Reçues hier, toutes les confessions religieuses soutiennent le dialogue.
Le chef de l’Etat congolais, Joseph Kabila, recevra en face-à-face, ce mardi au Palais de la Nation à Kinshasa, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya. Cette rencontre s’inscrit dans le cadre des consultations politiques que le Raïs a entamées depuis hier lundi. Pourvu que les partis politiques ne bloquent le mécanisme déjà déclenché.
Le train du pré-dialogue du Palais de la Nation a quitté la gare hier lundi 1er juin 2015. A l’embarquement, quatre délégations des confessions religieuses : les Protestants conduits par Mgr Pierre Marini Bodho, les Kimbanguistes par Son Eminence Simon Kimbangu Kiangani. Les Catholiques avaient à leur tête Mgr Nicolas Djomo, président de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO). L’Imam Ali Mwinyi a, lui, été à la tête de la délégation des Musulmans. Finalement, Mme Madeleine Ngwanga, Commissaire générale de l’Armée du salut qui a conduit son groupe.
Calendrier électoral. Consensus. Dialogue. C’est l’essentiel à retenir des déclarations de chacune des quatre délégations, faites à la presse au sortir de leur audience. A tour de rôle, Protestants, Kimbanguistes, Eglises de réveil, Catholiques, Musulmans et Salutistes ont devisé avec le chef de l’Etat. Tous sont d’avis que le calendrier électoral global proposé par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), doit faire l’objet d’un nouvel examen. Objectif : dégager le consensus national autour de ce chronogramme afin de mener le processus électoral en cours dans un climat de confiance mutuelle et de paix.
Par ailleurs, les différentes confessions religieuses n’ont pas caché leurs positions sur la controverse politique autour du dialogue. A l’unanimité, toutes ont soutenu et soutiennent cette initiative. Même si le père spirituel de l’Eglise Kimbanguiste ne l’a pas explicitement dit. A une question de la presse, Simon Kimbangu Kiangani a carrément invité le peuple congolais à la prière, avant d’inviter l’Eglise à respecter l’Etat.
Président de l’Eglise du Christ au Congo (ECC), Mgr Pierre Marini Bodho s’est félicité de l’initiative du chef de l’Etat d’associer les Forces vives du pays dans la recherche de voie de sortie de la crise politique actuelle. L’homme de la cathédrale du cinquantenaire a insisté sur le climat politique actuel et les élections en vue. "Nous avons essayé d’expliquer la position de notre église face à ces enjeux ", a-t-il déclaré.
En ce qui concerne le calendrier électoral, Pierre Marini Bodho ne s’est référé aux différentes prises de position des protagonistes. " Pour certains, le calendrier n’est pas globalisant et qu’il faille ajouter d’autres éléments ". Et de poursuivre : " En tant que père de la Nation, le Chef de l’Etat a l’obligation d’écouter tout le monde : partis politiques de la Majorité présidentielle et de l’Opposition". Manière pour lui, de soutenir à demi-mot le dialogue. " Nous n’avons qu’un seul pays ", a-t-il conclu.
LE DIALOGUE : UNE VOIE ROYALE DE SORTIE DE CRISE
L’Eglise catholique romaine en RD Congo est-elle opposée au régime politique actuel au pays ? En tout cas, c’est l’impression qu’a le commun des mortels congolais. A Kinshasa, particulièrement, une très large opinion y croit-à tort ou à raison. Et, le genre de rencontre comme celle d’hier, constitue un baromètre essentiel pour évaluer les rapports entre l’Eglise catholique locale et le Pouvoir rdcongolais. A ce propos, la presse qui croyait avoir l’abbé Léonard Santedi hier, a eu avec qui parler. Entouré par une meute de professionnels de médias massés dans le hall du Palais de la nation, l’abbé Léonard Santedi -le même - n’a fait mystère de rien. " L’Eglise catholique remercie le président de la République d’avoir associé la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) à ces consultations pour deux choses : premièrement, permettre à l’Eglise d’apporter sa contribution au débat actuel au sujet de certains sujets d’intérêt national ", a déclaré, au nom de la Conférence, son Secrétaire général.
Au pied de la marche conduisant à la salle de la rencontre avec le chef de l’Etat au Palais de la Nation, l’abbé Léonard Santedi, a rappelé premièrement que " pour l’Eglise catholique, le dialogue est une voie royale et pacifique de sortie de crise et même, un élément constitutif de tout système démocratique " a-t-il dit. Et d’ajouter : " Ca (ndlr : le dialogue) correspond même à notre doctrine. Et l’Eglise a toujours prôné cela ".
Cependant, tout en soutenant l’initiative du dialogue, la CENCO pense qu’il faut au préalable en définir l’objet. Il s’agit de se demander " sur quoi dialoguer ? " et pour " quelle finalité ? ". Et donc, pour les évêques congolais, " il est impérieux, pour le moment, d’avoir un consensus sur le calendrier électoral de la Ceni", a poursuivi le SG de la Cenco.
" UN DIALOGUE DANS LE RESPECT DE LA CONSTITUTION… "
L’Eglise catholique romaine en RD Congo est formelle. " Le dialogue politique en vue doit se faire dans le strict respect de la Constitution et des institutions actuelles du pays. C’est-à-dire que tout doit être fait dans le respect des délais en ce qui concerne l’organisation des scrutins ", a encore dit le SG de la CENCO, en même temps, le porte-parole de la délégation.
Par ailleurs, les évêques ont estimé qu’il y a des points sur lesquels discuter. Au nombre de ces éléments, figure " la sécurisation des opérations électorales et des candidats aux différents scrutins. A cela s’ajoute la mobilisation des fonds pour réussir un processus électoral qui doit conduire le pays vers des lendemains meilleurs. L’Eglise veut le bien-être de la population et bâtir un grand pays au cœur de l’Afrique ", dixit l’abbé Léonard Santedi. Quelle est la contribution de l’Eglise dans l’organisation et la tenue du dialogue ? A cette question, le Secrétaire général de la Cenco s’est exprimé en ces termes : "les points de vues ont été donnés. Nous avons rappelé l’importance du dialogue pour construire la démocratie. Nous avons également rappelé les préalables, notamment le respect de la Constitution, des institutions en place, le respect des droits humains et la confiance mutuelle. Car, pour réussir le processus électoral, il faut, non seulement assainir le climat politique, mais aussi, créer ce consensus national pour réussir le processus et appeler les hommes politiques à leurs responsabilités ".
Avec la rencontre demain, entre Joseph Kabila et Mgr Monsengwo, les consultations du Palais de la Nation auront franchi leur étape importante. En recevant l’Archevêque de Kinshasa après toutes les confessions religieuses, c’est tout dire. L’opinion se rappelle de mémoire, les différentes prises de position du cardinal Monsengwo, lors des débats politiques, naguère très nourris sur, entre autres, le projet de révision constitutionnelle. La suite du programme des consultations prévoit la rencontre avec la classe politique et le corps diplomatique en poste à Kinshasa. Pourvu que les acteurs politiques ne compromettent pas l’issue de ces rencontres, que tous souhaitent heureuse pour un dialogue politique apaisé, gage d’un processus électoral réussi. Laurel KANKOLE