*Les choses s’accélèrent pour le Gouvernement Matata qui a déposé hier, lundi 5 janvier 2015, en toute urgence, le nouveau projet de loi électorale portant organisation des élections présidentielles, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales. Aussitôt après la clôture du Conseil des Ministres, Evariste Boshab, ci-devant Vice-Premier Ministre et Ministre en charge de l’Intérieur, a pris la direction du Palais du Peuple, siège de l’Assemblée nationale, où l’attendait Aubin Minaku. Au total, 51 articles de la loi de 2006, modifiée en juin 2011, ont été modifiés ou, à la limite, reformulés. Aux 51 articles, il faudrait ajouter 8 dispositions nouvelles.
Le Porte-parole du Gouvernement, Lambert Mende, en a fait l’économie. Renforcement de la sanction pénale pour quiconque participerait à l’altération des résultats ; ajout de l’autorité administrative locale parmi les destinataires des fiches et PV des résultats électoraux pour une publicité par affichage selon les modalités fixées par la CENI ; droit d’accès plus large des partis politiques et candidats indépendants aux listes des électeurs préalablement aux scrutins ; publication des listes définitives des électeurs avec leur assignation dans des bureaux de vote identifiables ; approche genre dans l’établissement des listes électorales de femmes que dans l’attribution des sièges avec l’obligation légale d’avoir au moins 30% de femmes dans les deux cas ; cooptation des chefs de groupements comme membres de droit des conseils de secteur ou de chefferie pour assurer la représentation de tous les groupements au sein dudit conseil ; possibilité donnée aux Congolais résidant à l’étranger titulaires d’une carte d’identité et d’une carte consulaire de participer à l’élection présidentielle dans les centres de vote déterminés par la CENI ; enfin, la majoration des frais de dépôt de candidature, afin de lutter contre la multiplicité de candidatures fantaisistes. La première réaction enregistrée a été celle du Président de l’Assemblée nationale.
Aubin Minaku a, dans la foulée, expliqué que le projet de loi unique du Gouvernement n’a aucun lien avec la révision de la Constitution. Aussi s’attend-il à un débat serein en plénière, loin du genre parlement-débout. Les assurances que tente d’offrir le Président de l’Assemblée nationale suffisent-elles à convaincre ses collègues Députés de l’Opposition, farouchement opposés à tout débat sur la loi électorale ? Rien n’est moins sûr.
Au-delà de l’attitude que peuvent adopter les parlementaires issus des rangs de l’Opposition, certaines modifications ou nouveautés apportées peuvent paraître conflictogènes. La disposition concernant la majoration de la caution financière imposée au candidat s’avère discriminatoire. Seuls les riches ou leurs enfants, les politiciens qui ont fait fortune au sein de l’appareil étatique ainsi que les hommes d’affaires auront les moyens financiers pour concourir à un poste électif. On peut se demander à quoi une telle disposition peut bien servir. Le pays risque alors de se retrouver coupé en deux. D’un côté, une infime minorité des riches jouissant de tous les droits et avantages et, de l’autre, les pauvres largement majoritaires mais exclus de la gestion de la chose publique. Non pas parce que les pauvres n’ont pas de capacités intellectuelles et physiques pour imprimer au pays une nouvelle direction, mais pour cause de leur extrême pauvreté financière. Pourtant, les classes sociales ont été supprimées depuis des siècles.
Autre disposition à problème, c’est le quota de 30 % que l’on tient à accorder aux femmes sur toutes les listes électorales. Une disposition sur laquelle la Cour Suprême de Justice s’est déjà prononcée. En son temps, la haute Cour l’avait jugée anticonstitutionnelle, car la loi fondamentale garantit aux deux sexes une égalité parfaite. Y a-t-il des éléments nouveaux pour que la Cour Suprême se dédise cette fois-ci ? Par ailleurs, il y a la problématique du vote des Congolais vivant à l’étranger. Leur identification s’avère une tâche ardue. A l’analyse, si le niveau de débats s’élevait à l’Assemblée nationale, plusieurs dispositions nouvelles de la loi électorale pourraient ne pas passer. Ce ne sera pas une première en RDC durant la législature en cours. L’ex ministre de la Justice, Wivine Mumba, avait vu ses trois projets de lois rejetés sans autre forme de procès par les Députés nationaux, ceux de la Majorité en première ligne.
La Pros.