Renaissance africaine : un vaste chantier politique et intellectuel

Mercredi 29 avril 2015 - 08:11

L’Afrique ne veut plus être roulée. L’esclavage, la colonisation, la néo-colonisation n’ont fait que des ravages. N’ayant pas trouvé le salut dans les plans de la gouvernance mondiale (Banque mondiale, FMI, ONU), les Etats africains ne réaliseront leur émergence que par la renaissance du continent noir. Un vaste chantier pour lequel seul l’apport des Africains eux-mêmes est déterminant.

« La recherche de l’excellence part de la conscience de la médiocrité. La traite négrière (4 siècles), la colonisation et la néo-colonisation (plus d’un siècle) sont, pour le professeur Kä Mana, des périodes des ténèbres, de déshumanisation, de zombification, d’imbécilisation et de sécheresse mentale du peuple africain par l’Occident ».

Dès lors, soutient le professeur Théophile Obenga du Congo Brazzaville, «l’Afrique ne doit plus accepter d’être roulée. Elle doit s’engager d’urgence dans le projet de sa renaissance. Celle-ci, est une « urgence politique et une nécessité historique ».

Il apparaît donc que le seul combat qui valle la peine d’être mené par les Africains, ensemble, est celui d’impulser une renaissance du continent, berceau de l’humanité, en vue de son émergence.

Pour ce penseur de renom, « les Africains ne doivent plus être comme des singes heureux dans leur forêt. On est trop dominé. Ça doit cesser. »

Telles sont les idées forces du symposium international organisé par le Forum des responsables des médias d’Afrique centrale (Fremac), du 24 au 25 avril 2015 à Kinshasa, sous le thème « Les médias africains et la renaissance africaine».

Intervenant le samedi 25 avril 2015 à ce forum, le professeur Obenga a soutenu que « la renaissance africaine est une responsabilité intellectuelle et politique qui demande d’imaginer des scenarios plausibles de son opérationnalisation ; elle passera par la réforme de l’enseignement, les projets intégrateurs ou encore la promotion du tourisme panafricain ».

Il estime que « le tourisme est un élément majeur pour que les Africains apprennent à se connaitre, ce qui fera éviter des incompréhensions voire des conflits ; les médias sont une force sociale, sociologique, culturelle pour conscientiser les masses africaines à ce projet ».

Ainsi, le professeur Obenga a plaidé pour l’avènement des médias africains transcontinentaux, susceptibles de porter très haut le message de la renaissance et qui devront aussi accaparer tous les grands enjeux panafricains et en donner leur propre récit.

Contrairement à ce qui se passe actuellement, où ce sont des médias occidentaux qui, soupçonnés d’œuvrer pour la subordination des africains, parlent de l’Afrique selon leur vision et intérêts.

La renaissance par l’enseignement

Dans cette quête de la renaissance, les journalistes africains devront donner des informations étoffées, critiques, documentées sur les espoirs africains. Surtout que le peuple africain a besoin d’une grande union et de la renaissance.

Le professeur Obenga propose pour la réussite de ce projet qu’il soit mené concomitamment par tous les Etats du continent noir.

« On ne peut pas devenir seul puissant parce qu’on sera déstabilisé par les autres Etats africains faibles. Le bonheur est attractif absolument », a-t-il dit, faisant allusion à la situation en Afrique du Sud où les étrangers africains sont persécutés par les Sud-africains.

Et d’ajouter : « Les humains sont constamment en quête d’eldorado. Alors autant bâtir ensemble dans l’unité une Afrique pour les Africains parce qu’on a souffert ensemble ».

Invité pour clôturer ce symposium international, le ministre congolais de la Communication et des Médias a été particulièrement à l’aise avec l’essentiel des interventions des éminents professeurs d’universités sur « la nécessité et l’urgence de la renaissance africaine ».

Portant sa casquette de panafricaniste dans son mot de clôture, Lambert Mende Omalanga déclaré que « le salut des Africains n’est pas en Occident et il ne peut en aucune manière être le fruit de la pensée des Occidentaux ».

« L’Afrique refuse de mourir. Elle vivra. D’une existence assumée par ses fils et filles en pleine renaissance, non plus téléguidée de Washington ou de Paris, mais pensée et coachée par le propre génie créateur de ses élites », a-t-il souligné.

Certes, le forum de Kinshasa a imprimé un esprit nouveau d’engagement des médias africains dans la libération mentale et culturelle, économique et politique. Cependant, il reste que les Congolais et les Africains réalisent ce que Patrice Emery Lumumba avait promis au monde, dans son discours de l’indépendance le 30 juin 1960 :

« Nous allons montrer au monde ce que peut faire l'homme noir quand il travaille dans la liberté, et nous allons faire du Congo le centre de rayonnement de l'Afrique tout entière. Nous allons veiller à ce que les terres de notre patrie profitent véritablement à ses enfants ».