Lâchée par le Vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur lui-même lors de sa première rencontre, le 25 mars 2015, avec les délégués du BCNUDH (Bureau Conjoint des Nations Unies pour les Droits de l’Homme), de Human Rights Watch et de plusieurs organisations congolaises de la Société Civile et de défense des droits de l’homme, l’hypothèse de l’exhumation des 421 corps d’indigents, personnes abandonnées, inconnus, nouveau-nés et fœtus morts enterrés dans une fosse commune à Maluku fait problème. Considérée comme facultative par les autorités politiques congolaises, elle est en train d’être érigée en exigence par plusieurs partenaires extérieurs de la RDC et organismes internationaux.
Pas plus tard qu’il y a quarante huit heures lors du point de presse hebdomadaire de la Monusco, son porte-parole civile a fait savoir que l’exhumation des corps inhumés collectivement le 19 mars 2015 au cimetière «Fula-fula » de Maluku était, pour les Nations-Unies, la condition sine qua non devant concourir à l’éclatement de la vérité. Les observateurs
se demandent, au regard d’un tel préalable, jusques à quand les autorités congolaises vont continuer à y faire la sourde oreille. Vont-elles ignorer les douces pressions internationales et considérer que les conclusions de l’enquête judiciaire confiée au Procureur près le parquet de Kinkole marqueraient la fin de ce feuilleton?
Sans exhumation … doute éternel
L’on perçoit, au sein de la communauté internationale et d’une importante frange de la classe politique et de la société civile congolaises, un net refus de croire à une volonté de recherche de la vérité chez les autorités, tant que la porte restera fermée à toute possibilité d’exhumation des corps, avec la participation d’experts extérieurs et la présence de témoins non étatiques. Le gouvernement congolais a beau parler de la sanctuarisation du site, de la conduite de l’enquête par un magistrat chevronné de la place de Kinshasa, de la disponibilité des listes des morts à la morgue centrale de l’Hôpital Général de Référence de Kinshasa, de l’authenticité de leurs certifications de décès et d’inhumation, de leur enterrement par l’administration urbaine dans le respect des normes hygiéniques, le fossé du scepticisme ne fait que s’élargir.
Même si les décideurs politiques congolais sont animés du souci de ne rien cacher, le fait de donner l’impression de se boucher les oreilles face à la revendication relative à l’exhumation sonne faux, d’autant que cela est justifié par l’impératif du respect de la souveraineté nationale. Certains analystes politiques estiment que la banalisation de toute contribution financière ou expertise extérieure n’est pas la bonne voie pour convaincre ceux qui pensent que « tombe » ou « fosse » commune, quelque chose d’anormal serait passée au cimetière Fula-Fula de Maluku dans la nuit du 19 mars 2015.
Des extrapolations pourraient même amener des compatriotes et des étrangers à soupçonner l’existence effective d’une fosse commune non seulement à Maluku mais aussi dans d’autres lieux d’inhumation de Kinshasa, d’autant que l’énigme des 524 corps inhumés collectivement et par trois vagues par l’Hôtel de ville de Kinshasa l’année dernière reste entière. L’on se demande, finalement, pourquoi la RDC, qui avait accepté la participation d’experts étrangers, venus des Pays-Bas, à l’autopsie de la dépouille mortelle de Floribert Chebeya, ancien patron de l’Ong Voix des Sans Voix mort dans le cachot de l’Inspection provinciale de la police, fait-elle penser qu’elle redouterait subitement l’exhumation des 421 corps qui posent problème dans le dossier de la fosse commune de Maluku ? C’est le lieu de souligner que ce n’est pas par des points de presse, des visites de la morgue de l’ex-Mama Yemo et des débats parlementaires que Kinshasa arrivera à évacuer les doutes qui sont en train de s’installer dans les esprits des partenaires extérieurs.
Par Kimp