Ne Muanda Nsemi : « A l’heure actuelle, la RDC est incapable d’organiser des élections crédibles, non contestables »

Mardi 14 juillet 2015 - 06:23

Le leader de Pax Congo, Ne Muanda Nsemi, fait partie des rares politiciens que le président Joseph Kabila a consultés et qui soutient qu’« à l’heure actuelle, la République démocratique du Congo est incapable d’organiser des élections crédibles ».

Affirmant qu’« il ne sert à rien de s’accrocher aux mots +glissement+ ou +délais constitutionnels+, », il estime que « le plus important serait de remplir les préalables à la tenue des élections crédibles ». De son constat, le travail de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) sur terrain est « bâclé » et ne pourrait permettre des élections crédibles.

Reçu le 3 juin 2015 au Palais de la Nation à Kinshasa dans le cadre des consultations présidentielles, Ne Muanda Nsemi a livré à la presse sa « sagesse » pour la sortie de crise en RDC.

Vous venez de rencontrer le chef de l’Etat dans le cadre des consultations qu’il a initiées. De quoi avez-vous parlé ?

Vous savez, dans la tradition africaine, les concertations sont continuelles. Dans la tradition africaine, le chef connait certains membres de son clan qu’il juge être sages. A tout moment, le chef peut se référer à ces sages là pour discuter. Vous savez, on ne peut pas exiger une chose et son contraire.

Une certaine opposition avait à un moment donné demander le dialogue. Et pour une fois qu’on accepte ce dialogue, ceux qui l’ont exigé se rebiffent. En ce moment là, le chef se demande : « Est-ce que tout le monde est de cet avis ? »

C’est comme ça que le chef (de l’Etat) a commencé par m’envoyer un émissaire. S’étant rendu compte que le rapport était fructueux, le chef (de l’Etat) a demandé si je pouvais venir. C’est pourquoi je suis venu.

Quelle est la finalité de ce dialogue ?

Dans ma jeunesse, j’ai étudié les mathématiques, la physique et la chimie. Mais, quand je suis arrivé en 3ème graduat à la faculté, j’ai commencé à avoir des visions spirituelles. Depuis cette époque là, beaucoup d’étudiants disaient que j’étais un homme des sciences teinté de spiritualité.

Pour le moment, certains politiciens au Congo pensent que je suis un politicien teinté de spiritualité. Vous savez, à l’époque de Mobutu, les gens pensaient que la cause de la crise zaïroise était Mobutu, qu’il suffisait que Mobutu parte et la crise allait prendre fin. Le président Mobutu est parti mais la crise continue.

Si vous avez un véhicule foutu qui ne vous donne pas un rendement satisfaisant et que vous vous décider de changer de chauffeur mais toujours le même véhicule foutu, vous continuerez à changer de chauffeurs jusqu’à ce que vous vous rendrez compte que la vraie solution c’est de changer de véhicule.

Avez-vous donné des conseils au chef de l’Etat ?

Je tiens à vous dire une chose c’est que, dans la crise d’aujourd’hui, notre pays est incapable d’organiser des élections crédibles, non contestables au plan national et régional.

Pour la simple raison que le schéma 1+4 issu de Sun City n’a pas réussi à fonctionner correctement parce qu’il y a des pans entiers des problèmes qui n’ont pas été traités.

La semaine passée, j’ai envoyé quelqu’un dans le Manianga parce que je suis Manianga. Je lui ai dit : « Allez à Luozi, entrez en contact avec la CENI. Cherchez les informations sur le fichier électoral qu’ils ont. Ça me permettra de positionner mes hommes ».

Quand mon envoyé arrive à la CENI, on lui dit non, « on nous a demandé seulement d’utiliser le fichier de 2011 ». Mais en 2011, il y a les jeunes qui avaient 17 ans. En 2011, il y avait les gens qui habitaient Luozi qui, pour le moment, n’habitent plus Luozi.

Résoudre tous les problèmes demandera beaucoup de temps. Alors, doit-on modifier le calendrier électoral ?

Ce n’est pas pour moi. Il faut absolument résoudre tous les problèmes si nous voulons des élections crédibles. Sinon, ça ne sera pas possible.

Comment alors dans cette condition concilier l’impératif du respect des délais constitutionnels ?

Le délai constitutionnel, c’est un mot. Je vous dis une chose qui est vraie et vérifiable :si vous allez sur le terrain, c’est du bluff ce qu’a fait la CENI. Les préalables pour les élections, si vous allez sur le terrain vous ne les trouverez pas. Alors, parce qu’on doit aller aux élections, on doit laisser ça? Mais, quelles élections ?

Cautionnez-vous donc le glissement ?

Ne soyez pas fanatique des termes. Lorsque la CENI a été mise sur pied, c’est pour présenter un travail de qualité. Mais, si je me rends compte que le travail que la CENI me fournit est bâclé, quand je vais relever les erreurs, vous me dites « non, nous allons être hors délai constitutionnel ».

Est-ce que le fait de ne pas pouvoir être en dehors du délai constitutionnel va nécessairement résoudre les problèmes créés par la CENI ?

C’est à vous de choisir.

Allez-vous faire passer ce message à vos collègues de l’opposition ?

Vous savez, il n’y a pas longtemps, on a formé dans ce pays un gouvernement de large union nationale de 46 ministres où la province du Kongo central a été totalement ignorée. Aucun parti de l’opposition n’a défendu cette province. Donc, l’opposition est plurielle et elle n’a pas une position unique.

Nous sommes arrivés à une conclusion que chaque parti de l’opposition a un objectif qu’il poursuit en fonction de ses intérêts. Et non pas en fonction de collègues de l’opposition.

Une sagesse dit « la maison où vous n’habitez pas, vous ne savez pas où il y a des choses piquantes ». Moi, je suis de l’opposition. Certaines personnes que vous appelez de l’opposition peuvent venir ici. Elles peuvent témoigner que moi, je parle au Parlement et je rentre chez moi à la maison.

Mais certaines personnes que vous appelez de l’opposition, la nuit ils sont partout. Ils bouffent à tous les plats.