José Ramos-Horta, ancien président du Timor oriental, va tenter d'obtenir davantage des pays donateurs - soldats et argent. En 15 ans, les Casques bleus sont passés de 20.000 à 130.000.
Face aux dizaines de Casques bleus tués dans des attaques au Mali ou enlevés sur le plateau du Golan, l'ONU a recruté un prix Nobel pour revoir le concept de ses opérations de maintien de la paix.
Rarement les Casques bleus onusiens ont été autant la cible d'attaques, alors que le monde est embourbé dans un nombre record de crises. Face à cette situation, le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a fait appel au prix Nobel de la paix José Ramos-Horta pour prendre la tête d'un groupe d'experts chargé de repenser, pour la première fois en 15 ans, les opérations de maintien de la paix.
Cet ancien président du Timor oriental s'est mis au travail dès cette semaine. Avec son groupe d'experts, il va tenter de définir les moyens d'améliorer ces opérations à travers la planète et d'obtenir des donateurs --de soldats et d'argent-- qu'ils renforcent encore davantage leur soutien.
La situation des opérations de maintien de la paix dans son ensemble a énormément changé, pour le pire sous certains aspects", explique José Ramos-Horta depuis le siège des Nations unies à New York.
Dans les conflits qui rongent le monde, le nombre de groupes armés voyous explose, les institutions étatiques s'effondrent et pendant ce temps les Etats membres pressent l'ONU de réduire les coûts des missions, regrette-t-il.
Les Nations unies sont devenues le bouc émissaire de l'incapacité collective de la communauté internationale à anticiper les nouveaux défis complexes qui n'étaient pas là il y a 15 ans", dit-il.
Pour la première fois en leurs 66 ans d'histoire, les opérations de maintien de la paix de l'ONU ont vu leur budget grimper à plus de huit milliards de dollars tandis que le nombre de soldats servant sous la bannière des Nations unies a atteint un record de 130.000 hommes - contre 20.000 il y a 15 ans.
Sur les 16 missions actuelles, huit sont en Afrique, dont la plus grosse en République démocratique du Congo (RDC), forte de 20.000 hommes. José Ramos-Horta indique que le groupe d'experts va essayer de convaincre des puissances émergentes --comme la Chine, le Brésil, l'Inde, la Turquie ou l'Egypte-- d'apporter une plus grande contribution, que ce soit en termes financiers, logistiques ou d'apport de soldats.
Pas de substitut aux missions
Les 15 membres du panel examineront également le déséquilibre entre les pays riches qui financent les opérations de maintien de la paix - Etats-Unis, Japon, France - et ceux, plus pauvres, qui contribuent en effectifs tels que le Bangladesh, le Pakistan et l'Inde.
Il faut comprendre la fatigue, le fardeau reposant sur les épaules des donateurs traditionnels", souligne le prix Nobel de la Paix, qui espère "ranimer le soutien pour l'ONU".
Cette année, les Philippines ont retiré leur contingent stationné sur le plateau du Golan dans le cadre de la Force de surveillance du cessez-le-feu (Fnuod), à la suite d'affrontements avec des rebelles syriens et de la prise en otages de Casques bleus fidjiens. Dans le nord du Mali, une série d'attaques violentes ont fait 31 morts parmi les Casques bleus depuis que la mission a été déployée en juillet 2013.
Les Casques bleus sont déjà passés d'un rôle de surveillance des lignes de cessez-le-feu à celui de "guerriers-gardiens de la paix", qui inquiète certains pays contributeurs en hommes. Le groupe d'experts prévoit ainsi de se rendre dans ces pays pour écouter leurs revendications ainsi qu'au quartier général de l'Otan à Bruxelles pour tenter de convaincre l'Alliance d'aider à renforcer les opérations de l'ONU.
Les membres du panel discuteront également avec l'Union africaine et la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour voir comment les pays africains, dont beaucoup de soldats sont faiblement entraînés ou accusés de violations des droits de l'homme, peuvent prendre part à cette révision.
Elle sera présentée à l'Assemblée générale de l'ONU lors de son grand rendez-vous en septembre prochain et au Conseil de sécurité. Selon José Ramos-Horta, "il n'existe pas de substitut aux missions de maintien de la paix (...) personne n'a encore proposé de meilleur concept".