
Le sénateur congolais Jean Bamanisa Saidi vient de répondre à la récente déclaration de monsieur Ronny Jackson, membre de la commission des Affaires Étrangères du Congrès américain, suite à sa mission d'évaluation en République Démocratique du Congo et dans la région des Grands Lacs.
Dans un communiqué consulté par 7SUR7.CD, Jean Bamanisa salue d'emblée l'engagement de la communauté internationale, et en particulier les efforts initiés par l'administration américaine sous la présidence de Donald Trump, dans la recherche de la paix et de la stabilité en RDC, confrontée à une "guerre injuste" orchestrée par le Rwanda et son groupe supplétif, le M23.
Cependant, il exprime des réserves quant aux observations formulées par le Congressman Ronny Jackson à l'issue de son premier voyage dans la région. Deux points majeurs sont soulevés : la question des communautés rwandophones et le partage des richesses naturelles avec les pays voisins.
Concernant les frontières et le traitement des communautés rwandophones, le sénateur Jean Bamanisa Saidi réfute catégoriquement les comparaisons établies par monsieur Jackson, qu'il qualifie de basées sur des "faits biaisés". Cet élu des élus insiste sur l'engagement de la RDC envers l'égalité de toutes ses 450 ethnies, soulignant l'intégration des rwandophones au sein de hautes institutions de la République. Le problème, selon lui, ne réside pas dans une discrimination intrinsèque, mais plutôt dans la manipulation de ces communautés par des dirigeants des pays voisins, exploitant des liens sociologiques pour les détourner de leur allégeance à l'État congolais, les poussant même à prendre les armes contre leur propre nation.
Le second point abordé concerne la question sensible du partage des richesses naturelles. Ce sénateur congolais rappelle que la doctrine prônant la transformation des ressources congolaises dans les pays voisins était initialement soutenue par les États-Unis, la France et la Belgique au sortir des conflits en 2004. Des statistiques alarmantes sont avancées pour illustrer le déséquilibre criant qui en résulte. En 2023, le Rwanda aurait exporté près de 5 tonnes d'or pour 302 millions de dollars (rien qu'entre avril et juin 2024), tandis que l'Ouganda a vu ses exportations d'or augmenter de plus de 1000%, atteignant près de 46 tonnes pour une valeur estimée à 2,3 milliards de dollars. En comparaison, la RDC, malgré son potentiel, n'a déclaré que 34,5 tonnes d'or exportées légalement en 2023.
"La RDC ne bénéficie que marginalement de l'exploitation artisanale et à petite échelle de ses ressources, près de 99% étant frauduleusement acheminés vers les pays voisins. Cette situation, imposée et facilitée depuis 2004, a engendré un déséquilibre économique, social et sécuritaire profond, contribuant à la déstabilisation de l'Est du pays", dit-il.
Face à cette situation de faiblesse persistante, celui-ci a demandé au congressman Ronny Lynn Jackson de prendre le temps de mieux appréhender la complexité de la RDC, évitant des analyses hâtives et des solutions potentiellement incendiaires. Il a aussi appelé les pays de l'EAC (Communauté d'Afrique de l'Est) et de la SADC (Communauté de Développement de l'Afrique Australe) à uniformiser leur législation fiscale concernant le commerce des ressources naturelles (les "3T" : étain, tantale, tungstène, ainsi que l'or et le bois). Plutôt que de se contenter d'exporter des matières premières brutes vers les pays voisins, il propose la mise en place de conditions concertées pour encourager l'implantation d'entreprises en RDC et vice versa (Rwanda, Ouganda, Kenya et Tanzanie), avec une fiscalité identique et des avantages administratifs et fiscaux similaires. L'objectif est de créer une zone de concurrence juste et équitable pour tous.
David Lupemba, à Goma