
Dans une déclaration conjointe rendue publique ce lundi 16 juin 2025, deux organisations congolaises de défense des droits humains, l’Institut de recherche en droits humains (IRDH) et Justicia ASBL, ont dénoncé les propos du Vice-premier ministre et ministre des Transports, Jean-Pierre Bemba, tenus lors de son intervention sur Top Congo.
À la presse à Lubumbashi, Maîtres Hubert Tshiswaka (IRDH) et Timothée Mbuya (Justicia ASBL) ont qualifié ces déclarations de « mensongères, manipulatrices et dangereuses pour la cohésion nationale ».
« Le discours du Vice-Premier Ministre ne correspond pas aux vérités que nous connaissons sur des dossiers que nous avons rigoureusement investigués. Il s’agit d’un homme d’État respecté, dont les propos devraient incarner les valeurs qui fondent une gouvernance responsable », a déclaré Maître Hubert Tshiswaka au micro de 7SUR7.CD.
L’un des points les plus sensibles évoqués par les deux avocats concerne le dossier de Kafutshi, chauffeur de Moïse Katumbi. Ce dernier aurait, selon Bemba, affirmé l’existence de caches d’armes dans l’une des concessions de l’homme politique à Mulonde dans le Haut-Katanga. Une affirmation que démentent formellement les deux ONG. Les équipes de l’IRDH et de Justicia ont mené des enquêtes de terrain à Mulonde, Lukonzolwa, Kilwa, Kachobwe et même à Futuka, en collaboration avec le général Ndayewel, alors chef d’état-major adjoint chargé de l’enseignement militaire. A l’issue de ces investigations, poursuivent ces avocats, aucune arme n’a été découverte, et le chauffeur a été libéré sans suite.
« Il n’y avait rien à Mulonde, et c’est le général Ndayewel lui-même qui nous a remis le chauffeur, car on n’avait rien trouvé. Toute la famille de Kafutshi avait sollicité notre aide pendant l’absence de M. Katumbi », a expliqué maître Hubert Tshiswaka.
Les deux défenseurs des droits humains rejettent également les affirmations du Vice-Premier Ministre selon lesquelles Moïse Katumbi aurait fui le pays. Ils ont produit des documents prouvant qu’un jet privé sud-africain avait reçu une autorisation de l’Autorité de l’aviation civile pour transporter Moïse Katumbi et son équipe, dans le cadre de matchs du TP Mazembe en Afrique du Sud.
Maître Timothée Mbuya a aussi rappelé que ce type de stratégie n’est pas nouveau. Des tentatives similaires ont eu lieu en 2015 et 2016, quand des responsables politiques étaient accusés à tort de cacher des armes dans leurs propriétés. Il affirme même que les ONG avaient été menacées à l’époque, soupçonnées à tort d’interférer avec des opérations où des armes devaient être posées pour compromettre des figures publiques.
« Aujourd’hui encore, on veut faire croire à la présence d’armes pour justifier des poursuites judiciaires arbitraires. C’est inacceptable. Jean-Pierre Bemba cherche à instrumentaliser les services de sécurité pour ses fins politiques », a-t-il insisté.
Pour les deux organisations, la gravité de la situation sécuritaire dans l’Est du pays impose un tout autre comportement de la part des leaders politiques. Elles estiment que les discours et mensongers peuvent aggraver les tensions sociales, dans un contexte déjà marqué par l’occupation d’une partie du territoire national.
« Le gouvernement doit condamner ces propos. Ce n’est pas le moment de diviser. Il faut unir les Congolais autour d’une table, discuter et chercher ensemble des solutions à cette guerre qui ravage notre pays », conclut Timothée Mbuya.
Les deux organisations de défense des droits humains concluent leur déclaration en appelant à une appropriation nationale des initiatives diplomatiques en cours. Ils saluent les diverses initiatives engagées au niveau régional et international, notamment celles de Nairobi, Luanda, Doha et plus récemment Washington, en soulignant leur importance stratégique pour une paix durable.
Patient Lukusa, à Lubumbashi