Le ministre des Affaires étrangères se prononce pour un retrait progressif des Casques bleus.
* Pour sa part, le Patron de la mission onusienne estime qu’« il y a encore des efforts à faire pour ramener la menace des groupes armés à un niveau gérable ».
La présence des casques bleus onusiens est-elle encore importante en République démocratique du Congo ? La réponse est affirmative. Intervenant hier à la tribune du Conseil de sécurité de l’ONU à New-York, le ministre congolais des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Raymond Tshibanda, sollicite toutefois le départ progressif des casques bleus en RDC. Car, a-t-il dit, la RDC peut désormais évoluer seule. Le numéro un de la Diplomatie congolaise prône cependant le retour à l’apaisement du climat entre son pays et la Monusco. Par contre, le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies en RDC, Martin Köbler, estime que la Monusco a encore beaucoup à faire dans les efforts de stabilisation de la RDC.
Le ministre a fait valoir des progrès politiques et économiques accomplis par son gouvernement et des "avancées importantes" des forces gouvernementales contre les rebelles hutu rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) dans l’est du pays. Il a évoqué un "Etat qui fonctionne et dont l’autorité s’exerce effectivement sur la quasi-totalité du territoire national.
Pour lui, la RDC est prête " à engager un dialogue stratégique avec les Nations Unies sur notamment la réduction de l’effectif des casques bleus, avant que le Conseil n’en décide. " Je voudrais souligner à nouveau que le niveau de performance actuel des FARDC explique objectivement notre volonté de négocier à la baisse et de manière progressive le nombre des troupes de la MONUSCO. Nous savons que l’idée de réduction de ces troupes est partagée par notre organisation et que la discussion ne porte que sur son ampleur et sa vitesse.
Nous sommes convaincus qu’en nous retrouvant comme nous avons convenu de le faire à partir de lundi prochain, nous arriverons certainement à nous mettre d’accord et pourrons faire des propositions consensuelles au Conseil. "
Le diplomate congolais a reconnu au Conseil de sécurité de l’Onu, les efforts fournis par la Monusco aux côtés du Gouvernement, dans la lutte pour la stabilisation de la RDC. "Aujourd’hui, il y a certes encore quelques poches d’insécurité à certains endroits bien localisés du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Partout ailleurs sur le territoire national, la paix et la sécurité règnent. Bien plus, il y a un Etat qui fonctionne, les institutions légitimes et efficaces, une armée en pleine reconstruction."
Selon lui, la RDC est désormais en mesure de poursuivre ce travail seule. Raymond Tshibanda a fermement demandé au Conseil de " respecter cette aspiration légitime ". "La République démocratique du Congo est reconnaissante envers l’Organisation des Nations unies pour son estimable concours dans la poursuite et l’atteinte de ces résultats. Elle estime cependant que le moment est venue pour elle d’assumer pleinement ses responsabilités quant à sa sécurité et à celle de sa population. Elle plaide donc pour que le Conseil fasse droit à cette aspiration légitime qui est consubstantielle à la notion même de souveraineté", souligne la source.
La position de Kinshasa est nuancée par le chef de la Monusco, Martin Kobler, qui a souligné que "la situation générale de sécurité reste instable" et que "beaucoup vivent toujours dans la peur" dans l’est du pays. "La Monusco ne restera pas éternellement en RDC, a-t-il expliqué, mais il y a encore des efforts à faire pour ramener la menace des groupes armés et les violences contre les civils à un niveau gérable" par l’Etat congolais, renchérit Martin Kobler.
"Le départ de la Monusco doit être lié aux résultats obtenus et à l’amélioration concrète de la situation sur le terrain", a-t-il martelé. Selon des diplomates, poursuit la source, le Conseil envisage de réduire de 2.000 les effectifs de la Monusco (près de 20.000 hommes) alors que Kinshasa réclame le retrait de 6.000 Casques bleus.
M. Kobler a aussi critiqué "l’arrestation il y a quelques jours de plus de 40 acteurs de la société civile". "Laisser un espace politique à la société civile est une condition préalable pour des élections crédibles", a-t-il souligné.
Les deux hommes sont revenus sur la nomination par Kinshasa de deux généraux coupables d’abus selon l’ONU, qui a amené la Monusco à se retirer de l’offensive contre les FDLR.
"Nous ne voulons pas devoir choisir entre combattre les FDLR et soutenir les droits de l’homme", a lancé M. Kobler. M. Tshibanda a affirmé que Kinshasa n’avait pas été averti à l’avance des soupçons contre les deux officiers qui avaient déjà travaillé avec l’ONU. De plus, a-t-il rétorqué, la RDC "tient à garder une totale autonomie sur le plan de la nomination de ses cadres civils et militaires".
Le chef de la Monusco pense par ailleurs que beaucoup de choses ont déjà été accomplies sur le terrain. Mais beaucoup restent encore à faire pour stabiliser davantage la RDC, qui nécessite un renouvellement du mandat de la mission onusienne. "Nous sommes ici au service du peuple, a-t-il ajouté. Nous sommes aussi ici pour offrir nos services au Gouvernement. Notre volonté de quitter le pays est réel et sans équivoque. Le départ de la Monusco doit être lié aux résultats obtenus et à l’amélioration concrète de la situation sur le terrain", a expliqué Martin Kobler.
Le Conseil de sécurité de l’Onu s’est réuni jeudi 19 mars à New York sur la situation en RDC et le renouvellement du mandat de la Monusco. Le Conseil devrait se prononcer dans la soirée d’hier. MOLINA