La RDC sous la menace de « Turquoise »/bis

Mercredi 29 avril 2015 - 09:31

Plusieurs milliers de réfugiés burundais, auxquels se sont mêlés des citoyens congolais, sont signalés, depuis le dernier week-end, dans plusieurs localités du Sud-Kivu, avec en tête de liste Uvira. Ils fuient naturellement la grande insécurité qui prévaut dans leur pays a la suite des bavures policières (tueries, tortures, .arrestations arbitraires) lors des manifestations populaires provoquées par la décision du président Nkurunziza de briguer un troisième mandat, en violation de la Constitution.
Par routes ou à travers des embarcations de fortune lancées sur les lacs Kivu et Tanganyika, des milliers de civils difficiles à bloquer et à contrôler sont en train de traverser, chaque jour et chaque nuit, la frontière congolaises. En dépit des efforts déployés par les administrations locales et le HCR (Haut Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés) en vue des surveiller le flux des réfugiés au niveau des points de passage traditionnels, leur nombre élevé et la porosité de la frontière commune ne facilitent pas les choses.

Au rythme où de nombreux Burundais se déversent dans le Sud-Kivu, la RDC risque d’être dépassée à plus ou moins court terme et de connaître une nouvelle opération « Turquoise », laquelle avait permis, en 1994, sous le couvert de la France et de la Communauté internationale, mais avec la bénédiction du gouvernement de l’ex-Zaïre, à près d’un million de réfugiés Rwandais, de s’installer à travers plusieurs camps d’accueil du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, avant de gagner plus tard des villes et villages de ces deux provinces.

On rappelle qu’aux vrais réfugiés s’étaient mêlés des éléments de l’ex-armée de feu le président Habyarimana ainsi que des miliciens génocidaires Hutu, qui avaient traversé la frontière avec armes et bagages.

Banyamulenge et FDLR

Distraites à souhait, les autorités civiles et militaires de l’ex-Zaïre n’avaient pas pris soin d’enregistrer et d’identifier clairement des centaines de milliers d’étrangers venus du Rwanda, pour savoir qui étaient qui avant de traverser la frontière. Ce grave manquement dans le contrôle des réfugiés a finalement coûté cher à la République, qui s’est retrouvée quelques années plus tard avec deux épines sous les pieds.
D’une part, l’on a assisté à la naissance d’une nouvelle tribu dans l’ex-Zaïre, à savoir les Banyamulenge, dont la montée en puissance s’est traduite par le déclenchement de plusieurs guerres et rébellions, de 1996 jusqu’à nos jours. Désormais, la RDC a l’obligation de protéger cette minorité chère au Rwanda dans la nomenclature de ses lois et règlements.

D’autre part, le grand Congo continue de traîner, comme un boulet, les FDLR (Forces Démocratiques pour là Libération du Rwanda), ces indécrottables rebelles appelés à regagner le Rwanda à travers nombre d’accords, dont celui d’Addis-Abeba signé en février 2013 par la RDC et plusieurs pays membrés de la CIRGL (Conférence Internationale pour la Région de Grands Lacs) et plusieurs résolutions des Nations Unies. En dépit des ultimatums de la CIRGL et du Conseil de Sécurité les invitant à cesser toute activité militaire en territoire congolais et de la traque déclenchée dernièrement contre eux par les FARDC dans le cadre de l’opération « Sukola II », ils refusent visiblement de « mourir ».

Si la RDC échoue une fois de plus dans la gestion des réfugiés burundais, comme ce fut le cas avec leurs voisins rwandais en 1994, il y a lieu de craindre l’émergence d’une énième tribu ou ethnie minoritaire à protéger absolument à travers l’arsenal juridique en vigueur mais aussi l’ouverture d’un nouveau front militaire avec des réfugiés armés qui pourraient transformer le Sud-Kivu en base arrière pour des actions futures de déstabilisation du pouvoir au Burundi. Kinshasa doit ainsi ouvrir l’œil et le bon et ne pas laisser au HCR seul la tâche d’identification et de cantonnement de ces étrangers de tous les dangers. Il est curieux que les réfugiés burundais aient choisi d’envahir le territoire congolais en cette année où s’entrechoquent élections et installations de nouvelles provinces. Des ingrédients d’un glissement électoral, avec des cas de force majeure, semble réunis.

Si la Communauté internationale interpellait Nkurunziza …

Face à la situation humanitaire catastrophique qui s’annonce à l’Est de la RDC, la communauté internationale devrait réagir en interpellant le président Nkurunziza, afin qu’il puisse faire cesser les violences policières qui viennent de jeter des milliers de ses concitoyens sur le chemin de l’exil. Il n’est pas normal que la RDC tombe victime de ‘la pagaille que sèment dans, leur pays les hommes’ au pouvoir à Bujumbura, dont l’effet immédiat est le retour de l’insécurité dans plusieurs villes et villages congolais.

En ce troisième millénaire où les grandes puissances de la planète semblent avoir décidé de barrer la route aux présidents à vie en Afrique, la RDC a besoin de cohabiter avec des voisins aux régimes démocratiques, pendant qu’elle- même fait l’effort de ne pas déraper de la voie de la démocratie.

Par Kimp

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