Sécurité, dialogue et élections : la hiérarchie des priorités
Sur la scène nationale et internationale, les initiatives se multiplient : Luanda, Nairobi, Doha, Washington, Kinshasa… Les uns parlent d’élections, les autres de dialogue, d’autres encore de sécurité.
Résultat : un grand brouhaha où chacun brandit sa propre urgence, selon ses intérêts.
Mais dans ce concert de contradictions, une question demeure : quelle est la véritable priorité du moment ?
À notre avis, la priorité n’est ni le dialogue ni les élections. Elle réside ailleurs, dans la résolution de la problématique des FDLR, ce fond de commerce de P. Kagame, cette éternelle excuse qui lui permet d’occuper impunément une partie du territoire congolais.
Les FDLR ne sont pas pour lui une menace, mais une aubaine. Il souhaite qu’ils restent chez nous, afin de justifier sa présence et de poursuivre le pillage de nos ressources sous le prétexte d’une menace contre son pays.
D’ailleurs, s’ils représentaient un danger réel, Kagame les aurait neutralisés depuis longtemps. Il en avait la capacité quand il contrôlait le Nord-Kivu à travers le RCD, et il l’a encore aujourd’hui via l’AFC/M23. Mais non. Au contraire, tout porte à croire qu’il fait retourner au Congo certains éléments FDLR qui rentrent au Rwanda, histoire de maintenir la fiction utile.
Et la communauté internationale ? Elle adhère à ce jeu de dupes.
C’est la même qui, en 1994, nous avait demandé d’accueillir les réfugiés hutu armés et qui, aujourd’hui, exige que nous résolvions seuls un problème qu’elle a contribué à créer.
Pyromane hier, pompier aujourd’hui.
Mais que signifie exactement
" résoudre le problème des FDLR "? Les exterminer ? Les déporter ? Les refouler de force ? Aucune de ces voies n’est viable. La vraie solution consiste à favoriser un dialogue interrwandais, associant les FDLR, afin de permettre un retour pacifique de ces populations au Rwanda.
Mais, bien entendu, Kigali refuse cette option, arguant qu’il s’agit de "forces négatives". Pourtant, la même communauté internationale qui lui donne raison demande à Kinshasa de dialoguer avec l’AFC/M23, un groupe qui a massacré plus de 10 000 Congolais à Goma en deux jours ! Cherchez l’erreur.
Si nous devons parler avec des forces négatives, alors que Kagame fasse de même.
Depuis 1994, les Hutu du Rwanda qui avaient 40 ans en ont aujourd’hui plus de 70. Beaucoup sont morts. Leurs enfants, nés au Congo, n’ont commis aucun crime. En quoi seraient-ils responsables des fautes de leurs pères ? La faute a cessé d’être collective, mais Kagame continue de s’en servir comme d’un alibi pour occuper le Congo.
C’est pourquoi la vraie priorité des patriotes congolais n’est ni le dialogue ni les élections, mais la paix durable à l’Est, fondée sur une solution globale et définitive à ce conflit entretenu. Une fois la sécurité rétablie, le dialogue entre Congolais et les élections libres pourront venir naturellement.
Mais sans sécurité, avec une partie du territoire occupé, tout dialogue ne favorisera que l’intégration des militaires rwandais dans nos forces armées et toute élection, une mascarade qui favorisera la participation de notre pays.
Les dialogues, il y en a eu dans le passé. Avec l’alibi Fdlr, malgré les dialogues, avec les brassages et les gouvernements d’union nationale, nous sommes allés de rebellions en rebellions: Afdl, RCD, CNDP, AFC/M23 et M24 demain, qui sait !
Oui, le dialogue nous en aurons besoin pour résoudre certains problèmes internes: les groupes armés qui pullulent, la victimisation de certaines communautés, l’adaptation de notre loi fondamentale à nos réalités : faudrait-il faire participer toutes les forces politiques représentatives à la gestion du pays et bannir les concepts opposition - majorité…?
Mais, la sécurité prime.
Comme disent les Baluba:
Muana usama buloba busama ne wakuila nganyi ? Si l’enfant est malade et que la terre est malade, pour qui plaideras-tu d’abord ?
À chacun de répondre.
Tribune de Steve Mbikayi, député national et président du Parti Travailliste (PT)