L’opposition appelle à ne pas se laisser distraire !
La statue d’un homme politique congolais assassiné en 1993 a été mutilée dans la nuit de vendredi à samedi à Beni, dans l’Est de la République démocratique du Congo, moins d’une semaine après la destruction d’une autre à la gloire du président Joseph Kabila, a-t-on appris auprès de témoins.
Le monument érigé au centre d’un rond-point en mémoire d’Enoch Nyamwisi Muvingi a été découvert samedi matin toujours dressé mais amputé de ses deux bras et décapité, ont indiqué sous le couvert de l’anonymat quatre témoins joints par téléphone de Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu.
La région de Beni, carrefour commercial important du nord du Nord-Kivu, a été ensanglantée depuis la mi-octobre par une succession de massacres commis par les rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF) et ayant coûté la vie à plus d’une centaine de personnes.
Alors que l’armée et les autorités sont accusées de ne rien faire pour protéger la population locale, le président Kabila s’était rendu à Beni du 29 au 31 octobre. Il y avait affirmé que « le Congo (allait) gagner contre les terroristes » mais sa présence n’avait pas empêché un nouveau massacre dans la région.
Le 2 novembre, après son départ et un nouveau carnage à Beni même, une foule en colère avait déboulonné la statue du « rond-point Kabila » et brûlé des drapeaux de la Majorité présidentielle, la coalition qui soutient le chef de l’Etat.
Personnage influent de la communauté Nande, dont Beni est le fief, Enoch Nyamwisi Muvingi, avait été assassiné par le pouvoir finissant du dictateur Mobutu Sese Seko, chassé du pouvoir en 1997 par Laurent-Désiré Kabila, père de l’actuel président.
Enoch Nyamwisi était le frère aîné d’Antipas Mbusa Nyamwisi, ancien chef rebelle soutenu par l’Ouganda et rallié à Joseph Kabila à la fin de la deuxième guerre du Congo (1998-2003).
Plusieurs fois ministre de M. Kabila, M. Mbusa Nyamwisi, actuellement en exil en Afrique du Sud, s’était présenté contre lui à la présidentielle (contestée) de 2011. Fin octobre, il avait accusé, au micro de la radio française RFI, un général proche de M. Kabila de « complicité » avec les rebelles de l’ADF, présents dans la région de Beni depuis 1995.
L’Est de la RDC, où pullulent encore des dizaines de groupes armés congolais et étrangers, est déchiré depuis plus de vingt ans par des conflits alimentés par des divisions ethniques, des querelles foncières et la volonté d’en contrôler les abondantes richesses naturelles.
Par Julie Muadi