
Après avoir passé des années enfermés dans des cages au sein de zoos à Kinshasa et au Kongo-Central, huit chimpanzés congolais ont trouvé une nouvelle vie en Inde. Leur nouveau foyer est Vantara, un vaste sanctuaire où ils bénéficient d'une semi-liberté, vivant dans des enclos soigneusement conçus pour reproduire les caractéristiques de leur habitat naturel.
Le transfert de ces primates de l'Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) à Vantara, un centre dédié à la restauration des espèces menacées, a suscité de vives polémiques au sein de la communauté environnementale congolaise au début de l’année. Situé à Jamnagar, à environ 1200 km de New Delhi, Vantara abrite plus de 8 000 animaux originaires de 32 pays différents.
Pour mieux comprendre ce partenariat international, nous avons retracé le parcours de ces chimpanzés jusqu'à leur nouveau refuge. Le constat est clair : les primates ont trouvé un environnement de loin meilleur que les cages qui les abritaient autrefois en RDC.
« Regardez ces chimpanzés, ils s'adaptent bien à leur nouveau foyer », nous a fait observer le naturaliste et responsable pédagogique qui nous a guidés. Et d’ajouter avec une voix emplie d'une admiration discrète: « Celui-là, autrefois profondément traumatisé, a désormais noué un lien indéfectible avec un compagnon d'Amérique du Sud. »
L'esprit du naturaliste s’est alors replongé dans les souvenirs obsédants de sa visite au zoo de Kinshasa.
« Devant ces cages, j’avais ressenti une profonde tristesse », a-t-il déclaré. « Les animaux étaient piégés, négligés, oubliés et abandonnés à leur sort. C'était déchirant. »
A Vantara, ces chimpanzés ont rejoint plus de 2 000 espèces, parmi lesquelles des éléphants d’Asie, divers types de félins, des ours noirs, des loups, des hyènes, des girafes, des okapis, des rhinocéros blancs et divers reptiles comme les anacondas albinos et les cobras. On y trouve également des oiseaux rares tels que le Makaws (ara de Spix), originaire du Brésil et officiellement déclaré éteint à l’état sauvage.
« Notre objectif est de créer une sorte d’Arche de Noé », a expliqué le naturaliste. « Lorsqu’une espèce disparaît de son milieu habitat naturel, nous serons là pour la réintroduire. C’est pourquoi nous créons des environnements qui permettent à ces animaux de retrouver leurs instincts, les préparant ainsi à un avenir où ils pourront à nouveau fouler le territoire qu'ils étaient censés habiter. »
S'étendant sur 1500 hectares, Vantara emploie 3 500 personnes, dont des vétérinaires spécialisés dans la faune sauvage, des biologistes et des nutritionnistes. La photographie et la vidéographie y sont strictement interdites, afin de « préserver la dignité des animaux ». Bien que le sanctuaire ne soit pas destiné au divertissement public, il ouvre occasionnellement ses portes pour des visites éducatives, afin de « favoriser un lien profond entre la faune sauvage pour les générations futures. »
Un partenariat visant à transformer la conservation
À Kinshasa, Yves Milan, directeur général de l'ICCN, défend le partenariat avec Vantara, affirmant que tout est fait dans le respect de la loi congolaise.
« L'ICCN n'a vendu aucun chimpanzé, comme certains l'ont affirmé », nous a-t-il dit. « Il s'agit d'un échange encadré par la loi congolaise ».
Le mémorandum d’entente (MoU) signé entre les deux structures prévoit que Vantara réhabilite le jardin zoologique de Kinshasa ainsi que le jardin botanique de Kisangani. De plus, l’organisme indien s’est engagé à former le personnel de l’ICCN. Un premier groupe partira bientôt pour une formation de trois mois en Inde.
« Le protocole d’accord prévoit notamment le renforcement des compétences de nos techniciens, vétérinaires et soigneurs. Un premier groupe de 17 personnes s'apprête à partir en Inde pour une formation de trois mois […]. L'ICCN ne dispose que de cinq vétérinaires pour tout le pays. Ce partenariat représente une occasion unique de former nos techniciens et d'améliorer la prise en charge des animaux. Après leur formation et la réhabilitation de nos jardins, nos chimpanzés retourneront au pays, et d'autres espèces emblématiques seront importées pour favoriser le tourisme local », a expliqué Yves Milan.
Du côté de Vantara, la maquette du zoo de Kinshasa est déjà prête. Selon les informations recueillies sur place, les travaux devraient
commencer sous peu à Kinshasa. Cependant, le début des travaux pourrait être retardé en raison de la livraison des commandes et de l'acheminement du matériel, car « il n'existe pas d'usines au Congo pour commander la plupart des équipements nécessaires », nous a précisé le naturaliste indien.
Bienfait Luganywa