RDC : FDLR, élections et M23 à Addis-Abeba

Lundi 2 février 2015 - 12:47

Invité de marque au Sommet de l’Union Africaine tenu à Addis-Abeba qui a clos ses travaux le samedi 31janvier 2015, le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki-moon, a surpris beaucoup de monde en décidant de présider personnellement, en marge de cette rencontre, une réunion d’évaluation de l’Accord-cadre signé en février 2013 par la RDC et plusieurs Etats membres de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL). On a noté Ia participation du Commissaire à la Paix et à la Sécurité de l’Union Africaine, du président de Tanzanie, des représentants des Etats signataires dudit document, du Vice-président d’Angola et naturellement du ministre des Affaires Etrangères de la RDCongo.

Le Rwanda attend les résultats

Le Rwanda n’a pas jugé opportun d’y prendre part, en dépit de la présence à Addis-Abeba du président Paul Kagame et de sa ministre des Affaires Etrangères, Louise Mushikiwabo. Pour le pouvoir de Kigali, le temps des discours et sommets est largement révolu. L’heure doit être aux résultats concrets, à obtenir sur le terrain. Mais cette absence fort remarquée a fait tiquer nombre d’observateurs, d’autant qu’au menu de la rencontre figurait l’éternel dossier des FDLR (Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda), dont le nouveau feuilleton de traque a été ouvert le jeudi 29 janvier 2015 par les FARDC, avec l’appui logistique de la Monusco (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation du Congo). D’aucuns pensent que Kigali a préféré se mettre à l’écart pour se donner l’opportunité de récupérer, le moment venu, les dividendes éventuels d’un double échec congolais et onusien face aux FDLR. Ce qui lui permettrait d’exhumer son fond dé commerce, à savoir le droit de poursuite de ces rebelles en territoire congolais en vue de sécuriser ses frontières.

Tout en saluant les opérations militaires lancées par l’armée congolaise contre les rebelles rwandais réfractaires à l’ultimatum de la CIRGL qui a expiré le 02 janvier 2015, Ban Ki-moon a exprimé une vive inquiétude au sujet des dérapages collatéraux dont pourraient être victimes des populations civiles, comme c’était déjà le cas en 2009, à l’occasion des opérations militaires mixtes congolo-rwandaises contre la même force négative. A l’époque, différents rapports des Nations Unies et d’ong internationales avaient épinglé des massacres des civils ainsi que des exactions, viols, tortures, etc.

Quant aux ministres sud-africain et tanzanien des Affaires Etrangères, dont les troupes constituent l’essentiel du contingent de 3.000 militaires de la Brigade Internationale, ils ont émis beaucoup de réserve quant à la réussite des opérations de traque des FDLR, en raison de la totale intégration de ces rebelles au sein des communautés autochtones congolaises, de la complexité et de l’étendue de la «zone » à nettoyer.
L’Afrique du Sud craint particulièrement que ce ne soit pas une promenade de santé à travers le Parc de Virunga, ce qui pourrait avoir un impact fort négatif dans l’opinion publique sud-africaine et gêner les dirigeants au pouvoir dans les rendez-vous électoraux à venir.

Elections : respecter la volonté du peuple

L’autre surprise créée par Ban Ki-moon au sein de l’opinion africaine était son appel au respect de la volonté du peuple dans tous les Etats de la région des Grands Lacs devant organiser des élections cette année ainsi que dans les années à venir. Les analystes politiques ont perçu dans son message le refus de voir des hommes au pouvoir chercher à s’y accrocher à travers des modifications des Constitutions ou des lois électorales.

S’agissant singulièrement du cas de la République Démocratique du Congo, le Secrétaire général des Nations Unies s’est réjoui du dénouement heureux de la crise politico-sociale créée par un article de la nouvelle loi électorale, en dépit des victimes provoquées par les manifestations populaires destinées à dire non à toute modification de la Constitution et à tout prolongement du mandat du Chef de l’Etat actuel.

L’allusion du numéro un onusien aux processus électoraux dans la région des Grands Lacs a fait dire à certains que la situation politique de ces pays en général et de la RDC en particulier est devenue l’affaire de la communauté internationale. Et que les dirigeants africains qui feraient une mauvaise lecture des signes du temps risquent de connaître des fins de mandats très difficiles.

M23 : Kinshasa interpellé

A en croire les échos en provenance d’Addis-Abeba, la majorité des participants à la réunion pilotée par Ban Ki-moon ont fait au gouvernement congolais le reproche de n’avoir pas facilité les formalités d’amnistie et de rapatriement des combattants de l’ex-Mouvement du 23 mars. Une année après la signature séparée des déclarations de Naïrobi ayant consacré la renonciation de ces rebelles congolo-rwandais à la lutte armée, ont-ils noté, très peu d’avancées ont été enregistré au chapitre des actions.

Entre-temps, le représentant de l’Ouganda à Addis-Abeba a laissé entendre que son pays était fatigué d’héberger.les ex-rebelles du M23 ayant trouvé asile sur leur territoire. Un tel constat tendant à rendre le pouvoir de Kinshasa responsable de l’errance de cette force négative est dangereux car de nature à pousser les belliqueux voisins ougandais et rwandais à les instrumentaliser pour de nouvelles actions de déstabilisation de la RDC.

Il est à espérer qu’à Kinshasa, on a pris la pleine mesure de l’activisme de Ban Ki-moon dans les dossiers politique et sécuritaire national. Tout faux pas est interdit dans la gestion de l’agenda caché de la communauté internationale par ces temps où les Africains n’ont plus totalement leur destin entre leurs mains. Le printemps arabe, la crise centrafricaine et le tsunami burkinabè ont démontré que le sort du continent en décidé ailleurs.
Kimp

 

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