Calendrier électoral et dialogue : Kabila n’a pas tranché

Mercredi 1 juillet 2015 - 09:49

Le chef de l’Etat, Joseph Kabila Kabange, s’est, en ce jour de la célébration du 55ème anniversaire de l’indépendance du pays, adressé à la nation congolaise. C’était inévitable. Le chef de l’Etat n’avait aucune raison d’échapper à cet exercice protocolaire. La population est restée cependant sur sa soif – le chef de l’Etat s’est refusé de donner les précisions sur les grandes questions d’actualité telles que le calendrier électoral ou encore le dialogue politique. On n’est donc pas sorti de l’ornière. Le président de la République a donc décidé d’entretenir le suspense jusqu’au bout.

Le peuple congolais aurait voulu que Joseph Kabila, son président, fût plus explicite et clair autour de grandes questions de l’heure, notamment les élections et le dialogue politique. Hélas ! Encore une fois, le chef de l’Etat est resté dans les généralités dans son discours de célébration du 55ème anniversaire de l’indépendance du pays, laissant ainsi le peuple sur sa soif.

Le chef de l’Etat a évité superbement d’entrer dans le fond des questions sur lesquelles les Congolais l’attendent. Il est resté « évasif et superficiel », faisant perdurer davantage le suspense. Lorsqu’il est apparu, dans la soirée du lundi 29 juin 2015 sur les antennes de la télévision nationale, la population a retenu son souffle. Pour elles, c’était l’heure de vérité sur des sujets qui alimentent la chronique depuis des mois.

A la place, la population a eu droit à un plat au goût d’inachevé. Si bien que sur des questions où tous l’attendaient, Kabila est resté dans les nuages, s’efforçant de rassurer sans vraiment convaincre.

Au-delà des questions sécuritaires et économiques pour lesquelles le chef de l’Etat a loué la pertinence du chemin parcouru et la portée des résultats sur le terrain, Joseph Kabila s’est largement appesanti sur les consultations qu’il a engagées en vue de baliser la voie au dialogue politique. C’est, prenant en compte l’«exigence de paix et de stabilité, si vitale pour notre pays, et dans le souci de mieux faire aboutir le processus électoral », a-t-il dit, qu’il a, depuis trois semaines, entrepris des consultations avec les représentants des forces politiques et sociales de la RDC.

Joseph Kabila en a, par ailleurs, circonscrit le cadre. « Ces consultations, note-t-il, élargies au Congo profond, à travers les entreprises entre les gouverneurs de province et les forces vives de leurs juridictions respectives, font suite à la demande pressante et insistante d’un dialogue politique par certains membres de l’Opposition congolaise ». Dans le fond, il s’agissait d’amener tous les acteurs politiques et sociaux, Majorité, Opposition et Société civile, à « convenir des voies et moyens permettant de surmonter des obstacles qui jonchent la marche vers la troisième série d’élections générales, voulues libres, transparentes et crédibles et aussi apaisées par notre peuple qui avait été privé d’élections démocratiques pendant les 45 premières années de notre indépendance ».

En a-t-il alors tiré une leçon ? Pas si évident. Sur ce point précis, le chef de l’Etat a précisé qu’il continuait de consulter, en attendant qu’une option définitive soit levée.

Le Dialogue est incontournable

Néanmoins, Joseph Kabi la persiste sur la voie du dialogue politique. Car selon lui, quatre obstacles majeurs restent à surmonter, à savoir « 1) le calendrier électoral global. Exigé à cor et à cri par 1‘Opposition. il a été contesté par la même opposition sitôt publié; 2) le financement du processus électoral. Evalués bien après l’adoption du budget 2015, à eux seuls, les besoins pour l’organisation réussie des élections s’élève à plus d’un milliard de dollars américains alors que ledit budget, pour l’ensemble des besoins de l‘Etat, était arrêté l‘équivalent, en francs congolais, de neuf milliards de dollars américains; 3) -la participation aux scrutins de 2015 d’anciens mineurs devenus majeurs, en cours du cycle électoral qui du fait de la loi électorale, en sont exclus, et donc injustement privés d’un droit que j‘estime légitime. Cette loi prévoit, en effet, que cette frange importante de notre population ne pourrait être prise en compte que lors de scrutins à venir, après le renouvellement du fichier électoral;
4) l’impératif de la sécurisation du processus électoral, les expériences malheureuses du passé, notamment l‘intolérance politique et la non-acceptation des résultats des élections par les perdants ayant conduit à des violences meurtrières avant, pendant et après les scrutins de 2006 et 2011 ».

Joseph Kabila prédit déjà l’apocalypse au cas où la majorité des Congolais se détourneraient de leur projet de dialogue.
« Ne pas régler ces questions tant voulues et de manière consensuelle pourrait plonger le processus électoral dans une impasse et engendrer des conflits de tous ordres. C ‘est pourquoi j ‘engage ces jours toutes les Congolaises et tous les Congolais à s‘inscrire dans la voie du règlement pacifique de toute divergence politique, conformément à la tradition congolaise de prévention, de gestion et de résolution des conflits ».

S’il continue de croire en la vertu du dialogue pour aplanir toutes les divergences sur la voie d’un processus électoral libre et apaisé, Joseph Kabila exclut toute ingérence étrangère dans ce qui paraît, à ses yeux, comme un problème fondamentalement congolais. Il a cependant formulé le vœu de voir les «amis de notre pays jouer, comme dans le passé, un rôle positif en vue de 1‘aboutissement heureux de cette démarche ».

Le chef d l’Etat s’est aussi refusé de mettre une croix sur la réforme territoriale et l’installation de nouvelles provinces. Il a également promis de reconsidérer la question de l’enrôlement des jeunes majeurs, exclus d’un certain nombre de scrutins revus par la CENI (Commission électorale nationale indépendante).

Toujours est-il que l’adresse de Kabila est parue circonspecte. Il y a eu trop de non- dits. Ils sont tellement nombreux que le suspense est tout aussi intact qu’il a été avant la soirée du 29 juin 2015. Tout compte fait, Kabila n’a pas tranché. Il prend encore tout son temps. Entre- temps, le train électoral qui semblait avoir quitté la gare le 12 février 2015, jour de la publication du calendrier électoral global, peine à prendre sa vitesse de croisière.

Par POTENTIEL

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