RDC : L'armée découvre un champ cultivé par les ADF en Ituri

Jeudi 20 octobre 2022 - 16:31
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Photo : Droit tiers

Le conflit armé en région de Beni (Nord-Kivu) et de l'Ituri, principalement celui entretenu par les rebelles ADF, a pris de nouvelles ramifications.

Alors qu'il est essentiellement cité dans des massacres des civils dans la contrée depuis octobre 2014, ce groupe armé d'origine ougandaise est maintenant impliqué dans la culture des champs, si l'on s'en tient aux affirmations des autorités militaires dans la zone.

Dans un communiqué de presse du jeudi 20 octobre 2022, le porte-parole des opérations conjointes FARDC-UPDF est revenu sur le bilan de récentes offensives contre ces terroristes. 

Et, en plus de 15 ADF tués en territoires de Beni (Nord-Kivu) et Irumu (Ituri) ainsi que d'importants matériels et outils de combat récupérés, le lieutenant-colonel Mike Azukayi a fait mention de la découverte d'un champ cultivé par la rébellion.

« Les opérations conjointes se poursuivent normalement dans toute leur zone d'action. Au sud d'Irumu en Ituri, 9 ADF dont une femme ont été neutralisés et 4 armes AK47 récupérées dans l'espace Tokomeka 1 et Tokomeka 3; découverte d'un grand champ cultivé par l'ennemi », écrit-il.

Au regard du mode opératoire qui est le leur, s'engager dans la culture des champs est un fait nouveau ou plutôt, sort de l'ordinaire. Aussi bien par le passé que de nos jours, ces rebelles ont souvent signé leurs incursions dans des agglomérations qu'ils pillent et où ils s'en prennent à des civils avant de se retrancher dans la forêt.

Pour leur survie, pour la plupart du temps, ces terroristes dévalisent des maisons, des boutiques et des pharmacies; emportent du petit bétail dans des entités attaquées ou encore s'emparent des produits des champs des populations dans la région.

Au moment où depuis plus de 8 ans les avis sont restés partagés au sujet de la vraie identité du tueur, cette révélation de l'armée semble consolider la thèse qui soutient que la guerre portée par les ADF est un projet d'occupation et de balkanisation : s'attaquer aux populations autochtones pour les contraindre à abandonner leur sol en faveur d'un peuple inconnu qui s'y installerait par la suite.

Déjà, entre 2015 et 2016, des mouvements des populations du sud vers le nord du Nord-Kivu ou encore vers l'Ituri, la contrée qui était et qui reste visée par les massacres, avaient fait effet d'un véritable tollé dans l'opinion. Généralement, ceux-ci venaient individuellement, par familles, ou en petits groupes, d'abord de manière exploratoire, avant d'emmener le reste de leurs familles. Ces déplacements massifs avaient coïncidé avec l'accroissement des tueries dans la zone.

Alors que les autochtones soupçonnaient déjà ces populations identifiées comme des Banyabwisha d'être derrière les tueries, lors du conseil des ministres du vendredi 11 juin 2022, le gouvernement congolais avait reconnu l'appui de ces inconnus aux rebelles ADF et aux miliciens de la CODECO.

Il sied de rappeler qu'à l'origine, les ADF sont un groupe armé formé en Ouganda à la fin des années 80 et au début des années 1990 par d'anciens officiers militaires proches d'Idi Amin Dada, ancien dictateur ougandais, avec comme objectif de renverser le régime de Yoweri Museveni. Mais, vaincu par l'armée ougandaise, ces rebelles connus auparavant sous l'appellation ADF-NALU (Forces démocratiques alliées-Armée nationale pour la libération de l'Ouganda) et dont les membres étaient en majorité des musulmans, s'étaient réfugiés en territoire de Beni (Nord-Kivu) où ils étaient parvenus à cohabiter avec les populations locales.

Mais, leur radicalisation remonte au 19 octobre 2012 avec entre autres l'enlèvement des prêtres Jean-Pierre Ndulani, Edmond Bamtupe et Anselme Kakule Wasukundi dans une paroisse catholique à Mbau, en territoire de Beni. Puis, l'enlèvement d'autres civils suivra avant que des attaques terroristes en grande échelle ne débutent en octobre 2014. Et depuis, jusqu'à aujourd'hui, aucune opération militaire n'est jamais venue à bout de la nébuleuse.

Certains rapports indiquent que depuis 2016, Moussa Seka Baluku, actuel leader en chef de la rébellion, aurait prêté allégeance à l'Etat islamique. D'ailleurs, depuis quelques années, cet État islamique revendique certaines des attaques ADF à Beni et dans l'Ituri.

Le 27 octobre 2018, le nouveau lieutenant-général Mbangu Mashita à l'époque commandant des opérations Sokola 1 et aujourd'hui commandant de la 3e zone de défense, avait révélé que ces rebelles opéraient désormais dans la région sous un nouveau nom appelé ADF/MTM (Madina Al Tawhid wal Muwahedin) avec des ramifications purement terroristes.

Isaac Kisatiro, à Butembo