Plus d'un millier de civils ont été tués par des rebelles dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri en l'espace de 5 mois, soit depuis que ces dernières ont été mises sous état de siège le 06 mai 2021 par le président Félix Tshisekedi.
C'est ce que révèle le Groupe d'études sur le Congo (GEC) dans son nouvel épisode de « Po na GEC » publié ce vendredi 29 octobre 2021. Dans l'introduction de ce 37e numéro, GEC s'appuie sur les données récoltées par le Baromètre Sécuritaire du Kivu (KST) et dénonce une barre « symbolique et tragique » qui est franchie.
« Cette semaine, les relevés du Baromètre sécuritaire du Kivu ont franchi une barre tragique et symbolique : la mort de plus de 1.000 civils a été enregistrée au Nord-Kivu et en Ituri depuis l’instauration de l’état de siège dans ces deux provinces, le 6 mai dernier. Pourtant, tout laisse croire que le président Félix Tshisekedi va continuer à prolonger cette mesure. Pourquoi ? », s'interroge le Groupe d'études sur le Congo.
Bien plus, dans ce numéro de Po na GEC, Pierre Boisselet, coordonnateur du Baromètre sécuritaire du Kivu, analyse l'actualité liée à l'état de siège et affirme que les effets de cette mesure ne sont pas ceux qui étaient attendus car d'après lui, les militaires et policiers qui ont pris le pouvoir à la tête des entités territoriales décentralisées, ont été « largement accaparés par les charges ».
« Et très peu de moyens supplémentaires leur ont été fournis (à l'armée et à la Police, ndlr). Conséquence paradoxale : à l’exception notable du territoire de Djugu en Ituri, l’activité de l’armée congolaise sur le terrain a en réalité diminué depuis l’instauration de l’état de siège », regrette Pierre Boisselet.
Pour ce dernier, le président Félix Tshisekedi ne montre aucun signe de remettre en cause sa décision, nonobstant les résultats du dernier sondage de GEC et la Fondation Berci qui a révélé que 66% des personnes interrogées au Nord-Kivu et en Ituri sur l'efficacité de l'état de siège, estimaient que la situation s'était dégradée un mois avant l'instauration de ce régime, soit depuis l'investiture du gouvernement Sama Lukonde.
« Lors de l'Assemblée générale de l’ONU, à New-York, le 21 septembre, il (Félix Tshisekedi) a même dit qu’il la lèverait lorsque "les circonstances qui l’ont motivé disparaîtront". Ce discours est très différent de celui de l’instauration de l’état de siège, qui prévoyait une période courte, d’un mois à l’origine. Ce changement pourrait inscrire le pays dans un piège : celui d'une mesure inefficace, mais malgré tout maintenue indéfiniment », poursuit le coordonnateur du KST.
Il sied de noter que pour sa part, l'armée et le gouvernement ne cessent de vanter les « résultats positifs » de l'état de siège, évoquant notamment des rebelles neutralisés, rendus et armes récupérées. L'armée se félicite aussi d'avoir « sensiblement réduit » la capacité de nuisance de plusieurs rébellions dans l'Est.
Glody Murhabazi, à Goma