Equation évacuation FDLR
Il est difficile de définir la nature réelle des rapports tissés entre la RDC et l’ONU quant à la mission à accomplir et le rôle à jouer par la MONUSCO sous les auspices du conseil de sécurité et du secrétariat général ? Ces rapports seraient-ils de coopération entre Kinshasa et New York ou de tutelle tacite exercée sur la RDC par la communauté internationale, par le truchement de la MONUSCO ? La première hypothèse est à écarter, car les deux partenaires ne semblent pas traiter d’égal à égal et on les voit de temps en temps se brouiller fâcheusement.
La seconde hypothèse paraît l’emporter, étant donné que le conseil de sécurité et le secrétaire général de l’ONU agissent et décident comme ils l’entendent, parfois contre le gré et les récriminations de Kinshasa.
La reconduction du mandat de la MONUC jusqu’à ce qu’elle est devenue la MONUSCO, a toujours été arbitraire en dépit des réactions défavorables des officiels congolais. Quand Kinshasa demande la réduction des effectifs des casques bleus de la MONUSCO, on lui répond vertement que l’ONU ne voudrait pas abandonner un pays aussi fragile, en proie à l’insécurité et à la merci de multiples forces négatives, et où l’autorité de l’Etat peine à s’affirmer et à se faire sentir sur l’ensemble du territoire national.
L’équation de l’évacuation des rebelles des FDLR de l’Est du pays où ils ont pris pied voilà une vingtaine d’années, dévoile encore une fois de plus le caractère ambigu voire conflictuel des rapports entre la RDC et l’ONU. Contrairement aux opérations de liquidation des rebelles du M23 alors logés à la même enseigne que ceux des FDLR, qui étaient menées conjointement d’un commun accord par les FARDC et les troupes spéciales de l’ONU à la disposition de la MONUSCO, il en est tout autrement concernant la traque des maquisards des FDLR.
L’Etat congolais a pris seul ses opérations sous son bonnet, tenant en quelque sorte l’ONU à l’écart. Le secrétariat général de l’ONU suspecte cette initiative et reproche aux dirigeants congolais d’avoir confié la responsabilité de ces opérations à des généraux impliqués dans des violations des droits de l’homme dans les rapports de ses experts. New York somme Kinshasa de retirer ces généraux du commandement des opérations contre les FDLR/ Kinshasa persiste et signe qu’il n’en est pas question, se drapant sans sa souveraineté d’Etat indépendant jouissant de tous ses attributs de pouvoir. L’ONU ne l’entend de cette oreille et réitère invariablement sa sommation.
Une tutelle implicite camouflée
Jusqu’où et comment vont en finir les deux partenaires avec cette brouille dangereuse qui vient de s’établir entre eux, chacun campant sur ses positions ? Il est difficile de répondre maintenant à cette question qui ressemble à celle d’un duel du pot de terre contre le pot de fer.
Ce n’est pas la première fois que Kinshasa déclare qu’il n’a pas d’injonctions à recevoir des puissances occidentales, ce qui sous entend aussi la communauté internationale dont l’ONU est l’incarnation. La demande impérative de disqualification des généraux des FARDC chargés du commandement des opérations de liquidation des FDLR est considérée par Kinshasa comme un ultimatum inacceptable.
L’ONU revient toujours inlassablement à la charge et insiste » pas ces officiers » aux commandes des opérations contre les FDLR ! Comment peut-on raisonnablement s’expliquer cette démarche ferme et constante de l’ONU sans songer à une tutelle implicite camouflée sous la présence de la MONUSCO ? Sans le concours des troupes onusiennes, les opérations pourraient se révéler hypothétiques ou trop risquées à certains égards. La divergence de vues entre les deux » partenaires « n sur la désignation des officiers au commandement des hommes de troupe mobilisés pour la traque des FDLR pourrait éventuellement plomber les opérations et, à la limite, les rendre contre- productives, ce dont Kinshasa n’aurait certainement pas se venter.
Des signes prémonitoires du crépuscule
Les observateurs s’interrogent sur la solidité des reins de l’establishment congolais de venir à bout de la répulsion qu’éprouvent déjà à son égard ses partenaires internes politiques, sociaux, confessionnels et externes de l’ONU et des puissances occidentales qu’il se met étrangement à dos sans sembler en mesurer toutes les conséquences pourtant prévisibles. Les vapeurs enivrantes du pouvoir et les délices émoustillants qui s’ensuivent étourdissent et aveuglent au point de ne pas se rendre compte que la résultante est le naufrage fatal du navire corps et biens.
C’est un destin irrévocablement scellé d’un règne devenu chancelant, et qu’on ne saurait contrarier ni contourner. Le jour et l’heure ne seraient plus lointains pour récolter ce qu’on a semé. Les signes prémonitoires du crépuscule sont à présent discernables à l’horizon. Des défections et des reniements observés au sein même de la plateforme au pouvoir ne sont pas de bon augure. On remarque que les rats commencent à quitter le navire.
Il ne reste plus que de vils et serviles adulateurs qui fantasment, font illusion et tentent vainement de faire accroire qu’ils ont toujours la situation en main. Ce sont les derniers soubresauts qui précèdent une catastrophe imminente et dévastatrice.
Par Jean N’saka wa N’saka/ Journaliste indépendant