Déposé au Bureau de l’Assemblée Nationale le lundi 05 janvier 2015 par le Vice-Premier ministre et ministre de l’intérieur, Evariste Boshab, et distribué aux députés nationaux à partir du mardi 06 janvier, le « Projet de loi modifiant et complétant la Loi n° 06/006 du 9 mars 2006 telle que modifiée par la Loi n°11/003 du 25juin 2011 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales » est commenté en sein divers tant au sein des états-majors politiques qu’au niveau de l’homme de la rue. Si les uns s’attardent sur la hauteur de la caution financière (100 millions dé francs, soit plus de 100 milles dollars américains à débourser pour être candidat Président de la République), transformant du coup le poste en chasse gardée de la très haute bourgeoise politique, d’autres s’attardent sur les critères du diplôme et de l’expérience professionnelle.
S’agissant précisément du diplôme, l’on note que le législateur congolais n’en fait plus un critère déterminant pour être candidat à un mandat électif, à tous les niveaux. Ainsi, n’importe quel citoyen congolais peut postuler à la présidence de la République, à la députation nationale, à la fonction de sénateur, à la députation provinciale, au gouvernorat de province… sur pied soit de son titre académique, soit d’une attestation en tenant lieu, soit encore d’une attestation des services rendus délivrée par l’autorité compétente.
En clair, l’on peut ne pas être détenteur d’un diplôme universitaire (licence ou graduat) et prétendre à l’exercice de plus hautes charges de l’Etat, sur la base de son V expérience (services rendus). Le hic dans l’affaire est que le diplôme, considéré comme l’un des indicateurs de la présomption du « savoir » chez un individu, est banalisé. Or, dans ce pays, certains corps des métiers sont hermétiquement fermés aux non détenteurs des titres académiques spécifiques à la filière visée. C’est le cas des magistrats, avocats, médecins, architectes, ingénieurs topographes, ingénieurs mécaniciens, ingénieurs électriciens, ingénieurs en bâtiment, ingénieurs en ponts et chaussées, géologues, géographes, chimistes, pharmaciens, architectes, informaticiens, historiens, économistes, comptables, enseignants, infirmiers, aides-accoucheuses, kinésithérapeutes, etc.
Quelle valeur aurait encore un diplôme universitaire en RDC s’il ne peut plus servir d’élément d’appréciation du niveau d’instruction d’un élu du peuple ? Pour d’aucuns, le diplômé de licence ou de graduat aurait dû être exigé aux candidats « Président de la République », « Sénateur », « Député », « Gouverneur de province », « Bourgmestre » … au même titre que l’attestation des services rendus. Car, avant d’acquérir l’expérience, il faut commencer par justifier son niveau de formation dans son domaine d’activités. Et, il n’y a pas meilleur moyen de renseigner le public que le diplômé, même si, dans ce pays, les titres académiques sont monnayés dans les « Universités-ligablos ». Pourquoi le législateur congolais a-t-il levé l’option de banaliser le diplôme dans la course aux mandats électifs ?
Il faut convenir qu’il y a tout de même des « dossiers » de la République qui exigent un certain niveau de connaissances de la part de ceux qui aspirent à solliciter les suffrages des électeurs. La banalisation de certains critères de sélection peur être lourde de conséquence en termes de gestion de la « Res publica ».
Attestation de services rendus : parlons-en!
Lorsque les rédacteurs du projet de loi électorale font état de x l’attestation de services rendus » qu’un candidat à la présidence de la République ou à la députation nationale peut brandir en lieu et place du diplôme, ils visent exactement quel type de document? S’agit-il de l’attestation à obtenir absolument du responsable d’une administration publique, d’une entreprise publique, d’une entreprise privée ou de n’importe quelle personne physique ou morale ayant statut d’ « employeur »?
Si l’ « autorité compétente» dont parie le législateur est un fonctionnaire de l’administration publique, l’on n’est en droit de se demander si les « services rendus » sont devenus l’apanage de la seule administration publique. Dans l’hypothèse où il peut s’agir de n’importe quelle personne ayant utilisé une autre à son service, la voie est alors largement ouverte au clientélisme. Quiconque voudrait se faire élire « Président de la République », « Sénateur », « Député national », « Député provincial », « Gouverneur de province », « Commissaire Urbain », « Bourgmestre », pourrait se faire délivrer par son père, sa mère, son oncle, sa tante, son frère, sa sœur, son beau-frère, sa belle-sœur, son grand-père, son grand-mère, son copain, sa copine, son amant, sa maîtresse... sa petite « Attestation des services rendus ». Ici aussi, on s’achemine vers la dévaluation de I’expérience, ce critère pourtant décisif dans l’exercice des charges publiques. Bref, le binôme « Diplôme-Expérience » aurait dû être maintenu dans le paquet des conditions à remplir pour être candidat à la magistrature suprême du pays, à la députation nationale ou à la direction des entités décentralisées.
Kimp