1« auto-exclusion du G7, le groupe de sept partis politiques, de la Majorité présidentielle (MP). Les leaders de 07 se sont attirés la foudre du bureau politique de la MP juste parce qu’ils ont récidivé en exigeant, pour la énième fois, la tenue des élections dans les délais constitutionnels et l’alternance au sommet de l’Etat en 2016.

Restant dignes de leur ligne politique, tous les leaders de 07, désormais érigé en plateforme politique, sont allés au bout de leur logique en démissionnant de postes qu’ils occupaient dans les institutions pour le compte de la Majorité présidentielle.

Cependant, certains membres de 07 se sont désolidarisés de l’action de leurs leaders, ce qui en démocratie est normale, niais n ‘ont pas voulu tirer les conséquences de leur « auto-exclusion » en démissionnant de leur poste parce qu’obtenus sous la casquette de leurs parti respectifs de G7. La suite, la République entière la connaît. Le chef de l’Etat a donné un coup de balai au gouvernement, remplaçant tous les membres des partis frondeurs, même ceux qui lui ont juré fidélité. Ce que tous les démocrates ont applaudi.

Parallèlement à cette action du chef de l’Etat, de procéder au « réaménagement technique » du gouvernement, à Kinshasa, un peu moins, mais beaucoup plus dans les provinces, l’on assiste à une profusion de marches de soutien au président de la République. Des partis politiques membres ou non de la MP, des associations citoyennes, des autorités coutumières, des chefs d’églises défilent notamment sur les médias publics et ceux proches du pouvoir pour exprimer leur soutien au chef de l’Etat. Jusque-là, tout est presque normal. Là où les déviations deviennent flagrantes, c’est quand ces marches de soutien sont imposées, ou presque, par les autorités municipales.

OBLIGER LES ENFANTS À NE PAS ÉTUDIER À CAUSE D’UNE MARCHE DE SOUTIEN !

Selon Deckson Assani Kamango, correspondant du quotidien Le Potentiel à Kalima, en territoire de Pangi dans la province du Manierna, une marche de soutien au président Joseph Kabila a été ‘organisée, hier 29 septembre, par les autorités locales avec le soutien du gouverneur Pascal Tutu Salumu. A cause de cette marche, toutes les activités de la cité ont été fermées. Les écoles, les commerces, les Petites et moyennes entreprises, l’administration publique ont été contraints, selon notre correspondant, à l’arrêt.

A Butembo, dans le Nord-Kivu, c’est le maire de cette ville, Sikuli Vasaka, qui a été en tête de la mobilisation, le lundi 28 septembre dernier, de la marche de soutien au président de la République organisée ce mardi 29 septembre 2015. Dans sa déclaration à la foule, en prélude de la manifestation d’hier, il a tenu de propos d’un autre âge.
Selon la Radio RTVS1 captée à Kinshasa, il a dit, en Swahili, que « nous allons organiser ce mardi une marche de soutien au chef de 1‘Etat. Tous ceux qui sont avec nous doivent être à la marche. Ceux qui n ‘y seront pas seront considérés sidérés comme étant contre nous ». Et de poursuive : « Je vous ai toujours dit que’ quand on fait les affaires, il faut être du côté du pouvoir ».

Intentionnellement, cette autorité de la ville use de son influence et cherche à imposer à ses administrés une marche de soutien. Autrement dit, celui qui va préférer aller à son travail plutôt qu’à la marche de soutien sera considéré comme membres de 07, et peut être livré à la vindicte populaire. Le maire de Butembo ne s’est pas arrêté-là. Il est allé jusqu’à demander aux fonctionnaires de l’administration publique, membres de 07, de démissionner aussi de leur poste, à l’instar des ministres et autres députés qui l’ont fait au gouvernement central et au parlement.

Cette autorité de la ville de Butembo oublie que le pouvoir actuel est l’émanation de 1’AFDL. En chassant le maréchal Mobutu, les Kadogo de M’zee Laurent-Désiré Kabila voulaient établir sur le Zaïre un Etat démocratique où les droits et libertés’ des citoyens seront garantis.

Et ces droits et libertés sont aujourd’hui consignés dans la Constitution du 18février2006. L’on ne peut plus contraindre un citoyen congolais à marcher contre son gré pour soutenir une quelconque personnalité ou promettre

le calvaire à ceux qui ne le feront pas. La nouvelle province du Kwango n’est pas demeurée en reste. Là aussi, une marche de soutien au président de la République a été organisée hier mardi 29 septembre.

N’en déplaise aux flatteurs de la dernière heure qui tentent de faire revivre le mobutisme sans Mobutu, Joseph Kabila a reçu mandat de 5 ans en tant que chef de l’Etat de la RDC. Ceci reste un acquis, jusqu’à l’expiration de son mandat. Le Raïs n’a jamais dit qu’il ne respecterait pas l’actuelle Constitution qui lui interdit plus de deux mandats. Jusqu’à preuve du contraire, il reste soumis, comme tout Congolais, aux prescrits de la Loi suprême qui consacre l’alternance au sommet de l’Etat et détermine les missions auxquelles sont appelées en priorités es instituions de la République.

Au regard de la Constitution, dans son exposé des motifs, les préoccupations majeures qui président à l’organisation des institutions de la République sont : assurer le fonctionnement harmonieux des institutions de l’Etat; éviter les conflits; instaurer un Etat de droit; contrer toute tentative de dérive dictatoriale; garantir la bonne gouvernance; bitter contre l’impunité; assurer l’alternance démocratique.

LE POTENTIEL