Dans un communiqué déposé hier lundi 11 janvier 2015 à notre rédaction et portant la signature de son président, Corneille Nangaa, la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante) fait état de la récente saisie de 22 fausses cartes d’électeurs sur des réfugiés burundais cantonnés au camp de Lusenda, dans le territoire d’Uvira, dans la province du Nord-Kivu. Ces cartes d’électeurs, précise-t-on, ont été imprimées en dehors du circuit officiel. Les autres observations faites par la CENI concernent le scannage des photos de leurs détenteurs alors qu’elles auraient dû être « capturées » dans un centre d’inscription d’électeurs, les fausses signatures car non-conformes aux spécimens de celles des responsables des centres d’inscription, le caractère erroné des codes leur attribués, les identités douteuses des porteurs, etc.
Cette institution d’appui à la démocratie en appelle à la justice afin qu’elle se saisisse de ces cas de fraude et qu’elle fasse subir aux faussaires la rigueur de la loi, notamment l’article 45 de la loi portant identification et enrôlement des électeurs qui stipule : « toute personne qui se fait inscrire frauduleusement sur une liste sera punie pour faux en écriture, conformément au Code pénal congolais ».
Le fichier électoral plus que jamais pollué
Cette énième alerte de la Ceni ne fait que confirmer la pollution du fichier électoral. A propos de fausses cartes d’électeurs, il y a lieu de souligner qu’elles sont en circulation à travers l’ensemble du territoire national depuis les élections de 2006. Elles ont refait surface en 2011.
Leurs foyers de prédilection se trouvent être le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, où l’insécurité est récurrente et où les vols des kits électoraux par des membres des forces négatives, aussi bien congolaises qu’étrangères, sont monnaie courante.
Depuis la fin du processus électoral controversé de 2011, les officines spécialisées dans la fabrication de vraies-fausses cartes d’électeurs sont opérationnelles, aussi bien en territoire congolais qu’en Ouganda et au Rwanda. En RDC même, il a été démontré, plus d’une fois, que d’anciens cadres et agents impayés ou renvoyés de la CENI gardent, par devers eux, des kits électoraux à même de leur permettre de produire et délivrer de fausses cartes d’électeurs. C’est pareil pour les animateurs de plusieurs mouvements rebelles congolais en exil en terres ougandaise, rwandaise et burundaise. Bref, les « laboratoires » de fabrication de cartes d’électeurs sont si nombreux qu’ils sont en mesure d’inonder non seulement l’Est du pays mais aussi le Nord, le Centre, le Sud et l’Ouest.
Ainsi donc, on peut considérer que le fichier électoral a complètement implosé. Car on y retrouve pêle-mêle des millions de morts, de doublons, d’éléments en uniforme, d’électeurs non congolais, de fictifs, de mineurs d’âge, etc. Par ailleurs, des millions de nouveaux majeurs manquent à l’appel. Bref, au lieu d’un toilettage des listes électorales, la CENI devrait, si un consensus est dégagé autour du calendrier électoral et des fonds conséquents sont libérés en sa faveur par le gouvernement, prioriser de nouvelles opérations d’enrôlement de tous les Congolais et Congolaises en âge de voter.
Si une actualisation globale n’est pas opérée, les Congolais et Congolaises risquent d’aller aux urnes, le moment venu, en compagnie de millions de faux électeurs.
Vérité des urnes impossible
Au stade actuel où les kits électoraux se trouvent en libre circulation dans plusieurs coins du territoire national ainsi que dans des pays voisins, la Ceni se trouve dans l’incapacité d’organiser des élections réellement libres, démocratiques et transparentes, à tous les niveaux de scrutins. Par conséquent, aucune vérité des urnes ne peut être obtenue ni pour les élections locales, ni pour les provinciales, ni pour celle des gouverneurs et sénateurs, encore moins pour les législatives nationales et la présidentielle.
Il y a tellement de faussaires au sein du corps électoral qu’un sérieux nettoyage des écuries s’impose. Comme dit plus haut, les listes électorales actuellement disponibles sont à jeter dans la poubelle, au profit de nouvelles listes actualisées. Afin d’éviter le piratage des cartes d’électeurs présentement en circulation, il y a lieu de commander de nouveaux kits électoraux, capables de produire de nouveaux spécimen de cartes d’électeurs. La Ceni a intérêt, pour sa crédibilité, à s’investir dans la protection des documents qui devraient décider du sort des hommes et de femmes appelés à solliciter, dans un délai à la fois proche et lointain, les suffrages des électeurs.
Kimp