Dans son premier semestre
L’amnistie de certains prisonniers et la fièvre de l’attente du gouvernement de cohésion nationale figurent également parmi les faits marquants de cette période
La Tempête des Tropiques fait le bilan des évènements politiques et sécuritaires qui ont dominé l’année 2014 sur l’ensemble du territoire national.
Cette première partie concerne les faits saillants du premier semestre de l’année, marqués notamment par l’assassinat crapuleux du colonel Mamadou Ndala ainsi que la disparition de Jean-Lucien Bahuma. Les deux officiers des Forces armées de la République démocratique du Congo ont été des artisans de la paix dans le Nord-Kivu à travers la défaite infligée à la rébellion du M23.
L’an 2014 a été riche en évènement politique et sécuritaire en République démocratique du Congo. Dès le mois de janvier, alors que les éléments des Forces armées de la République démocratique du Congo, appuyés par les soldats de la Monusco, venaient d’infliger une lourde défaite aux rebelles du M23 appelés à disparaitre, la classe politique congolaise avait les yeux tournés vers la formation du gouvernement de cohésion nationale annoncée depuis octobre 2013 par Joseph Kabila.
Dès le 2 janvier 2014, les Congolais ont été consternés par l’assassinat du colonel Mamadou Ndala, commandant de la 8ème Région militaire du Nord-Kivu, principal tombeur du M23.
Elevé au rang de « Héros national », cet officier des Fardc est mort dans des circonstances obscures. Mêmes les enquêtes qui ont accompagné le procès n’ont pas convaincu l’opinion tant nationale qu’internationale sur son assassinat. Son péché, souffle-t-on, est d’avoir réussi à mettre en déroute la bande à Sultani Makenga jusqu’à sa disparition.
La longue attente
Après ce triste évènement, les acteurs politiques aussi bien de la Majorité présidentielle, de l’ « Opposition » que de la société civile étaient dans la fièvre de l’attente de la nouvelle équipe gouvernementale. Même le Premier ministre Matata Ponyo n’était pas sûr d’être reconduit, au regard des tractations observées dans les différentes officines politiques.
Des alliances contre nature ont été contractées entre certains animateurs présumés de l’Opposition et la Majorité présidentielle. Quelques membres de l’Opposition ont été désavoués par les siens pour avoir pactisé avec le diable.
L’objectif était de figurer dans le gouvernement de cohésion, avec ou sans aval de son parti ou sa plate-forme politique. Lisanga Bonganga et Léon Kengo Wa Dondo ont convolé en justes noces, avant de déclarer le divorce quelques mois plus tard, Lisanga sentant qu’il se faisait rouler dans la farine. Martin Fayulu et Vital Kamerhe, tous de l’Opposition, sont devenus des ennemis jurés, le premier soupçonnant le second de rouler pour le pouvoir.
Seule l’Union pour la démocratie et le progrès social est restée constante dans sa position, tandis que le Mouvement de libération du Congo (MLC) affichait une image de chauve-souris. Pendant ce temps, le gouvernement, par l’entremise du ministère de la Justice, publiait déjà les listes des bénéficiaires de la loi d’amnistie, conformément à une de nombreuses résolutions des concertations nationales tenues à Kinshasa, du 7 septembre au 5 octobre 2013 au Palais du Peuple.
Des éléments du M23 qui ont endeuillé la RDC ont été les mieux servis, alors que les prisonniers politiques continuaient de purger leur peine dans les différents cachots et prisons de la République.
C’est dans cette ambiance que, le 31 août 2014, Jean Lucien Bahuma, chef d’état-major de la région province du Nord-Kivu, qui a joué un rôle clef dans les récents succès des forces loyalistes dans cette province de l’est du pays, est mort en Afrique du Sud, victime, à 57 ans, d’un accident vasculaire, alors qu’il assistait à une réunion mixte d’Etat-major en Ouganda, consacrée à la lutte contre les rebelles ougandais de l’Alliance des forces démocratiques (ADF), présents au Nord-Kivu.
Deux généraux disparaissent
Les Congolais en général ont salué la mémoire du général défunt qu’ils considéraient comme un homme absolument dévoué, un officier vaillant qui s’était donné corps et âme à sa mission. Pour d’aucuns, Bahuma était victime d’empoisonnement, et sa disparition avait des liens avec celle de Mamadou Ndala.
Au même moment, l’actualité sur la révision, modification ou changement de la Constitution a gagné tous les salons politiques congolais. Pour la Majorité présidentielle, cette loi fondamentale devrait être retouchée, car issue d’un contexte de belligérance.
Niet pour l’Opposition qui estimait qu’il n’était pas élégant de changer les règles du jeu en plein match, s’inscrivant en faux contre un troisième mandat de Joseph Kabila.
« Touche pas à mon 220 » a été le slogan de la plate-forme « Sauvons la RDC » de Martin Fayulu qui mettait les tenants du pouvoir en garde s’ils se hasardaient à s’imposer à modifier la Constitution pour permettre à l’autorité morale de la MP de se maintenir au pouvoir.
L’Eglise catholique, l’Opposition politique interne, la société civile, la diaspora congolaise ainsi que la communauté internationale s’étaient rangées du côté du peuple congolais pour dire « non » à toute tentative de modifier la Constitution au profit d’une seule personne.
2 janvier 2014 : le colonel Mamadou Ndala est assassiné à 10 km de Beni, dans la province du Nord-Kivu. Commandant du 42e bataillon des commandos des Unités de Réaction Rapide des Fardc, il s’est rendu célèbre en remportant des victoires éclatantes sur les combattants du M23, un mouvement soutenu par le Rwanda et l’Ouganda, qui sévissait dans l’Est de la République démocratique du Congo.
Il est mort calciné dans sa jeep avec deux de ses gardes du corps, des suites d’une embuscade lui tendue. Il a été nommé général de brigade à titre posthume.
11 février 2014 : la première vague de 50 bénéficiaires de la loi d’amnistie quitte la prison. Cette loi n’a concerné que des faits de guerre ou insurrectionnels commis entre le 18 février 2006 et le 20 décembre 2013. Mais des prisonniers politiques qui n’ont pas choisi les armes pour s’exprimer sont exclus de la liste des bénéficiaires.
15 mars 2014 : la session parlementaire s’ouvre sans le gouvernement de cohésion nationale promis par Joseph Kabila, alors que cette nouvelle équipe était annoncée pour avant fin décembre 2013. Beaucoup de leaders politiques s’impatientent et appellent Joseph Kabila à respecter « l’une de plus grandes recommandations des concertations nationales », à savoir la formation du gouvernement issu des concertations nationales, auquel devraient prendre part aussi bien la Majorité présidentielle, l’Opposition et la société civile.
26 mars 2014 : la Cour suprême de justice condamne l’opposant Eugène Diomi Ndongala à 10 ans de prison. Le prisonnier politique était poursuivi pour viols sur mineures.
Des faits qui se seraient produits en juin 2012 à Kinshasa. Son parti, la Démocratie chrétienne, a toujours considéré cette affaire comme un procès politique intenté contre leur leader à cause de son soutien à l’opposant Etienne Tshisekedi qui a contesté en 2011 la réélection de Joseph Kabila pour un mandat de cinq ans.
Me Richard Bondo, l’un des avocats de Diomi Ndongala, dénonce ce qu’il qualifie « d’arrêt nul et arbitraire », rendu nuitamment en l’absence de toutes les parties au procès.
La communauté internationale ne cesse d’appeler Kinshasa à organiser un procès équitable pour que justice soit rendue. La même communauté sollicite que Diomi ait accès aux soins de santé adéquats, vu son état de santé dégradant.
22 mai 2014 : l’Onu répertorie 232 cas de violations de droits de l’homme en République démocratique du Congo pour le mois d’avril 2014. Selon le Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme (Bcnudh) en Rdc, ce chiffre représente une augmentation d’environ 23 % par rapport au mois de mars.
Il s’agit notamment d’atteintes au droit à l’intégrité physique, à la liberté et à la sécurité de la personne, des atteintes à la vie et au droit de propriété perpétrées particulièrement dans les provinces du Nord et Sud-Kivu, a précisé Scott Campbell, le directeur de ce bureau.
Ce dernier propose que Kinshasa multiplie des efforts sur la reforme du secteur sécuritaire, notamment à travers la formation des militaires et policiers. Il demande également d’intégrer un mécanisme de véto, comme le Conseil de sécurité l’a recommandé, pour que ceux qui sont responsables des violations des droits de l’homme soient exclus des services publics, notamment des forces de défense et de sécurité.
30 juin 2014 : la République démocratique du Congo célèbre ses 54 ans de l’indépendance. Joseph Kabila préside personnellement la cérémonie. Un imposant défilé militaire est organisé à la place du Cinquantenaire, en présence de son épouse Olive Lembe Kabila, ainsi que de toutes les personnalités du monde politique, militaire et diplomatique.
A l’occasion, le Raïs fait une démonstration de son arsenal militaire composé de chars de combat, autos blindées, hélicoptères et avions de guerre, ainsi que d’autres armes sophistiquées.
Un message fort pour tous ceux qui sont tentés de reprendre les aventures criminelles sur toute l’étendue du territoire national, particulièrement dans sa partie-Est.
Par Lefils Matady