Les déclarations se sont multipliées depuis le dépôt par la Commission chargée du démembrement de la Province Orientale de son rapport de travaux au Bureau de l’Assemblée provinciale de cette province à Kisangani, le samedi 04 juillet dernier. Toutes ou presque vont dans le même sens en réclamant le fonctionnement effectif de quatre nouvelles provinces, à savoir les provinces du Bas-Uélé, du Haut-Uélé, de l’Ituri et de la Tshopo, conformément à l’article 2 de la Constitution du 18 février 2006.
En effet, nul n’ignore que le Président de la République Joseph Kabila Kabange a, en date du 28février2015, promulgué la Loi de programmation déterminant les modalités d’installation de nouvelles provinces pour que la RD Congo passe de 11 provinces à 26 provinces, y compris la ville province de Kinshasa. Et qu’à l’article 8 de celle-ci, il est stipulé : “Dans les trente jours de sa constitution, la Commission présente son rapport des travaux à l’Assemblée provinciale existante qui en prend acte. La présentation du rapport par la Commission et sa prise d’acte par l’Assemblée existante enclenchent le processus d’éclatement de la province »
La Commission chargée du démembrement de la Province Orientale, sans revenir au dépassement de tous les délais, a travaillé pendant un peu plus de deux semaines à Kisangani, à l’Hôtel FOKAD dans la commune Kisangani, parfois sous la pression de l’extérieur, et dans les chefs-lieux des nouvelles provinces. Après quelques rendez-vous ratés, elle a finalement déposé son rapport de travaux le samedi 04juillet2015 vers 18 h 00 au Bureau de l’Assemblée provinciale de la Province Orientale à l’hémicycle de Kisangani en violation, selon les députés provinciaux, de l’esprit de l’article 8 sus-évoqué.
Le Président de cette Commission s’en est brièvement expliqué devant les 68 députés présents dans la salle des plénières sur les 98 que compte l’organe délibérant provincial. Selon Lwamba Iwa Nemba, le dépôt du rapport de travaux auprès du Bureau en lieu et place de sa présentation en plénière s’est fait sur ordre de la hiérarchie à Kinshasa, à savoir le vice- premier ministre de l’intérieur et Sécurité. Et d’ajouter que ce dernier fixera une date à laquelle les présentations des rapports de travaux se feront à la fois pour toutes les provinces à démembrer. Ceci dans la mesure où le travail est encore en cours dans certaines d’entre-elles.
D’ailleurs, l’opinion sait que la Province de l’Equateur, dont la Commission chargée de son démembrement était la première à terminer son travail (± 10 jours), avait déposé son rapport de travaux plein d’imperfections au Bureau de l’Assemblée provinciale à Mbandaka et non le présenter en plénière tel que le recommande la Loi citée ci-haut.
Les Déclarations foisonnent
A Kisangani, après le dépôt du rapport de travaux par M. Lwamba Iwa Nemba suivi de sa brève explication aux élus, ces derniers ont, dans l’esplanade de l’organe délibérant, lu une Déclaration politique par l’intermédiaire de l’un d’eux en la personne de James Iloka Nganda, élu PPRD en territoire d’Isangi en 2006.
Dans celle-ci, ils déclarent avoir pris acte du dépôt du rapport de travaux par la Commission et demandent aux fonctionnaires de l’Administration publique les plus gradés des provinces constitutionnelles d’enclencher déjà le processus de démembrement de la Province Orientale en vue de la mise en œuvre des nouvelles provinces (Bas-Uélé, Haut-Uélé, Ituri et Tshopo).
Par cette façon d’agir dans leur Déclaration politique, les députés provinciaux, fin mandat depuis 2011, ont mis la charrue devant le bœuf, sont allés vite en besogne, ont fait preuve d’un empressement qui ne s’explique pas.
Comme si cela ne suffisait pas, d’autres Déclarations sectorielles s’en sont suivies les élus provinciaux de l’Ituri ordonnent à la Direction Générales des Recettes de la Province Orientale (DGRPO) à Bunia de ne plus transmettre les rapports financiers à Kisangani afin de les mettre à l’abri de la prédation du gouvernement provincial
Quant à la Coordination des députés provinciaux de la Tshopo, elle en appelle sans mâcher les mots à l’incivisme fiscale : elle suspend la perception de: toutes les taxes provinciales recouvrées par la Direction Générales des Recettes de la Province Orientale (DGRPO) ; elle instruit les régies financières de la Tshopo à suspendre l’envoi de tout rapport financier à la Province Orientale en démembrement tout en communiquant les statistiques des recettes à leurs Directions Générales respectives à Kinshasa jusqu’à l’installation de la Province de la Tshopo; elle demande au gouvernement central de verser directement la rétrocession des ETD dans leurs comptes bancaires respectifs au lieu de transiter parle compte de la Province Orientale conformément à la lettre de résiliation de contrat signée par tous les chefs de secteurs et chefferies.
Questions
Tout un lot de questions se pose Comment des hommes et femmes aussi sérieux et dits honorables peuvent-ils prendre acte d’un document dont ils ne connaissent même pas le contenu ? Par quelle baguette magique ces députés vont-ils ériger illico presto leurs anciens districts et actuelles provinces constitutionnelles en provinces autonomes sans l’aval de Kinshasa? Seront-ils capables de prendre en charge toutes les Institutions provinciales et toutes les autres charges sans la rétrocession du gouvernement central? Comptent-ils sur les seules recettes générées par la DGRPO ? Comment réagiraient-ils quand sera convoquée la session extraordinaire pour prendre acte de la présentation du rapport de travaux par la Commission ? Accepteraient-ils ou déclineraient-ils la convocation au motif qu’ils sont déjà dans leurs organes délibérants respectifs qu’ils auront installés à la va-vite ?
La sagesse du Bas-Uélé
Les élus du Bas-Uélé ont eux fait preuve de sagesse. Dans leur Déclaration politique lue par le député Alexis Adipangi, élu CDC à Buta, ils demandent le retour de la Commission et la convocation imminente d’une session extraordinaire pour la présentation du rapport en plénière afin d’enclencher le processus de démembrement de la Province Orientale conformément à l’article 8 de la Loi de programmation.
Contrairement à leurs collègues de l’Ituri et de la Tshopo, les députés du Bas-Uélé demandent à la population de cette province constitutionnelle de continuer à payer ses taxes dues au gouvernement central et à la Province Orientale
Jusqu’au moment où nous couchions ces lignes, seule la province constitutionnelle du Hau-Uélé n’avait pas encore produit une Déclaration Une autre Déclaration est celle de “Elikia ya Congo’, une Association créée récemment par le ministre provincial honoraire Pierre Hubert Moliso Nendolo. Elle souligne que l’avènement de nouvelles provinces était attendu par toute la population comme la venue de Jésus-Christ. Elle appelle les autorités nationales à prendre des dispositions pour combler le vide juridique, comme pour approuver les Déclarations de l’Ituri et de la Tshopo.
Réactions
Réagissant, le Pr. Alphonse Maindo, de la Faculté des Sciences Sociales, Politiques et Administratives de l’Université de Kisangani s’étonne des Déclarations politiques des députés provinciaux de l’Ituri et de la Tshopo enclenchant déjà le démembrement de la Province Orientale. Pour lui, c’est un processus. La Province Orientale ne cessera d’exister que dès que les gouverneurs et vice- gouverneurs de nouvelles provinces démembrés seront élus.
C’est ici le lieu d’évoquer l’article 9 de la Loi de programmation déterminant les modalités d’installation de nouvelles provinces : “Le quinzième jour suivant la présentation du rapport par la Commission et sa prise d’acte par l’Assemblée provinciale existante, chaque Assemblée provinciale de la nouvelle province se réunit de plein droit en session extraordinaire en vue de : 1. L’ installation du Bureau provisoire dirigé par le doyen d’âge assisté de deux membres les moins âgés ; 2. La validation des pouvoirs ; 3. L’élaboration et l’adoption du Règlement intérieur; 4. L’élection et l’installation du Bureau définitif ; 5. L’élection du gouverneur et du vice-gouverneur de province, conformément l’article 168 de la Loi électorale”.
Avant de mettre sous presse, nous apprenions que la Commission a regagné Kisangani le jeudi 09 juillet dernier en provenance de Kinshasa. La cérémonie de présentation de rapport de travaux en plénière à l’Assemblée de la Province Orientale par elle est prévue pour ce samedi 11juillet 2015 à l’hémicycle de Kisangani.
Le problème serait ailleurs
Personne n’est dupe pour ne pas comprendre que dans leur démarche anarchique frisant la rébellion, les élus provinciaux de 2006 au mandat élastique s’évertuent, par de méthodes indigestes, à s’emparer de force de la direction des affaires des futures provinces autonomes. Après avoir lamentablement échoué dans leur motion de défiance aux griefs monotones et anachroniques contre le gouverneur Bamanisa, les voici rebondir sur le dépôt du rapport de travaux par la Commission chargée du démembrement de la Province orientale.
Des personnes avisées ne vont pas par quatre chemins pour soulever la face cachée de ce carton rouge présenté à l’autorité provinciale par les députés provinciaux. Ils ne chercheraient qu’à se faire payer leurs indemnités de sortie (6 mois) pour leur permettre de battre campagne pour les prochaines élections provinciales auxquelles ils sont candidats pour revenir aux hémicycles pour les prochaines législatures.
Par contre, voulant à tout prix obtenir la tête qu’ils recherchent, ces députés n’ont même pas tenu compte des circonstances politiques en réactivant leur motion de défiance au moment où son destinataire était en consultations de sa base en.vue d’un dialogue national, mission confiée à tous les gouverneurs de provinces par le Président de la République.
Tenant à tout prix à régler les comptes à une seule personne, les députés ont perdu le Nord et veulent brûler toute la province avec des propagations du feu à d’autres provinces. Ayant mal mené leur démarche, ils risquent de se priver de leur droit légitime étant donné que le gouvernement de la République et l’Exécutif provincial font face aux difficultés financières pour exécuter certains projets d’intérêt communautaire.
Les commentaires dans les rues de Kisangani sont formels. Ils souhaitent que les autorités compétentes coupent court aux turpitudes des organes délibérants provinciaux qui ont déjà exagérément bouffé sans mandat du souverain primaire. Ils doivent sans autre forme de procès être dissouts pour donner aux députés candidats à s’occuper de leur campagne électorale.
GIRIS