« Libérez » le fleuve Congo et autres lieux paradisiaques

Jeudi 19 février 2015 - 17:50

Pour donner un souffle nouveau aux activités de son secteur, le ministre du Tourisme avait promis dès son entrée en fonction, de s’investir personnellement dans la recherche des solutions aux principaux problèmes qui plombent le décollage du tourisme congolais. Homme d’action, Elvis Mutin wa Bashara n’y était pas allé par le dos de la cuillère, en dévoilant ses ambitions et en égrenant les principales étapes de son programme d’action. Et pour joindre l’acte à la parole, il vient d’initier un atelier de réflexion avec les experts de son ministère et les opérateurs touristiques installés en RDC.

Ce que le ministre Elvis Mutin n’est pas censé ignorer est que le secteur, véritable niche d’opportunités pour les investissements directs étrangers et source potentielle des recettes fiscales pour le Trésor public, après les mines, est en train de végéter, alors qu’il aurait pu être un facteur important de développement et de croissance économique de la RDC, comme il l’est pour la Tunisie, le Maroc, le Kenya, la Namibie, le Botswana et l’Afrique du sud, réputés pays touristiques.

En dehors de lieux historiques célèbres et certains espaces aménagés avec jets d’eau et jeux de lumière, le fleuve Congo et ses rivages, les ponts, les boulevards et même certaines avenues de Kisenso ou de Kitokimosi sont érigés en places stratégiques où ne peuvent s’aventurer les premiers touristes venus. N’oser pas répondre à un appel téléphonique à ces endroits, sinon, vous risquez d’être interpellé pour « avoir pris des photos avec votre portable ». Et pour votre libération, après fouille corporelle et interrogatoire serré, il faut payer des amendes transactionnelles, ainsi que des pourboires aux agents qui vous ont sortis de cette mauvaise passe.

C’est incroyable que même les marchés publics, tels que le Marché central, Gambela, Somba Zigida, et le marché de la Liberté, réputés de lieux publics de commerce, sont également frappés du sceau de l’inviolabilité, autant que les installations militaires et policières. Toute visite d’un groupe de touristes est subordonnée à une demande préalable auprès de l’administrateur et des services de sécurité, introduite deux semaines ou plus avant la manifestation. En outre, il faut joindre à cette requête, la liste des personnes qui sollicitent de visiter le marché, ainsi que les activités connexes auxquelles elles vont se livrer, notamment prendre des photos, filmer des paysages ou des échoppes ou autres étalages.

Des sites touristiques érigés en sites stratégiques

Voici pour l’anecdote.
Un jour, le photographe d’un journal de la place soucieux d’immortaliser les images pittoresques du marché Gambela où la vente de petits ruminants, des oiseaux de basse-cour, et le commerce des tissus wax et autres articles manufacturiers, se côtoient dans un vacarme assourdissant, s’est vu interpellé.

L’homme a été happé par une meute d’agents qui se réclamaient des services de l’Etat, tous décidés à lui soutirer ses quelques billets de banque, au terme d’un long interrogatoire musclé et éprouvant. Déjà, on l’avait déchaussé, démoralisé et fouillé de fond en comble jusqu’au niveau du bassin.

Il a fallu l’intervention d’un responsable des médias pour faire comprendre aux agents et à leurs chefs, la liberté et les droits des citoyens et des journalistes à se faire photographier ou à prendre des images de lieux publics, sont garantis par la Constitution.

Cela fait partie des droits de l’Homme que notre pays est censé respecter et faire respecter par ses fonctionnaires.

Les nombreux opérateurs touristiques qui ne réalisent pas un taux de remplissage moyen des sites touristiques et ne connaissent pas de fortes saisons touristiques, travaillent en deçà de leurs capacités. Comme qui dirait, ils travaillent à perte, alors que toutes les conditions sont réunies, les sites paradisiaques en place, les paysages merveilleux, une faune et une flore d’exception, les hôtels et les agences touristiques, tous disposés à assurer un séjour inoubliable aux touristes.

Mais il faudrait débarrasser l’Est, une zone hautement touristique avec ses parcs naturels, ses lacs poissonneux et ses montagnes fabuleuses côtoyant quelques volcans, des groupes armés et autres mouvements rebelles étrangers. Le touriste, dit un adage, est frileux de toute zone d’insécurité.
Aussi pour donner une nouvelle jeunesse au tourisme congolais, il faut libérer le fleuve Congo, les lacs et rivières, les ponts et certains bâtiments publics. A Rome, on se fait photographier volontiers au Vatican. Au Maroc, les touristes peuvent se faire photographier devant le Palais royal, à côté des gardes en tenue. C’est cela [e tourisme. Chez nous, tout est tabou. Tout est site stratégique. Tout est site interdit. Il nous faut donc ôter le caractère tabou ou interdit à tout pour relancer l’industrie touristique congolais en panne.
Par J.R.T.

 

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