
Après le soutien inconditionnel de la Majorité Présidentielle, le Togolais Edem Kodjo, Facilitateur du dialogue national désigné par l’Union Africaine, peut compter dans la réalisation de sa mission en RD. Congo sur l’Opposition centriste représentée par Steve Mbikayi, Azarias Ruberwa, Justin Bitakwira, Mushi Bonane et Z’Ahidi Arthur Ngoma. A l’issue d’une conférence de presse tenue, le vendredi 21 janvier dernier, toutes ces personnalités ont manifesté leur volonté de s’affirmer comme une force politique capable de rapprocher les extrémistes du pouvoir et les radicaux de l’Opposition dans le cadre d’un dialogue constructif censé conduire le pays vers des élections apaisées. Les 5 ont, par conséquent, demandé la mise sur pied urgente du Comité Préparatoire du dialogue.
Ce ne sont pas les arguments qui manquent pour donner un contenu intellectuel et politique à leur démarche. Le premier parmi ses pairs à prendre la parole, c’est Steve Mbikayi. Député national, chef de file de l’Opposition nationaliste et président du Parti Travailliste, Mbikayi poursuit un schéma qu’il s’est, désormais, défini. Aux journalistes qui voulaient en savoir un peu plus sur les revendications qu’ils iront présenter et défendre au dialogue, Steve Mbikayi a répondu que les matières à discussion porteront sur toutes les questions qui fâchent.
Mbikayi contre la radicalisation des extrêmes
«Il faut faire la part des choses entre l’intérêt que certains manifestent pour le Congo et les intérêts du peuple congolais». C’est la raison pour laquelle, dit-il, son groupe et lui étaient opposés à la médiation internationale, dès le début. «Mais, avec l’évolution, le 30 juin 2015, nous avons proposé qu’un Africain soit désigné pour nous aider. En tant qu’africanistes, nous devons nous aider mutuellement. Edem Kodjo est donc pour nous le bienvenu». Autrement dit, l’activité politique de vendredi 21 janvier avait pour but de donner la position de l’Opposition pro-dialogue au sujet de la nomination d’Edem Kodjo et de son arrivée à Kinshasa comme Facilitateur international. La venue d’Edem Kodjo, d’après Steve Mbikayi, tombe à point nommé. Surtout que c’est à un moment où il déplore, d’après ses propres termes, la radicalisation de deux camps extrêmes. D’un côté, la Majorité Présidentielle qui cherche à se maintenir aux commandes. Puis, de l’autre côté, l’Opposition radicale qui ne jure que par l’insurrection populaire, pour tenter de renverser les tendances. Où se situe Mbikayi dans cet environnement politique ? Il répond : «Nous, comme centristes, nous demandons aux uns et aux autres, de mettre un peu d’eau dans leur vin. Parce que dans tous les cas, ils vont toujours aboutir à ce que nous voulons. Je veux d’abord souligner que tout citoyen a le droit de résister à une dictature. Nous souhaitons que nous cessions d’utiliser nos populations comme des appâts pour accéder au pouvoir. On a eu à le voir dans le passé. On agit, des gens sont dans la rue, il y a des morts. Et, en fin de compte, le pouvoir est toujours en place. Moi, je veux conseiller à ceux qui souhaitent la force au détriment du dialogue d’épargner nos populations et, carrément, de se préparer au dialogue. On a assez perdu des vies humaines, on a eu trop de casses».
Il a, au passage, souligné la souplesse du MLC qui aurait rencontré, tout de même le Facilitateur. Pour lui, c’est un bon signe que les autres qui hésitent encore, suivront tôt ou tard.
Bitakwira et la thèse de deux fous
Pour sa part, l’Honorable Justin Bitakwira, Coordonnateur de l’Opposition Citoyenne, a déclaré que leur groupe n’encourage pas le viol de la Constitution. Bitakwira affirme ne pas militer pour un glissement des mandats. Notre dynamique, affirme-t-il, semble être un troisième œil pour la République. « Parce qu’au fait, il y a deux camps majeurs qui s’affrontent dans notre pays. Il s’agit de la majorité et de l’opposition. Et, je n’ai jamais cessé de le dire. Il y a deux instincts qui s’affrontent. Le premier instinct est celui de la majorité qui tient, à tout prix, et quels que soient les moyens, à conserver le pouvoir. Le deuxième instinct, c’est celui de l’opposition radicale qui tient aussi à conquérir le pouvoir. Et, je me suis dit que notre dynamique se trouve entre deux fous. Deux fous qui croient, chacun, qu’il est sur la meilleure voie. Chacun croit que sa folie est plus positive que celle de l’autre. Nous, par contre, nous disons : «la RDC, c’est notre bien commun. Nous disons aussi à l’opposition radicale qu’elle aussi n’a pas besoin de brûler la case. C’est la raison pour laquelle notre opposition s’est décidée de trouver le juste milieu qui est celui du dialogue ». Pour cet élu de la circonscription d’Uvira, le dialogue va aboutir à des élections apaisées, crédibles et transparentes. « Nous n’allons pas au dialogue avec l’objectif de faire la gloire du Président Kabila. Nous sommes là pour apporter notre modeste contribution pour que ce pays reste stable et que ce pays joue le rôle qui est le sien sur le continent africain. Nous avons l’idée de laisser un pays stable à nos descendants. Voilà pourquoi, nous allons concilier les deux extrêmes. Je vous promets que l’opinion finira par basculer à notre idée. Nous sommes comme une termite et nous allons faire tomber le baobab. Le baobab dont nous parlons, ici, c’est le chaos prémédité, en même temps, par la majorité et l’Opposition radicale».
Dialogue, Ruberwa parle de la constance
Azarias Ruberwa, Vice-Président Honoraire de la République et Président du RCD, s’est exprimé en ces termes : « Nous avons voulu faire ce point de presse pour fixer l’opinion pour la constance de nos convictions dans l’espoir que le plus grand nombre au sein de la population congolaise va devoir adhérer à l’idée d’un dialogue sobre, juste, intelligent par rapport aux intérêts de la Nation. Nous avons déjà eu à en parler, l’année passée. Vous savez qu’il y a deux camps majeurs qui s’affrontent avec des idées dans notre pays. Nous avons nos amis de l’opposition, comme nous, mais qui ont une vision différente de la nôtre. Elle est assez forte dans ce sens que si la crise perdure, c’est la rue qui va trancher. Ça, c’est un point de vue. Nous avons un autre point de vue que la majorité qui, lorsqu’on la scrute à la loupe très bien, elle peut conduire jusqu’à la violation de la Constitution ». Azarias Ruberwa ajoute : « Nous n’avons pas de jugements, outre mesure, à leur coller. Mais, quand vous entendez les autres se juger, vous avez l’impression que la majorité dit à l’opposition radicale : ‘’vous voulez acquérir par la rue, il y aura des casses. C’est la catastrophe’’. ‘’Vous avez également l’opposition radicale qui dit de la majorité, qu’elle veut confisquer le pouvoir, changer la Constitution, remettre tout à la case départ et demeurer indéfiniment au pouvoir’’. Entre les deux thèses, se situe l’Opposition pro-dialogue. « Entre les deux extrêmes, il est possible de ne pas être égoïste, de ne pas voir les intérêts des individus et des partis. Mais, plutôt, de privilégier les intérêts de la nation et concevoir sagement des solutions qui ne vont pas dans le sens de deux extrêmes».
Ruberwa atteste que si le dialogue est tenu dans le respect des règles bien définies, une crise majeure sera, certainement, évitée au pays.
« C’est, en fait, un procès contre le pouvoir dans un premier temps. Comment on n’a pas pu organiser les élections jusque-là ? Nous n’avons aucun intérêt à casser tout ce qu’on a construit ensemble».
Azarias Ruberwa a rencontré Edem Kodjo qui se serait montré très attentif à la thèse soutenue par le groupe de cinq personnalités.
Mushi Bonane et les consultations élastiques
Le dernier à prendre la parole, c’est Mushi Bonane, patron de l’Opposition Patriotique et Républicaine. Il déclare : «Je voudrais me rallier à la position du groupe en ce que nous approuvons la désignation de M. Edem Kodjo comme Facilitateur de ce dialogue tant entendu. Au niveau de notre plateforme, l’Opposition Patriotique Républicaine (OPR), nous avons des motifs particuliers d’être satisfaits de cette désignation. C’est depuis toujours que nous avions compris le sens, l’importance et même l’avantage de la vision du Chef de l’Etat en ce qui concerne le dialogue. On pouvait même penser que nous étions pro-pouvoir, outre mesure. Mais, non. Ce que nous avions compris à l’époque, c’est l’intérêt du peuple congolais et la solution idoine qu’il fallait. Depuis lors, nous avions fustigé la tenue des consultations élastiques. Nous avons fustigé aussi l’idée d’un dialogue psychologique. Nous avons fustigé, en plus, le retard que prenait la mise en place du Comité Préparatoire. Nous avons fustigé, enfin, le retard que prenait Ban Ki-moon, le SG des Nations Unies, pour désigner un Facilitateur».
La Pros.