Incursion de militaires burundais dans le Sud-Kivu : Kinshasa dément sans convaincre

Lundi 15 septembre 2014 - 10:35

Y a-t-il ou non des militaires burundais basés dans le Sud-Kivu ? La société civile et les populations sur place répondent que oui, le gouvernement congolais dément catégoriquement. Une cinquantaine de maisons qui servaient à loger les travailleurs d‟une sucrerie aujourd'hui fermée, mais aussi des tentes installées à au moins deux endroits près du village de Kiliba : voilà les infrastructures qu‟occupent entre 750 et 900 hommes armés, selon des ONG locales et la population sur place. Les habitants affirment voir régulièrement ces soldats dans le village le soir ou lors de patrouilles, tout comme des véhicules immatriculés au Burundi. Il suffit en effet de circuler dans les champs à 500 mètres du village pour apercevoir des tentes et des éléments vêtus de treillis aux couleurs du Burundi.
Quelle est la mission de ces hommes ? C‟est justement la question que posent les habitants de Kiliba, situé à moins de cinq kilomètres de la frontière avec le Burundi, depuis plusieurs mois. Mais les autorités sont formelles : il n‟y a aucun soldat burundais sur le sol congolais, assure le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende. La mission de l‟ONU au Congo a également démenti à RFI cette présence. Elle assure avoir envoyé quatre missions sur place. Alors, qui sont ces hommes ? S'agit-il d'un contingent du pays voisin ? Ou d‟Imbonerakure, ces jeunes du parti au pouvoir au Burundi. Là encore, Kinshasa, Bujumbura et la Monusco démentent avec force leur présence. Enfin, d'après les populations sur place, ces jeunes Burundais Imbonerakure auraient disparu du paysage fin mai. De qui s‟agit-il alors ? Pour avoir posé avec insistance cette question, deux acteurs de la société civile congolaise affirment avoir été victimes de menaces. La présence d'une centaine d'hommes a été constatée par RFI et dénoncée par les oppositions et sociétés civiles des deux pays. Officiellement du côté de la RDC comme du Burundi, et de la Monusco, la Mission des Nations unies au Congo, on dément cette présence. Cette affaire rebondit alors que l'activiste des droits de l'homme burundais, Pierre-Claver Mbonimpa, est hospitalisé. Il est accusé d'atteinte à la sécurité de l'Etat pour avoir dénoncé la présence d'entraînement de jeunes Burundais dans l'est du Congo. Son procès est en cours. L’opposition demande d’une enquête Suite à ces révélations de RFI, la population a commencé à réagir et tout d'abord l'opposition. Vital Kamerhé, président de l‟Union pour la Nation congolaise (UNC) - troisième parti d'opposition - appelle à l'ouverture d'une enquête transparente de la part des autorités pour déterminer, avec précision, ce que font ces présumés militaires burundais en RDC. La réponse qui avait été donnée à la population en son temps c‟est que c‟était des militaires burundais qui s‟entraînaient sur le territoire congolais. […] Nous allons demander à nos députés de se rendre sur place et qu‟on nous prouve effectivement qu‟il n‟y a pas ces militaires burundais sur le territoire congolais. Il ne faut pas que le gouvernement se réveille en retard. Il doit prendre cette sonnette d‟alarme au sérieux. Démenti burundais systématique Depuis plus de deux ans, l‟armée burundaise dément systématiquement toute présence dans l‟Est du voisin congolais, mais aujourd‟hui cela ne semble plus suffire, car les accusations sont de plus en plus nombreuses et viennent de toutes parts. Ces soldats seraient chargés notamment de traquer des dissidents des ex-rebelles burundais des FNL qui opèrent depuis l‟est de la RDC, en vertu d‟un accord secret entre les deux pays, ce que dément encore une fois le porte-parole de l‟armée burundaise : « Il y a un cadre d‟échange d‟informations qui est bien reconnu, sinon en ce qui nous concerne, nous sécurisons notre frontière, on a renforcé les éléments dans la forêt de la Rukoko qui faisait l‟objet d‟infiltrations à partir de la République démocratique du Congo. Ça ne veut pas dire que les militaires burundais ont traversé la frontière », a encore expliqué le colonel Gaspard Baratuza.
La traque contre les FNL est-elle l'unique raison de cette présence ? Plusieurs sources expliquent qu'il n'y a que peu d'opérations militaires, mais beaucoup de trafic entre les deux pays, d'or, de bois ou même de pagnes. Dans son rapport de décembre dernier, le groupe d'experts des Nations unies estimait que le trafic de minerais vers le Burundi était en augmentation. Une affirmation démentie par Bujumbura.

 

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