Présidentielle 2016 : Muzito, candidat de l’Ouest

Mercredi 13 mai 2015 - 11:30

En 2016, la présidentielle se jouera sur plusieurs tableaux. Avec la disqualification plus que probable de Joseph Kabila de la course - par le fait du verrou constitutionnel - les jeux paraissent largement ouverts. Ils seront nombreux à se bousculer au portillon. Le clivage Est-Ouest qui a toujours caractérisé la scène politique congolaise pourrait dès lors resurgir. Si à l’Est, Kamerhe et Katumbi émergent du lot des présidentiables, à l’Ouest, Adolphe Muzito prend de plus en plus de l’ampleur. Ses tribunes reprises dans la presse traduisent les ambitions de celui qui se positionne pour porter haut la voix de l‘Ouest dans la grande bataille électorale de 2016. Dans la ville haute, on en parle déjà.

L’année 2016 avance à petits pas. L’organisation en octobre 2015 des élections provinciales inaugure un cycle qui va se terminer en novembre 2016 par la présidentielle. Pour l‘instant, la panique n’a pas gagné différents camps politiques.

Dans la Majorité présidentielle, la probable disqualification de Joseph Kabila de la course présidentielle hante les esprits.
Par deux fois, la MP a échoué dans sa tentative de contourner le verrou constitutionnel de l’article 220. La révision de la Constitution, suivie du projet de révision de la loi électorale, se sont avérées contreproductives. Pour le moment, Kabila est hors course de la présidentielle. En attendant que son pré-carré lui trouve une nouvelle issue. Sur ce point, la MP n’a pas totalement désarmé.

Toujours est-il que la difficulté d’aligner Kabila en 2016 nourrit des ambitions - encore ternes - au sein de sa famille politique. Ceux qui ont tenté de s’afficher ouvertement ont fait l’objet ou presque d’une fatwa, L’on se souvient de la grande hargne qui s’est abattue sur le gouverneur du Katanga, après avoir évoqué son fameux « troisième pénalty » que tous, dans la MP, ont vite assimilé à un troisième mandat improbable de Kabila. Mais, dans la MP, Katumbi n’aura été qu’une voix qui s’est ouvertement affirmée sur la place publique. D’autres, comme lui, se terrent encore dans l’ombre, attendant juste le bon moment pour s’afficher.

Tous n’ont les regards que sur Kabila. Il suffit que Kabila se déclare hors de la course en 2016 pour qu’une vague déferlante se déchaine sur la MP. En attendant la fameuse avalanche qui pourrait se déclencher au sein de la MP, ça s’agite petit â petit autour de Kabila. Le choix du dauphin, c’est-à-dire celui qui portera l’étendard de la MP en 2016, sera âpre.

Plusieurs noms circulent déjà, au nombre desquels l’on compte le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku, le Premier ministre, Matata Ponyo Mapon, tout comme le gouverneur du Katanga, Moise Katumbi. Rien n’est cependant encore décidé. Kabila n’en fait d’ailleurs pas sa priorité. Devant le bureau politique de la MP, réuni dernièrement à Kinshasa dans sa ferme de Kingakati, tout comme au Katanga, lorsqu’il recevait dans sa ferme de Kashamuka les notables de cette province, Kabila a esquivé ce débat, préférant se concentrer, disait-il, sur son mandat qui court jusqu’en novembre 2016, Ce qui n’étouffe pas les ambitions dans, ses rangs.

Allié de la MP depuis l’alliance signé en 2006, le Parti lumumbiste unifié (Palu) s’est presqu’effacé des grands débats politiques. On a donc peu entendu le Palu lorsqu’il fallait débattre de la révision de la Constitution. De même, le Palu s’est montré aphone concernant le grand débat autour de la révision de la loi électorale. En lieu et place, le Palu a préféré prendre la tangente en initiant une série d’échanges sur les grandes questions d’intérêts nationale. En effet, personne n’est parvenu à décrypter les vrais mobiles de la démarche originale du parti d’Antoine Gizenga.

Débat clos, c’est Adolphe Muzito qui a pris les relais en multipliant dans la presse des tribunes. La toute dernière en date pose la problématique de l‘émergence de la RDC à l’horizon 2030. Dans la ville haute, la stratégie du Palu a été retournée dans tous les sens. On en parle de plus en plus. Evidemment, rien ne se dessine encore. L’on sait que la démarché du Palu s’intègre dans un schéma bien cohérent, dont le maitre d’orchestre parait être Adolphe Muzito, ancien ministre du Budget et ancien Premier ministre.

En effet, dans la structure politique du Palu. Muzito n’a pas une fonction clairement définie. Curieusement, c’est lui qui a été au centre des matinées scientifiques initiées par le Palu en marge de son cinquantenaire. Aujourd’hui, c’est encore lui, Muzito,.qui délivre dans la presse ce qu’il convient de considérer comme le nouveau projet de société du Palu. Qu’est-ce à dire ?
Les scenarii possibles.
Deux hypothèses sont possibles. Premièrement, Muzito se prépare à hériter du Palu. Rongé par le poids de l’âge, le patriarche Antoine Gizenga n’est plus en mesure physiquement de garantir la gestion efficace du parti. A l’approche de 2016, année de tous les enjeux, le Palu s’emploie à redéfinir sa ligne en vue de s’imposer. Une tâche que Gizenga ne sera pas en mesure d’assumer pleinement.

Secrétaire permanent du parti, Willy Makiashi n’a pas la carrure nécessaire pour fédérer toutes les tendances au sein du parti. La nature ayant horreur du vide, Muzito sait qu’il a une carte à jouer. Prendre la direction du Palu lui donnera plus d’aura sur la scène politique congolaise. Il a tenté d’expérimenter sa stratégie avec l’organisation de dernières journées scientifiques. Son influence au niveau du Palu s’est revigorée. De ce côté-là, Adolphe Muzito ne se fait plus de souci. Même si statutairement, il ne se retrouve dans les organes du parti, son ombre plane déjà sur le Palu. Antoine Gizenga avec qui il entretient d’importants liens de famille ne devrait pas non plus lui faire ombrage.

Rappelons que c’est sur lui que Gizenga avait jeté son dévolu lorsqu’il fallait lui trouver un successeur à la Primature. C’est tout dire.

A la conquête de l’Ouest

La deuxième hypothèse est de portée nationale. Mais, au-delà du Palu, Muzito a aussi une carte à jouer dans la course à la présidentielle. Ressortissant de l’ancienne province du Bandundu, Muzito a la possibilité de consolider son ancrage dans la partie Ouest. Ancien chef du gouvernement, il jouit d’une marge de manœuvre assez large pour pouvoir être accepté par les autres, notamment au Kongo central et à l’Equateur. Il a en plus les atouts nécessaires pour être à la mesure de la tâche.

Les tribunes qu’aligne depuis un temps Adolphe Muzito tiennent à un schéma bien précis. L’on ne peut pas nier la haute facture intellectuelle des réflexions que l’ancien Premier ministre livre l’opinion. Sa toute dernière livraison, portant sur les conditions de l’émergence de la RDC à l‘horizon, a tout d’un programme d ‘actions. Elle traduit les convictions d’un homme prêt à se lancer dans l’arène pour faire triompher ses idéaux.

Décidément, Muzito lorgne sur deux fronts : la direction du Palu et le positionnement pour porter la voix de l’Ouest à la prochaine présidentielle. C’est de bonne guerre d’ailleurs, commente-t-on dans les milieux spécialisés. Dans la ville haute, chacun cherche à décrypter à sa manière les messages qui se cachent dernière les tribunes de Muzito.

Néanmoins, on lui reconnait des qualités qui pourraient bien le pointer en candidat sérieux en 2016. A l’Est, Kamerhe (Sud-Kivu) et Katumbi (Katanga) sont présentés comme de potentiels présidentiables en 2016.

A l’Ouest, par contre, c’est le vide total. Les ambitions sont encore tapies dans l’ombre.

A l’Equateur, Léon Kengo court avec un sérieux handicap. Comme Antoine Gizenga, l’âge, âge ne joue pas en sa faveur. A défaut de Kengo, l’on voit mal l’Equateur se liguer derrière un candidat. Dans le Bandundu, la disqualification de Gizenga est quasiment certaine. Le Kongo central baigne également dans l’incertitude. De part et d’autre, il y a un vide qui n’attend plus qu’à être comblé. Cette réalité n’échappe pas à la vision de Muzito.

Comme une araignée, Muzito tisse calmement sa toile. Son emprise dans le Palu ne faisant l’ombre d’aucun doute, il se positionne aujourd’hui comme un atout majeur pour porter la voix de l’Ouest à la présidentielle de 2016.

LE POTENTIEL

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