RDC - Violation des droits de la défense : Fortunat Biselele en détention irrégulière au CPRK (tribune) 

Lundi 27 février 2023 - 10:01
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Droits tiers

Interpellé par l’Agence nationale des renseignements (ANR) le samedi 14 février 2023, l’ancien conseiller privé du chef de l’Etat Fortunat Biselele a été présenté devant le parquet le vendredi 20 janvier dernier. Il a, depuis lors, été placé sous mandat d’arrêt provisoire au Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa – CPRK. 

Mais la gestion de ce dossier judiciaire inquiète les défenseurs des droits de l’Homme, tellement les droits de l’accusé sont sciemment bafoués par ceux qui, pour des raisons de positionnement personnel, ne font que saper l’état de droit prôné par le chef de l’Etat dans son élan salvateur pour une gouvernance démocratique du pays. 

L’Union des défenseurs des droits de l’Homme – UDDH en sigle – est montée au créneau pour dénoncer la détention arbitraire de l’ancien bras droit du président de la République.
En effet, après sa mise en détention provisoire décidée le 20 janvier par le Tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe, l’ordonnance du 25 janvier 2023 de la chambre du conseil a confirmé cette détention préventive pour quinze jours, ce qui fait qu’elle court alors jusqu’au 3 février 2023. Conformément à l’article 31 du Code de procédure pénale congolais, l'ordonnance autorisant la mise en état de détention préventive est, justement, valable pour 15 jours, y compris le jour où elle est rendue. Et, à l'expiration de ce délai, la détention préventive peut être prorogée pour un mois et ainsi de suite de mois en mois, aussi longtemps que l'intérêt public l'exige.

Effectivement, à l’expiration des premiers quinze jours, une nouvelle ordonnance a été prise pour prolonger la détention préventive de M. Biselele, et ce, jusqu’au 17 février. Sauf que, à cette échéance, aucune ordonnance n’a été prise. «Légalement donc, la détention provisoire de M. Biselele a cessé d’exister ce jour-là. Et tout juge respectueux de la loi devrait décider la main levée et remettre l’accusé en liberté», explique un juriste. C’est d’ailleurs sur ces entrefaites que les conseils de l’ancien conseiller privé du chef de l’Etat ont saisi le tribunal afin de faire constater l’inexistence de la détention préventive de leur client. En effet, le tribunal ne peut plus légalement prolonger ce qui n’existe plus.

Consécration de l’illégalité
Après quatre jours de vide plus tard, soit le 21 février, la chambre de conseil se réunit. Et à la surprise générale, elle décide, le 23 février, la prolongation d’une détention préventive qui a pourtant cessé d’exister depuis le 17 ; soit sept jours plus tôt ! «C’est un véritable scandale», «la consécration de l’illégalité», «une grave violation du droit de la défense», les mots ne sont pas assez durs pour qualifier ce qui est considéré par les praticiens du Droit comme un vrai déni de justice. 

Les avocats de Fortunat Biselele ont immédiatement fait appel pour mal jugé, et la décision de la chambre est attendue cette semaine.
Cette situation n’a pas laissé indifférentes les organisations de défense des droits de l’Homme. Dans une lettre ouverte adressée aux députés nationaux signée de son coordonnateur national Alexis Lianza Mboyo, et dont copie a été réservée à la ministre de la Justice et Garde des sceaux, à la Voix des voix, à l’Observatoire national des droits de l’Homme, au Forum des Nations Unies pour les droits de l’homme, et à la Commission africaine des droits de l’homme, l’UDDH estime que «nous sommes en plein dans la détention arbitraire en droit national comme en droit international, car le droit à la liberté de a personne est défini par l’article 9 du Pacte relatif aux droits civils et politiques qui liste les conditions dans lesquelles une privation de liberté est considéré comme arbitraire».

Pour les observateurs avertis, ceci constitue une violation de l’état de droit prôné par le président de la République Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, entendu comme un système institutionnel dans lequel la puissance publique est soumise au droit. L’État, pas plus qu’un particulier, ne peut ainsi méconnaître le principe de l’égalité : toute norme, toute décision qui ne respecteraient pas un principe supérieur seraient en effet susceptibles d’encourir une sanction juridique. Le chef de l’État se bat depuis son arrivée au pouvoir pour que l’Etat, qui a compétence pour édicter le droit, se trouve ainsi lui-même soumis aux règles juridiques, dont la fonction de régulation est ainsi affirmée et légitimée. Un tel modèle suppose donc la reconnaissance d’une égalité des différents sujets de droit soumis aux normes en vigueur.

Un des piliers du chef
Bien plus, depuis la mise en détention préventive de M. Fortunat Biselele, une équipe des médecins qui l’a ausculté, a transmis un rapport médical officiel dans lequel ils attestent que ce patient souffre et nécessite d’être transféré dans un centre médical pour des soins appropriés. Pourtant, depuis lors, il lui est refusé ce transfert pour des raisons inconnues. L’UUDH estime ainsi que «monsieur Biselele est non seulement abusivement gardé à vue, pire, il lui est interdit de prendre des soins appropriés  vu son état de santé actuel».
Tout bien considéré, nous sommes là en présence d’une violation manifeste des droits de M. Biselele qui est maintenu en détention au mépris des règles élémentaires du droit, devenant de ce fait l’otage personnel d’un groupe des politiciens clairement identifiés décidés à lui nuire pour des raisons de positionnement personnel. Et qui ne se gênent pas de combattre la vision du chef de l’Etat, magistrat suprême, qui prône le respect strict des droits de l’Homme et des citoyens.
Ancien conseiller privé du chef de l’Etat, monsieur Biselele a été l’architecte de l’Union sacrée, l’un des piliers sur lesquels le président Félix Tshisekedi s’est appuyé pour former une majorité de gouvernement. «C’est lui qui nous a appelé, pratiquement l’un après l’autre, et nous a convaincu d’aller signer la pétition contre le bureau Mabunda, acte fondateur du renouveau de la scène politique incarné par le chef de l’Etat», nous assure un député de l’Union sacrée. Qui ajoute : «l’humilier ainsi devant tout le monde constitue un mauvais spectacle au sein de notre famille politique».

 CP/ Nadine K

 

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