RDC : Mokonda Bonza dénonce la « propension à la décapitation de l’Administration publique »

Samedi 13 juin 2015 - 07:22

Le sénateur Mokonda Bonza a dénoncé jeudi 11 juin 2015 à Kinshasa ce qu’il considère comme « une propension à la décapitation de l’Administration publique aux niveaux central et provincial », dans la conclusion de sa question orale avec débat adressée au ministre de la Fonction publique de la République démocratique du Congo (RDC), Jean-Claude Kibala.

« Cette décapitation a été orchestrée à la suite de la note circulaire de février 2015 initiée par le vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur et avalisée par le ministre de la Fonction publique », a-t-il indiqué au cours d’une séance plénière présidée par le speaker du Sénat, Kengo wa Dondo.

Dans sa question orale, le sénateur Mokonda a dénoncé « un traitement dégradant et humiliant » réservé aux secrétaires généraux dans l’exercice de leurs fonctions de responsable de l’Administration des ministères.

« Ces hauts fonctionnaires, victimes des maladies cardio-vasculaires ou de la mort, sont à la merci de leurs chefs hiérarchiques. Méprisés par le gouvernement qu’ils ont servi, ces secrétaires généraux ne jouissent d’aucune reconnaissance pour tous les services rendus à la Nation congolaise », a déploré Mokonda Bonza.

Face au « traitement déshonorant réservé aux secrétaires généraux de l’Administration publique », il s’est insurgé contre «l’étendue et la profondeur du mal qui bloque l’avancée de notre pays vers son épanouissement intégral ».

« Népotisme, clientélisme, tribalisme, favoritisme »

Mokonda Bonza a qualifié de « démagogiques » les propos du ministre de la Fonction publique devant « le traitement discriminatoire des secrétaires généraux de l’Administration publique ».

Il a notamment épinglé les actes de nominations « sur fond de népotisme, clientélisme, tribalisme, favoritisme » et une inertie voire une passivité dans la prise des décisions portant correction des mesures de révocation entachées d’irrégularités reconnues par le gouvernement.

Le sénateur a par ailleurs recommandé au Premier Ministre d’« abroger par décrets tous les actes règlementaires pris par les ministres sectoriels en violation flagrante des dispositions statutaires et règlementaires en vigueur ».

Il lui a aussi demandé de « veiller, dans la mesure du possible, à l’équilibre géopolitique dans la gestion de la carrière des agents et fonctionnaires des services publics de l’Etat et de revoir le principe de nomination des secrétaires généraux de l’Administration publique ».

En conclusion, le sénateur a ausculté « un malaise grandiose et lancinant qui couve au sein de l’Administration publique et risque de freiner sa contribution accélérée à l’accomplissement optionnel de toutes les réformes entreprises dans les domaines administratif, politique, judiciaire, économique et social ».

« Arrivé au sommet de la hiérarchie administrative, le secrétaire général mérite égards, protection, stabilité et confiance dans l’exercice de ses fonctions», a souligné le sénateur Mokonda.

« On ne peut pas le traiter comme un aventurier, un vagabond, un bandit de grand chemin », a-t-il stigmatisé.

Un effectif total de 793.615 agents recensés

Dans sa réplique aux préoccupations des sénateurs, le ministre de la Fonction publique a évalué l’effectif total du personnel des services publics à 793.615 agents recensés.

Jean-Claude Kibala a annoncé « la mise en place, d’ici fin juin 2015, d’un système de gestion intégré des ressources humaines qui permettra d’éliminer les doublons et les fictifs, de manière à maitriser les effectifs et la masse salariale ».

« L’Etat congolais envisage de mettre à la retraite un effectif de 222.355 agents de l’Administration publique « éligibles à la retraite. A l’état actuel, le recensement renseigne un effectif de 222.3555 agents éligibles à la retraite », a-t-il précisé.

Il a expliqué que « l’Etat n’est pas en mesure de mettre toutes ces personnes à la retraite pour permettre le rajeunissement voulu de l’Administration publique », déplorant la non- application de la mise à la retraite du personnel de carrière des services publics de l’Etat «pour des raisons de contraintes budgétaires ».

« Le gouvernement a prévu, dans le cadre de sa réforme en cours, un programme, qui vise la mise à la retraite des agents et leur remplacement par un concours interne destiné à résoudre la question épineuse de plusieurs agents non payés. Ces agents non immatriculés et non budgétisés « sont mis en service et demeurent impayés », a-t-il indiqué.

« Le secrétaire général, un grand monsieur», se souvient Betyna

« On ne peut pas concevoir une administration (de l’Etat) à plusieurs vitesses », a accusé le sénateur Thomas Betyna, ancien ministre sous l’ancien régime du défunt maréchal Mobutu., dans une intervention au débat parlementaire.

Il a critiqué, sans les citer, « chacun des ministres actuels qui gèrent le personnel de l’Administration publique sans statuts rigides ».

« Le secrétaire général, concept proposé à l’époque par le président Mobutu, remplaçait le Commissaire d’Etat (ministre), le Secrétaire d’Etat (vice ministre) comme le représentant du ministère », a rappelé Thomas Betyna.

« Le secrétaire général, c’était un grand monsieur, qui devrait garder’ la mémoire du ministère, Ceci date de plus de 40 ans. Alors, c’est oublié. On considère que le ministre peut manipuler et suspendre le secrétaire général », a critiqué le sénateur.

« La loi qui fonde la gestion du personnel de l’Etat, c’est celle du 27 juillet 1981 », a soutenu M. Betyna, précisant qu’« en 1980, il n’y avait pas un ministère de la Fonction publique ».

Il a proposé au ministre de la Fonction publique d’initier un projet de loi touchant à la base de la loi de modification dans la gestion de l’Administration.

Mpambia critique le non respect des critères de nomination

« Si beaucoup de secrétaires généraux ne sont pas aujourd’hui à la hauteur, c’est parce que les principes et les critères de nominations de ces secrétaires généraux ne sont pas respectés. Ceux qui nous ont appris l’administration, faisaient monter les cadres dans les départements, où ils ont évolué », a affirmé le sénateur Joseph Mpambia.

Il a rappelé qu’« un secrétaire général, qui a fait trois ans dans l’Administration du jour au lendemain, est nommé, c’est un grade des échelons ».

« Si nous ne respectons pas ces critères, nous devrons avoir des secrétaires généraux qui ne sont pas à la hauteur », a prévenu le sénateur Mpambia.

Sur base des recommandations des Concertations nationales, le sénateur Justin Kiluba a demandé au ministre de la Fonction publique de « revenir sur les dossiers des cadres révoqués de la DGI, de la DGRAD et de la DGDA ».

A son tour, le sénateur Anicet Goloma a convié le ministre de la Fonction publique à « fixer le Sénat sur le barème du secrétaire général qui devrait toucher la moitié de ce que touche le ministre ».

« Un décret du Premier ministre peut-il suspendre une ordonnance du président de la République ? », a-t-il interrogé.