RECUSATION D’EDEM KODJO, REJET DES MESURES DE GRACE PRESIDENTIELLE… ELECTIONS AVANT DÉCEMBRE : LE RASSEMBLEMENT JOUE-T-IL AU GEL DU TEMPS ?

Mercredi 27 juillet 2016 - 07:23
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Les principaux journaux parus hier lundi 25 juillet à Kinshasa, ont consacré leur Une à la réaction du Rassemblement, l’une des plateformes politiques de l’Opposition en RD Congo. Ce cartel conduit par l’historique opposant rd congolais Etienne Tshisekedi, a récusé le togolais Edem Kodjo, facilitateur du Dialogue politique inclusif, désigné par l’Union Africaine. Tout le péché irrémissible de Kodjo est d’avoir présidé, en date du 23 juillet courant à Kinshasa, une deuxième réunion du Groupe de soutien au facilitateur du Dialogue politique national en RD Congo. Prenant le contrecoup de cette rencontre, le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement se réfère, quant à lui, au Communiqué de la même Union africaine du 04 juillet de cette année, annonçant la mise en place du groupe de soutien à la facilitation. Au-delà de la mise, le communiqué avait assigné audit groupe ses principales missions. Entre autres, la conduite des consultations avec toutes les parties prenantes en vue de la mise en œuvre de la résolution 2277.
C’est donc dans ce cadre, rappelle le Rassemblement, qu’une délégation de hauts fonctionnaires s’était déplacée en date du 09 juillet, pour rencontrer à Bruxelles, Etienne Tshisekedi entourés de quelques membres de sa plateforme. Le groupe était composé du Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, Smail Chergui, de l’Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour la région des Grands lacs, Saïd Djinnit et du Directeur général pour l’Afrique de l’Union européenne, Koen Vervaek.
Le communiqué du Rassemblement signé dimanche le 24 juillet et rendu public hier par les médias, apostrophe qu’un certain nombre d’engagements avaient été pris au cours de cet entretien entre le chef du Rassemblement et ses hôtes dans la capitale belge. Au nombre de ces engagements, la transformation du groupe de soutien en groupe de facilitation, l’inopportunité à ce stade, d’un comité préparatoire ; le groupe de facilitation devant jouer le rôle de ce comité en rapprochant les deux parties prenantes pour connaître leurs cahiers des charges afin de fixer un ordre du jour des pourparlers.
Partant, le Rassemblement considère comme anachronique, la deuxième réunion du Groupe de soutien au facilitateur du Dialogue politique, tenue le 23 juillet à Kinshasa. Et donc, toute la colère d’Etienne Tshisekedi et de tous ceux qui partagent sa vision politique au sein du Rassemblement. Commandant en chef de cette plateforme politique de l’Opposition, le président national de l’Union pour la démocratie et le progrès social a demandé à l’ancien Premier ministre togolais de rendre le tablier. Soit. GELER LE TEMPS POUR UN POURRISSEMENT EFFECTIF DE LA SITUATION ?
Dans son communiqué relayé hier lundi le 25 juillet par les médias, Etienne Tshisekedi, s’exprimant au nom du Rassemblement, a en outre demandé à la présidence de la Commission de l’Union africaine de tirer toutes les conséquences. En clair, désigner un autre facilitateur en lieu et place d’Edem Kodjo accusé d’avoir un schéma déjà élaboré à soumettre aux participants au Dialogue politique.
En tout cas, au sein de l’opinion à Kinshasa, le communiqué du Rassemblement a été au centre de tous les commentaires. A l’hypothèse qu’Edem Kodjo cède à la requête du Rassemblement et que la Commission de l’Union africaine l’accepte aussi, la démarche ne parait pas sans implications sur le calendrier même de ce Forum. Et, par ricochet, celui du processus électoral tant chahuté. Récuser Edem Kodjo, cela signifie que la Commission de l’Union africaine devra désigner un autre facilitateur du Dialogue. Bien évidemment, cela devrait prendre du temps.
Si nous admettons que l’organisation des élections est un processus, nous devons également reconnaitre que chaque étape compte. Par conséquent, le moindre retard que pourrait connaître l’un des maillons de la chaîne, pourrait se répercuter fâcheusement sur l’ensemble. Les experts de l’approche systémique sont bien lotis pour comprendre les choses. Voyons. Matin, midi et soir, l’Opposition réclame la tenue de l’élection dans le délai constitutionnel. C’est-à-dire au plus tard novembre prochain. C’est même devenu une espèce d’antienne pour l’anti-pouvoir. Du point de vue de la forme, l’Opposition a mille et une fois raison dans la mesure où, la tenue réclamée du scrutin présidentiel dans le délai est consacrée dans la constitution du 18 février 2006. Rien que de ce point de vue, le combat actuel de l’Opposition a toute sa légitimité !
Cependant, le fond pose problème. Comment peut-on prétendre aller aux élections sans calendrier ? Comment tenir une présidentielle sans pour autant apprêter un Fichier électoral nettoyé ? A moins d’accepter d’y aller avec le Fichier très critiqué de la présidentielle de 2011. Alors, si tel est le cas, la classe politique rd congolaise devra lever les options. Le bon sens admet que ces choix soient le résultat d’un consensus. D’où, l’incontournable Dialogue politique à organiser dans un format inclusif.
Tenir l’élection présidentielle dans le délai, suppose aussi que le Dialogue politique devant produire un calendrier électoral consensuel, doit se tenir à temps. Malheureusement. Quand on observe le comportement des acteurs politiques, parties prenantes à ce Dialogue, tout semble contraster avec cet idéal. En tout cas, la volonté d’aller vite ne transparait pas. Bien au contraire. On assiste plutôt aux atermoiements délibérés aux allures des agendas cachés. Comment peut-on comprendre que le Rassemblement qui réclame à cor et à cri, la tenue de l’élection présidentielle dans le délai, puisse en même temps, poser des actes qui ne concourent pas à l’objectif ultime-même de son combat ? UNE DROLE DE COINCIDENCE
Autre fait. A Goma, six militants de la Lutte pour le changement (LUCHA) concernés par l’Ordonnance présidentielle n°16/068 du 22 juillet 2016, disent " rejeter" l’offre. Plutôt que de quitter la prison à la faveur de la mesure de grâce du Président de la république, ces compatriotes qui doivent garder leur cellule carcérale pendant 24 jours, ont décidé de purger leur peine. Donc, aller jusqu’au bout. Les intéressés l’ont clairement exprimé dans une correspondance datée du 22 juillet adressée au Président de la République.
Dans cette lettre relayée par notre consœur la Tempête des Tropiques dans son édition d’hier lundi le 25 juillet, les six membres de la LUCHA motivent leur position par la solidarité avec d’autres membres de ce mouvement encore en détention à Kinshasa et qui n’auraient pas bénéficié de la même grâce présidentielle. Qu’il s’agisse du Communiqué du Rassemblement que de la lettre de la LUCHA, les faits présentent quand même une drôle de coïncidence historique.
En tout cas, vu des observateurs, ces deux faits ne relèvent pas d’un pur hasard. Encore que le hasard n’existe pas. Voyons. Parmi ses conditions pour sa participation au Dialogue politique, l’Opposition avait aussi exigé la mise en liberté des prisonniers politiques et d’opinion. Voilà qu’au moment où le Président Joseph Kabila commence à répondre favorablement à cette requête, la même Opposition semble se rebiffer. Partant de ces faits qui ne doivent pas être interprétés isolemment, nombreux sont des observateurs qui accusent l’Opposition de vouloir geler le temps. Objectif : laisser pourrir davantage la situation politique actuelle. Une question cependant : à qui profite la crise actuelle ? Laurel KANKOLE