Affaire Matata : « Le 1er juge de la Cour Constitutionnelle avait déjà dit le droit et tout s’est arrêté là en vertu de la non-rétroactivité » (Prof Gabriel Banza)

Mercredi 10 mai 2023 - 09:13
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Devant un parterre d'intellectuels notamment des juristes réunis le mardi 09 mai 2023 à Kinshasa, le professeur Gabriel Banza Malale a éclairé l'opinion congolaise sur la controverse engendrée par la Cour constitutionnelle via ses arrêts contradictoires rendus dans l’affaire Bukanga Lonzo dont le principal accusé est l'ancien premier ministre Augustin Matata Ponyo.

Après avoir scruté la teneur de ces décisions de la Haute cour, cet expert des questions géopolitiques et géostratégiques dans les crises congolaises et enseignant de droit constitutionnel à l’Université de Lubumbashi a mis en exergue le principe de la non-rétroactivité en signifiant que l'arrêt du 18 novembre 2022 n'a aucun effet sur l'arrêt du 15 novembre 2021. 

Pour lui, les droits acquis par le sénateur Matata Ponyo à travers l'œuvre du premier juge ne peuvent être foulés au pied. 

« Il est toujours prévu une procédure de correction d'un jugement coulée en force de la chose jugée. La personne concernée a déjà acquis des droits sur lesquels on ne peut plus revenir. Mais la mauvaise jurisprudence ne peut plus faire son empire parce que ça va envenimer les bonnes relations entre la société et la justice. La Cour constitutionnelle a le pouvoir de revenir sur base de l'exequatur pour corriger le premier arrêt tout en laissant les droits acquis par Matata Ponyo. Dans le cas échéant, le deuxième arrêt ne peut mettre fin à l'empire ou aux effets au premier arrêt que pour l'avenir et non pour le passé. C'est ce que l'on appelle la non-rétroactivité », a-t-il souligné. 

En vertu du premier arrêt de la Haute cour et de l'article 168 de la Constitution, l'ancien conseiller administratif et juridique au cabinet de l’ex-président de la République Joseph Kabila, a expliqué que Matata ne peut plus faire l'objet des poursuites. 

« Tous les scientifiques et professeurs avec lesquels nous avons réfléchi autour de cette question, nous avons apaisé nos consciences pour dire aux étudiants et aux praticiens du droit que le premier juge de la Cour constitutionnelle avait déjà dit le droit et tout s'est arrêté là », a-t-il fait remarquer.

À ce stade, le professeur Malale a admis que l'œuvre du deuxième juge ne vaut son pesant d'or que du point de vue doctrinal. 

« La lumière, pour les scientifiques qui ont examiné cette question, se trouve en faveur du premier juge. Le deuxième juge vient pour faire la spéculation qui est très favorable à la démarche doctrinale. C'est juste pour enrichir le droit. La rétroactivité n'est pas prévue en cette matière », a-t-il indiqué. 

Depuis le début de cette saga judiciaire liée à un présumé détournement des fonds alloués au parc agro industriel de Bukanga Lonzo, la Cour constitutionnelle a rendu 2 arrêts contradictoires. En novembre 2021 sous la férule du professeur Dieudonné Kaluba, cette juridiction s'était dessaisie de ce dossier. 

Un an après, la Haute cour s'est rétractée en se déclarant compétente pour juger un ancien premier ministre pour des faits commis pendant l'exercice de ses fonctions. Cet arrêt a été prononcé par le président de cette juridiction, Dieudonné Kamuleta. 

Merveil Molo