RDC : Les avocats de Fortunat Biselele accusent la ministre de la Justice de violer les droits de leur client

Jeudi 18 mai 2023 - 07:12
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Au cours d’une conférence de presse tenue lundi 15 mai 2023, le collectif des avocats de Fortunat Biselele, conduit par Me Richard Bondo, ont exprimé leur regret de voir la ministre de la Justice, Rose Mutombo, devenir un bourreau des droits de l’homme, et de violer les droits de leur client, en le remettant « violemment » en prison, alors que ce dernier est dans un état de santé « critique ».

Relevant d’abord des faits de violation de la procédure dans l’arrestation de leur client, notamment sa détention pendant 6 jours dans les locaux de l’ANR alors que la loi prévoit 48h, la confiscation de ses téléphones, la fouille dont il a fait objet, sans autorisation au préalable du procureur ou encore la saisie de son véhicule qui n’est pas une pièce à conviction, ces avocats voient dans tout ceci une volonté de nuire à leur client. 

« La volonté de nuire à notre client transparaît également dans le fait que l’ANR a retenu le véhicule dans lequel M. Biselele s’était rendu à son rendez-vous à l’ANR, sans que ce véhicule soit concerné en rien par le dossier judiciaire de notre client, sans que ce véhicule ne soit une pièce à conviction d’aucune prévention. Depuis le 14 janvier 2023, les avocats et la famille de M. Biselele ont formulé plusieurs demandes afin de récupérer ce véhicule, mais l’ANR s’y refuse sans en donner aucune explication. Sommes-nous encore dans un état de droit comme le veut le chef de l’Etat ? », ont-ils déclaré. 

Selon la loi portant création de l’ANR, il est stipulé, rappellent-ils, que l’ANR a pour mission de chercher les infractions à la sécurité, mais dans le respect de la loi. Comme il n’y a pas eu respect de la loi, indiquent-ils, « tous les PV sont faux et ne peuvent être retenus par le procureur. C’est dans ce contexte que Fortunat Biselele a été transféré au CPRK. Et le jour du transfert, l’ANR avait mobilisé la presse pour assister à son arrivée au parquet, où le camion qui amène les prisonniers à Makala était déjà rangé. Tout ceci montre clairement qu’il s’agit d’une pièce de théâtre arrangée à l’avance ».

À en croire les avocats de Fortunat Biselele, après l’avoir fait ausculter par les médecins du CPRK, le gardien de la prison centrale de Makala a écrit à la ministre d’Etat et ministre de la Justice pour lui dire que leur client était malade, et qu’il doit être transféré dans un hôpital approprié pour traitement. La ministre de la Justice va en référer au ministre de la Santé qui, à son tour, va désigner une équipe des médecins qui va lui faire rapport. 

Et ce rapport, indiquent-ils, « reconnaît l’état critique de santé de leur client. C’est ainsi qu’on va le transférer à l’hôpital. Faute d’équipement adéquat, l’hôpital n’a fait grand-chose. Mais un mois jour pour jour, la ministre de la Justice décide le renvoie de leur client en prison. Le samedi 13 mai, à 4h du matin, il est jeté violemment dans un véhicule qui le ramène à l’hôpital ». 

Dans la foulée, ce collectif d’avocats qui estime avoir connu la ministre Rose Mutombo Kiese comme défenseur des droits de l’homme avec son ONG CAFCO, dit être étonné de la voir devenir aujourd’hui elle aussi « un bourreau des droits de l’homme, en violant à ce point les droits de leur client ». 

Pour les avocats de Fortunat Biselele 3 articles de la Constitution ont été violés, à savoir : 

- L’article 16, qui stipule que nul ne peut être soumis à un traitement cruel, inhumain ou dégradant.

- L’article 17, qui soutient que toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie par un jugement définitif.

- L’article 18, qui dit que tout détenu doit bénéficier d’un traitement qui préserve sa vie, sa santé physique et mentale ainsi que sa dignité.

De ce fait, le collectif des avocats de Fortunat Biselele estime que ce dernier doit être considéré comme une victime politique par l’opinion publique nationale et internationale.

« Qu’est-ce qu’un Garde des sceaux ? C’est le gardien des emblèmes de la République, le juriste maison du gouvernement, la conseiller juridique de la République. Quand elle s’érige elle-même en violatrice de la Constitution et des lois, la démocratie est menacée. Devant ce scandale qui ne respecte ni la vie ni la santé de notre client, nous avons pensé que l’opinion publique nationale et internationale doit considérer Biselele Fortunat comme une victime politique, car aucune procédure ni juridique ni judiciaire, ne peut justifier le sort qu’on lui fait subir », ont-ils déploré. 

En outre, pour ces avocats, la justice ne doit pas être utilisée dans ce genre des manœuvres politiciennes. 

« C’est contre le triomphe de ce mal, que le collectif des avocats de Biselele Fortunat s’élève pour que le régime pénitentiaire soit réglé par le président de la République selon l’article 115 du Code de procédure pénale congolais.
Vous savez que notre client a passé 14 jours pendant lesquels sa détention n’était couvert par aucun acte de procédure. Tout ceci montre qu’il est victime d’une lutte de positionnement autour du chef de l’Etat pour éliminer les uns et positionner les autres. Mais la justice n’a pas à être utilisée dans ce genre de manœuvres politiciennes
», déplorent-ils. 

Et d’ajouter : « Un de vos confrères, le journaliste algérien Hocine Aït Ahmed, a déclaré dans son livre ‘‘l’afro fascisme’’ : « Les nouveaux maîtres chaussent les bottes de leurs prédécesseurs. Leurs maisons couvrent les cris des suppliciés ». Le supplicié, n’est-ce pas Biselele Fortunat qu’on veut conduire à la mort ».

Affirmant que leur client est accusé pour des propos qui ont été répétés par d’autres autorités du pays, ce collectif des hommes estime que son arrestation démontre qu’il s’agit bel et bien d’une guerre politique. 

« Notre client est accusé d’être en contact avec les puissances étrangères, notamment le Rwanda. Dans sa lettre transfert au parquet, l’AG de l’ANR, Mbelu Biosha le charge des accusations qui sont passibles de la peine capitale, donc qui sont très graves. Mais c’est seulement lorsque notre client a parlé dans l’émission d’Alain Foka qu’on l’a l’arrêté. On lui a dit qu’en disant que le président Kagame avait un carnet d’adresse, il a humilié le chef de l’Etat. Mais d’autres ont dit la même chose : Bilomba a évoqué le sens de l’organisation du Rwanda, le président de la République lui-même a dit pareil, et Nicolas Kazadi vient de le dire aussi. Pourquoi la bête à abattre doit être Biselele Fortunat ? Ceci démontre une guerre politique de positionnement ». 

Quant à la trahison reprochée à Fortunat Biselele, ses avocats affirment que leur client ne faisait rien en ce qui concerne le Rwanda, sans autorisation du président de la République. 

« C’est après qu’on en vient à ces accusations de trahison. En fouillant ses téléphones, on l’accuse d’avoir trahi la RDC depuis 2019, alors qu’à cette date, la RDC et le Rwanda étaient en de très bonnes relations. Et Monsieur Biselele était l’interface du chef de l’Etat en ce qui concerne les relations avec le Rwanda, comme M. Nzamwita était aussi l’interface du président rwandais pour les dossiers congolais. Rappelons que le 3 juillet 2022, c’est Mbelu Biosha lui-même qui a délivré l’autorisation à l’avion de la délégation rwandaise de venir en RDC. Et le 26 juillet 2022, c’est toujours lui qui a autorisé au jet privé du conseiller privé Biselele Fortunat de se rendre au Rwanda. Biselele Fortunat ne faisait rien en ce qui concerne le Rwanda sans l’aval du Président de la République » ont-ils affirmé. 

Par ailleurs, pour les avocats de Fortunat Biselele tout porte à croire que leur client n’est qu’une victime politique dans cette affaire. 

Christian Dimanyayi

 

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