Tribune - Affaire Biselele Bifor : La justice congolaise mise à rude épreuve, entre le droit et les injonctions politiques

Samedi 4 mars 2023 - 11:35
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Droits tiers

Affaire Biselele Bifor

La justice congolaise mise à rude épreuve, entre le droit et les injonctions politiques

 

Il s’est tenu, ce vendredi 03 mars 2023, une audience du devant le Tribunal de Grande Instance de la Gombe, siégeant en appel dans l'affaire Ministère Public contre Fortunat Biselele Kayipangi, dit Bifor. Au cours de cette audience, l'inculpé assisté de ses conseils a plaidé sur deux moyens. 

 

Détention irrégulière

Il s’agit d’abord de la main levée de sa détention devenue irrégulière. En effet, en faisant une compilation des délais en rapport avec l'ordonnance du 02 février 2023 qui est venu confirmer celle du 25 janvier 2023 ayant prorogé la détention, le Ministère Public devait amener l'inculpé devant le Juge pour obtenir une autre prorogation de la détention au plus tard le 17 février ( dans un délai de 15 jours ) et non le 21 février. Ainsi, pendant 5 jours, l'inculpé est resté en détention préventive de manière à la fois irrégulière et illégale. Il y a eu violation des articles 17 alinéa 2 et 151 alinéa 1 de la Constitution, ainsi que l'article 31 du code de procédure pénale.

Cette irrégularité et violation des dispositions légales entraîne comme conséquence : La main levée de la détention, sans condition. Il y a une Jurisprudence abondante quant à ce. En voici une : " Aux termes de l'article 31 alinéa 1 du code de procédure pénale, lorsque le délai légal fixé n'a pas été respecté, le Juge doit constaté que la détention préventive non couverte régulièrement par une ordonnance devient illégale et partant,  ne peut être prorogée. ( Cour Suprême de justice, 28.04.1981, RP. 368, inédit).

 

Libération pour raison de santé

Ensuite, M. Biselele a plaidé la mise en liberté provisoire pour raisons de santé. A cet effet, l'inculpé à produit un rapport médical signé par trois médecins du Centre Hospitalier du CPRK ainsi que d'autres pièces médicales qui confirment la précarité de son état de santé. Ledit rapport médical recommande que l'inculpé soit transféré auprès d'un médecin spécialiste en orthopédie pour recevoir des soins appropriés. 

Ainsi, si dans la pire des hypothèses le tribunal ne décide pas de la main levée de la détention de l'inculpé, il doit lui accorder la liberté provisoire pour raison de santé comme il l'avait fait pour Vital Kamhere, François Beya et autres. Ne pas accorder à Biselele Bifor la liberté provisoire pour raison de santé serait une violation manifeste et grave des articles 16 alinéa 1 et 18 alinéa 5 de la Constitution.

 

Tout bien considéré, dans cette affaire, la justice congolaisejoue sa crédibilité. Elle doit, en effet, démontrer qu’elle dit le droit sans être influencée par des pesanteurs d’ordre politique. Le verdict de l’appel tant attendu interviendra ce lundi 6 mars. Les juges du Tribunal de grande instance de la Gombe vont-ils le principe de l’indépendance du juge (article 149 et 151 de la Constitution) et obéir à la loi seule en disant le bon droit, ou violer la loi en obéissant aux faucons de l’aile dure du pouvoir qui manipulent et instrumentalisent la justice, sabotant ainsi l’état de droit prôné par le chef de l’Etat ? Wait and see. 

 

Rhodes MASAMBA

 

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