L’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) persiste et signe que le dialogue national reste incontournable. En plus de la feuille de route rendue publique en son temps, le schéma et l’agenda du parti leader de l’Opposition sont désormais connus. Plus de mystère, l’UDPS prendra part au dialogue pour y exiger la réforme de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), l’enrôlement de nouveaux majeurs, le respect strict de la Constitution... Mais, face aux contraintes techniques, Etienne Tshisekedi et les siens feront de la real politik.
L‘UDPS se prépare-t-elle réellement au rendez-vous historique du dialogue po1itiq préconisé par le chef de l’Etat? A en croire un cadre du parti qui a échangé avec Le Potentiel, il ne fait l’ombre d’aucun doute que Tshisekedi et 1’UDPS sont disposés à prendre une part active aux travaux du dialogue national. Etienne Tshisekedi s’était inscrit dans la logique du dialogue au lendemain des élections chaotiques de 2011 dont les résultats ont été contestés quasiment par toutes les parties, y compris par le président Kabila.
Depuis, la tension est demeurée, permanente au pays, s’accentuant avec l’approche des scrutins prévus en 2015 et 2016. Au cours de la présidentielle de 2016, l’alternance consacrée dans la Constitution du 18 février 2006 devrait se concrétiser d’autant plus que le président Joseph Kabila aura épuisé ses deux mandats à la tête du pays. Le chef de l’Etat n’est pas autorisé de briguer in troisième mandat, sans énerver les prescrits de l’article 220 de la Constitution. Dans toutes les initiatives prises par l’entourage présidentiel, l’opposition voire une frange de la Majorité soupçonne des velléités tendant à orchestrer le glissement, c’est-à-dire permettre au président Kabila de rester au pouvoir au-delà du 20 décembre 2016.
En janvier dernier, des manifestations ont stoppé nette- la tentative d’ériger en préalable le recensement avant l’organisation des scrutins. Le bilan est lourd : une quarantaine de morts selon toutes les sources ! L’UDPS qui est habituée à être victime de la répression, se serait décidée donc de mettre un terme à tout ce sang qui coule à flots pour des motivations de conquête ou de conservation du pouvoir.
Constitution : l’UDPS prendra ses responsabilités
A l’UDPS où le retour du sphinx est annoncé pour ce mois de septembre, l’on soutient mordicus que le dialogue n’a pas pour objectif la modification de la Constitution. Selon notre interlocuteur, «l‘UDPS ira au dialogue pour contrer tous ceux qui ont comme agenda de violer la Constitution, en organisant le glissement ou le changement de la Constitution pour permettre à Joseph Kabila de rester éternellement à la tête du pays ».
A la question de savoir comment l’UDPS compte-t-elle barrer la voie à pareille velléité? Notre interlocuteur est catégorique : « L ‘UDPS mettra toutes les batteries en marche. La Majorité a mal géré. Elle est en difficulté. Nous ne tendrons jamais la perche pour saurer la Majorité, mais pour éviter la déstabilisation du pays ».
Il poursuit: s Tshisekedi’ et l’UDPS sont une caution certaine sur le plan politique en RDC. La communauté internationale devra mettre la main à la caisse afin de permettre la tenue des élections dans le délai, en même temps que nous nous battrons pour que le peu de ressources mobilisées servent réellement à l’Etat et à l‘organisation des élections ». En d’autres termes, l’UDPS disposerait d’une stratégie secrète devant empêcher le chef de l’Etat de glisser voire d’opter pour une nouvelle Constitution.
DE LA CENI ET DE NOUVEAUX MAJEURS
L’UDPS ne s’explique pas que les opposants au dialogue, qui soupçonnent la Centrale électorale et le Parlement d’être à la solde du président Kabila, s’interdisent de saisir l’opportunité de réformer en profondeur sa composition et ses missions ! « Avec cette Ceni de M. l’abbé Apollinaire Malumalu, les opposants au dialogue espèrent quoi ? Des élections libres, démocratiques et crédibles ? », s’est emporté notre interlocuteur.
Pour l’UDPS, les choses sont claires : la Ceni, dans sa composition actuelle, ne peut pas produire des élections crédibles. Ce sera le combat le plus difficile pour I’UDPS qui s’est toujours estimée flouée lors des scrutins de 2011.
L’autre versant du combat de I’UDPS lors du dialogue projeté consistera à obtenir l’enrôlement de nouveaux majeurs. Les estimations sont de l’ordre de 5 à 8 millions de jeunes qui auraient atteint l’âge de 18 ans, donc électeurs légalement reconnus par la Constitution de la République.
Une injustice que personne ne pourrait accepter. Sur ce point, la position de l’UDPS rejoint celle exprimée par’. le président de la République, dans son discours du 29 juin dernier à l’occasion du 55eme anniversaire d’indépendance.
ET LE GLISSEMENT …
Sans contredire notre interlocuteur, Félix Tshilombo Tshisekedi s’est interrogé à voix audible : «Et si en 2016, il n y a pas de présidentielle, que ferons-nous ? ». Cette intéressante interrogation n’a qu’une réponse sur les lèvres de notre interlocuteur; un fidèle des fidèles, et haut cadre de la fille ainée de l’Opposition: «1‘UDPS prendra ses responsabilités ». Une réponse lapidaire, mais qui renferme l’essentiel de ce que 1’UDPS entend jouer comme rôle. S’il faut qu’il y ait glissement, notre interlocuteur soutient que l’UDPS compte apporter des « explications à la population sur base exclusivement des données techniques ».
En fait, à l’UDPS le glissement doit faire l’objet d’un consensus, sans toucl3er à la Constitution et doit se faire sur des bases principalement techniques.
Dans un tweet, Félix Tshisekedi indique’: «Je suis pour le dialogue non pas pour renforcer le pouvoir de Kabila mais pour reprendre les choses en main ». L’UDPS se serait-elle munie de longues fourchettes pour prendre part à ce marché des dupes ? Notre interlocuteur se veut rassurant : « Ils nous ont snobé après Sun City, où en sommes-nous aujourd’hui ? ». Cette fois, l’UDPS compte tirer les leçons de l’histoire qui s’imposent. «Nous ne nous ferons pas rouer le peuple peut nous faire confiance ». Ce langage de vérité et de transparence qui doit conduire l’UDPS dans cette aventure risquée est un couteau à double tranchant.
Mais, l’UDPS a-t-elle vraiment d’autres alternatives face à la réalité qui se profile à l’horizon ? C’est là toute la question sur l démarche du parti de l’opposant historique appelé à mettre non seulement de l’eau dans son vin, mais aussi à tenir face aux espoirs suscités auprès d’une population exigeante dans son désir de plus de liberté et de l’instauration d’une vraie démocratie en République démocratique du Congo. Dialogue? Oui, mais sans glissement. Face aux contraintes techniques, nous prendrons nos responsabilités en allant vers le peuple. Tel semble être le message de l’UDPS. Un tournant décisif.
LE POTENTIEL