La question a été posée dans ces colonnes : « La guerre contre les Cathos, jusqu’où ? ». Une première réponse, on le sait, avait été donnée à travers des attaques orchestrées contre l’Eglise, ses Evêques et même le Pape, par des personnes connues comme des intellectuels mais qui n’ont du débat démocratique qu’une vision caricaturale.
Après la tentative manquée d’une certaine jeunesse d’embrigader le représentant du Saint-Siège dans le débat sur la révision constitutionnelle il y a quelques jours dans la capitale congolaise, l’acte trois de la riposte contre l’Eglise catholique vient de démarrer à l’intérieur où quelques jeunes présentés comme des fidèles catholiques ont perturbé deux messes à Lodja au motif que les prêtres ont donné lecture de la lettre des Evêques « Sauvons la Nation ».
Les événements de Lodja rappellent aux fidèles catholiques de Kinshasa les événements du 16 février 2012. Ce jour-là, on s’en souvient, les catholiques avaient décidé de commémorer le dixième anniversaire du massacre des chrétiens le 16 février 1992. L’émotion suscitée dans le pays et à travers le monde à la suite des tueries perpétrées par des « hiboux » et autres mercenaires étrangers venus à la rescousse du régime, avait non seulement obligé le Maréchal à rouvrir les portes du Palais du Peuple pour laisser siéger la Conférence Nationale Souveraine, tout en sonnant le glas pour son régime.
Pour commémorer les dix ans de ce massacre, les chrétiens catholiques s’étaient donc retrouvés dans leurs églises respectives. Mais alors qu’ils adressaient leurs prières au Seigneur pour qu’il assiste la République Démocratique du Congo, ils ont eu subitement la surprise de voir des gros bras communément appelés « pombas » ou « kulunas » surgir dans les églises pour brutaliser les officiants et blesser les fidèles. C’est bien plus tard que l’on comprendra le sens de cette manif très particulière. Les églises étaient profanées parce que certaines officines avaient reçu des informations erronées comme d’habitude. Selon ces informations, les catholiques allaient, après les différentes messes, déferler dans les rues comme ils le firent le 16 février 1992 pour, cette fois, contester les résultats des élections de 2011 !
Deux ans et demi après ce vilain coup, deux messes sont perturbées à l’intérieur du pays. Il est instructif de constater que la perturbation est annoncée comme un triomphe, une sorte de victoire des révisionnistes sur les anti-révisionnistes. Bien qu’il s’agisse là d’éléments instructifs pour tout investigateur avisé, nous ne pouvons manquer de nous interroger sur les motivations de ceux qui se cachent derrière les perturbateurs. Est-il raisonnable qu’ils continuent de penser que les Catholiques constamment violentés continueront à se laisser faire, sans songer à réagir un jour ? Est-il normal qu’on laisse en paix des pasteurs qui prêchent à longueur des journées le changement de constitution et qu’on applaudisse des actes de vandalisme contre l’Eglise catholique, ses prêtres et ses Evêques ?
Il y a une semaine, lorsqu’on a vu défiler les images de la manif qui se rendait à la représentation du Saint-Siège à Kinshasa, on s’était rendu compte que la majorité des manifestants n’étaient pas des catholiques. On a reconnu des pasteurs des églises du réveil, des mulmans et autres personnes n’ayant rien à voir avec la foi catholique. Officiellement, tous ces individus étaient présentés comme des chrétiens catholiques révoltés par la position des Evêques sur la question constitutionnelle.
Quand on connaît le système, on ne peut être surpris par l’application à l’intérieur du pays des stratégies qui ont fait flop dans la capitale où tout le monde peut voir et s’exprimer. Les pratiques sont déshonorantes mais elles restent, semble-t-il, l’unique bouée de sauvetage pour ceux qui militent pour le passage en force.
L.P.