Le dialogue, pour quelle finalité ?

Lundi 4 mai 2015 - 11:24

L'idée d’un dialogue politique émerge dans différents états-majors. Dans les rangs du pouvoir, des contacts ont été engagés avec certains poids lourds de la scène politique congolaise. Pour les dissuader, sans doute, à adhérer à cette initiative. Des partis tels que l’UDPS d’Etienne Tshisekedi, le MLC de Jean-Pierre Bemba et l'UNC de Vital Kamerhe ont été approchés en haut lieu. Si le décor se met en place pour un probable dialogue politique, son opportunité fait débat de part et d’autre. Quel en est sera donc la finalité ? La question est sur toutes les lèvres.

Le processus électoral avance à petits pas. Les élections provinciales sont déjà programmées pour le mois d’octobre 2015. Même si l’on observe un faible engouement dans les différents Bureaux de réception des candidatures déployées par la CENI (Commission électorale nationale indépendante) sur l’ensemble du territoire national, les provinciales restent néanmoins incontournables. Hélas ! Ce «est cependant pas le cas pour certains acteurs politiques qui continuent de rêver d’un probable report.

Aussi, sont-ils nombreux, ceux qui s’accrochent à l’idée d’un dialogue politique en vue de baliser la voie pour un processus électoral apaisé. Finalement, le pouvoir en place semble avoir mordu à l’hameçon. Des sources concordantes font état de contacts très avancés entre le pouvoir et différends poids lourds de la scène politique congolaise.

Des contacts, confirme-t-on, ont été déjà engagés avec, notamment l’UDPS d’Etienne Tshisekedi, le MLC de Jean-Pierre Bemba et l’UNC de Vital Kamerhe.
Sans doute, d’autres partis politiques devaient allonger cette liste.

Si l’idée d’un dialogue politique prend de plus en plus de l’ampleur, l’on s’interroge cependant sur son opportunité. Dans le contexte actuel de la RDC, où tous les regards sont tournés vers les élections, quelle finalité pourrait avoir un dialogue politique ? La question alimente la chronique dans différents cercles politiques.

Il faut cependant rappeler que le processus électoral a connu son paroxysme avec la publication, le 12 février 2015, du calendrier électoral global. Jugé trop chargé par une frange importante de l’Opposition, ce calendrier électoral s’est finalement imposé comme le seul cadre de référence à l’organisation, de prochaines élections. Le découpage territorial, lancé concomitamment par le gouvernement, s’est ajouté au lot d’incertitudes qui entourent le processus électoral.

La mise en place de nouvelles provinces et entités territoriales décentralisées ayant pris du retard, la limitation des circonscriptions pour une certaine catégorie d’élections prévues par la CENI pourraient éventuellement subir un coup - sans compter les 23 contraintes reprises par la CENI en vue de garantir l’organisation de tous les scrutins projetés entre 2015 et 2016. On est en face d’un cocktail qui réserve bien des surprises.

C’est dans ce contexte qu’émerge le projet d’un dialogue pour dégager un consensus autour, notamment, du calendrier électoral. Les défenseurs de cette thèse s’inspirent de l’accord-cadre d’Addis-Abeba qui a prévu un dialogue politique, sous l’égide de la communauté internationale, pour d’un côté, garantir la sérénité du processus électoral, et de l’autre, asseoir les bases pour une paix durable aussi bien en RDC que dans la région des Grands Lacs.

En RDC, des contacts sont très avancés dans ce sens. L’UDPS d’Etienne Tshisekedi en a d’ailleurs fait l’une de ses priorités. En effet, depuis un temps, l’UDPS ne jure que par un dialogue politique en vue, se défend-elle, de désamorcer la bombe qui risque de faire chavirer le processus électoral. Dans son entendement - et c’est le point de vue que partagent nombre d’acteurs politiques - ce dialogue politique devait permettre de revisiter le calendrier électoral global du 12 février 2015.

UN SAUT DANS LE VIDE

Quoiqu’ indispensable d’une certaine manière, ce probable dialogue politique soulève des interrogations, et non des moindres. Dans le contexte politique actuel de la RDC, l’idée d’un dialogue politique rimerait, notamment avec la suspension du processus électoral actuel, en attendant de se mettre d’accord sur un nouveau format. En corollaire, un tel dialogue amènerait sûrement à une nouvelle transition suivant les nouvelles règles de jeu, convenues préalablement au dialogue. Voilà une belle manière de surcharger davantage le processus électoral. Est-ce que la RDC a besoin de prendre ce détour périlleux? C’est la question qu’il faut se poser.

Le dialogue inclusif suppose aussi une refonte de la Constitution. Ce qui ramène à la surface le projet d’une 4ème République. De ce point de vue, le dialogue pourrait mettre en place une constituante pour fixer les règles de fonctionnement de la nouvelle République.

C’est dire que le dialogue politique autour d’un consensus qui se dégagerait au sein de la classe politique est, tout compte fait, un couteau à double tranchant. C’est un piège dans lequel risque de s’enfermer durablement la RDC. Car un dialogue suppose un coup «arrêt du processus électoral, ce qui n’est pas loin du glissement électoral tant redouté.

Le dialogue politique en soi n’est pas mauvais. Mais il comporte de nombreuses incertitudes qui risquent d’être fatales pour la jeune démocratie congolaise.

Le découpage territorial tel que conçu par le gouvernement ayant montré clairement ses limites, la réflexion devait être orientée vers le réaménagement du calendrier électoral et non un dialogue politique qui compliquerait davantage la donne.

La classe politique, la CENI et toutes les parties impliquées dans le processus doivent se retrouver autour d’une table pour juger une relecture du calendrier électoral global. C’est cela le dialogue tant attendu. Tout autre format que celui-là ne ferait que replonger la RDC dans une crise dont elle aura du mal à se défaire.

Au-delà de toutes ces considérations, il y a une donne à ne pas marginaliser. C’est le poids du peuple et de la communauté internationale, dont principalement les Etats-Unis, dans le problème congolais. Tout calcul qui est fait au détriment de ces deux pôles a toutes les chances d’échouer. Malheureusement, le dialogue politique tant convoité s’inscrit dans cette démarche.

LE POTENTIEL

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