Mais les Congolais qu’il a consultés tiennent au respect du délai constitutionnel
Voici aujourd’hui plus de deux mois que le chef de l’Etat, Joseph Kabila, a personnellement saisi quelques partis politiques phares de l’Opposition pour leur demander de se joindre à lui, autour d’une table, en vue de trouver des solutions à la crise qui ronge la République démocratique du Congo, question d’organiser des élections apaisées.
Après cette démarche, l’initiateur de ce dialogue a consulté la classe politique, la société civile, les religieux, les journalistes, les chefs coutumiers ainsi que les étudiants pour baliser le chemin des pourparlers.
De manière générale, les Congolais consultés n’ont juré que sur le respect du délai constitutionnel pour les prochaines élections, outre les inquiétudes concernant l’objet à débattre dans ce dialogue. C’est la principale substance qui a été vidée bien avant le rendez-vous. Néanmoins, une frange importante de l’Opposition s’est inscrite en faux contre cette démarche, estimant qu’il s’agit d’un stratagème pour obtenir le glissement et demeurer au pouvoir au-delà de 2016.
Une nouvelle transition ?
Cette lecture a pris forme, quelques jours plus tard, lorsqu’un des leaders du Kongo-Central, supposé farouche opposant au régime en place, a brusquement tourné casaque pour débiter des propos incendiaires contre la démocratie en République démocratique du Congo.
Pour lui, une nouvelle transition de trois ans serait la bienvenue, question d’organiser de bonnes élections. Il a été fortement appuyé par plusieurs ténors de la Majorité présidentielle, lors des débats télévisés sur la situation générale du pays.
A l’opinion de se demander, si, en cinq ans, ces scrutins ne sont pas organisés, comment cela sera-t-il possible en trois ans?
Aujourd’hui, la question cruciale du découpage territorial vient d’être réglée sans le dialogue. La RD Congo est passée de 11 à 26 provinces, avec toutes les conséquences qui en découlent tant sur le plan administratif, économique, financier que politique.
Le go est donné, sans le dialogue, pour l’élection des gouverneurs des provinces découpées. Les futurs députés provinciaux ont déjà déposé leurs candidatures, sans le dialogue, aux Bureaux de Traitement des Candidatures (BTRC) de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI).
Le Parti lumumbiste unifié d’Antoine Gizenga récolte des fonds pour soutenir ses candidats à tous les niveaux. La CENI vient de trouver la solution à l’enrôlement des nouveaux majeurs, sans pour autant qu’il y ait dialogue. C’est en janvier 2016 qu’ils seront enregistrés, à en croire le porte-parole de cette institution chargée d’organiser les élections.
Ainsi donc, désormais sans objet, le dialogue perd toute sa substance.
Les yeux de tous les Congolais sont braqués vers la date du 27 novembre 2016. Tous ceux qui se sont compromis pendant la période des consultations connaitront leur sort à travers les urnes. Cela a, d’ailleurs, aidé le peuple congolais à distinguer le bon grain de l’ivraie, à 16 mois de la présidentielle et des législatives nationales.
En plus, pour l’instant, ce dialogue n’est plus d’actualité dans les microcosmes politiques. C’est dépassé. Lors de son tout dernier point de presse organisé à Kinshasa, le porte-parole du gouvernement n’a plus confirmé comme auparavant, ni infirmé la tenue de ce rendez-vous.
Il a nuancé en disant, » une fois les consultations terminées, le chef de l’Etat appréciera les recommandations des uns et des autres, et décidera, seul, s’il y aura dialogue « .
Aussi, il faut noter les appels incessants de la communauté internationale sur le respect de la Constitution dans les pays africains dont les dirigeants sont fin mandats.
Le n°1 de Human Rights Watch, l’ambassadeur de France en RDC, Barack Obama… ont multiplié des déclarations dans le sens de se limiter à deux mandats, en vue d’une alternance, ce qui occasionnera le décollage du continent africain, à en croire le président des Etats-Unis lors de son discours à l’Union africaine.
5 millions de dollars gaspillés
Du 7 septembre 2013 au 5 octobre 2013, la République démocratique du Congo a perdu inutilement plus de 5 millions $US pour organiser des » concertations » dites nationales pour réconcilier tous les Congolais et faire face à la situation à l’Est. Malheureusement, ce conclave a davantage divisé la classe politique. Ses principales recommandations, notamment la libération des prisonniers politiques injustement détenus dans des prisons, n’ont jamais été exécutées.
L’amnistie a plutôt fait la part belle aux rebelles du M23, qui ont pourtant fait couler le sang de milliers de Congolais. Au lieu de gaspiller l’argent du contribuable congolais par des initiatives sans lendemain, il serait mieux de mettre cette enveloppe à la disposition de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), quitte à elle de l’affecter à l’organisation d’un scrutin.
Par Lefils Matady