(Aux bons soins de Monsieur KALEV, AG de l’ANR, Emissaire spécial du Chef de l’Etat.)
Concerne : Position du MLP sur la tenue du Dialogue politique.
I. CONTEXTE
En date du samedi 09 mai 2015, nous avons été reçus, en compagnie d’autres responsables de partis politiques de l’opposition, par Monsieur KALEV, Administrateur Général de l’ANR agissant en qualité d’émissaire du Chef de l’Etat. Ce dernier nous a transmis, comme il l’a fait avec d’autres responsables politiques avant nous, un message du Chef de l’Etat dans lequel il a accepte l’idée d’un dialogue politique, et nous demande de lui faire parvenir des propositions sur les termes de référence de ce forum politique. Il est également question, dans le même message du Chef de l’Etat, que nous donnions notre point de vue sur le calendrier électoral global, ainsi que sur tout autre point d’actualité politique que nous jugerions important de partager avec lui.
Nous présentons dans les lignes qui suivent la position du MLP sur toutes ces questions, en guise de contribution à une sortie de crise qui soit conçue et mise en œuvre dans le seul intérêt des populations congolaises et de la démocratie, et à la satisfaction de tous les amis du Congo qui ont, à quelque titre que ce soit, besoin que le Congo retrouve une stabilité propice à tous les intérêts dignes de protection.
II. OBSERVATIONS LIMINAIRES
-Le MLP réaffirme sa position selon laquelle, actuellement, la question politique la plus importante en RDC c’est le débat sur l’intention attribuée au Président de la République de s’octroyer un troisième mandat, en violation des dispositions pertinentes de la Constitution de la République.
-La question de la limitation des mandats présidentiels étant clairement réglée par la constitution, il n’y a aucune nécessité d’organiser un quelconque dialogue à ce propos. Le peuple attend plutôt, en guise d’apaisement, que le Chef de l’Etat se prononce clairement en faveur du respect de la constitution.
-Tout retard causé au cycle électoral est de l’entière responsabilité de la majorité au pouvoir qui, pour des raisons inavouées, n’a pas manifesté de volonté politique ferme d’assurer le renouvellement du mandat et de la légitimité des membres de principales institutions politiques du pays.
-De ce fait, cette majorité au pouvoir, fautive de n’avoir pas garanti l’organisation d’élections libres et démocratiques, ne devrait pas prendre le devant pour prétendre conduire toute concertation ou dialogue à tenir entre la classe politique en vue de redresser les conséquences de leur propre échec, sinon de leur stratégie antidémocratique de conservation du pouvoir.
-Si le genre de dialogue que l’on nous propose aujourd’hui suffisait à régler les problèmes du pays, on en aurait même plus besoin parce qu’il y a à peine quelques mois s’est tenu, sous l’égide du même Chef de l’Etat, un dialogue baptisé « concertations nationales ». Ces concertations ont accouché de résolutions et même d’un gouvernement chargé de les appliquer, sans compter d’importants moyens financiers engloutis. Moins d’une année après, on nous propose de revenir à la case départ ! Que cherchons-nous, en définitive ?
III. Termes de référence du dialogue
Par son émissaire, le Chef de l’Etat nous demande, comme à tous les autres partis ou regroupements politiques consultés, de lui communiquer notre proposition de termes de référence (objet, format, durée, période) du dialogue qu’il propose.
Le MLP s’étonne de constater que le Chef de l’Etat suggère d’organiser un dialogue avec la classe politique sans avoir défini au préalable les termes de référence d’un tel dialogue. Quant bien même la tenue de ce dialogue lui aurait été réclamée par certains, comme cela nous a été rapporté par son émissaire, ces derniers auraient dû faire accompagner leur réclamation d’une proposition de termes de références que le Chef de l’Etat, en acceptant leur idée, devrait assumer pour en discuter éventuellement avec d’autres parties. Toutes ces considérations nous rendent sceptiques quant à la sincérité et à la consistance d’un tel dialogue, et surtout à sa capacité de résoudre les vrais problèmes qui se posent actuellement au peuple congolais.
IV. Ière phase du dialogue : consultations directes des partis politiques par le Chef de l’Etat
D’après l’émissaire du Chef de l’Etat, ce dernier envisage d’entamer immédiatement, dès la semaine du 11 au 17 mai 2015, des consultations directes avec les partis politiques. Rien que par la rapidité de la succession de ces consultations on peut aisément préjuger du caractère « pure formalité » de l’ensemble de la démarche actuelle, stratégie bien connue de quelqu’un qui cache son jeu.
V. TENUE DU DIALOGUE PROPREMENT DIT
Pour toutes les raisons évoquées en liminaire, nous ne voyons, honnêtement, ni l’opportunité ni l’intérêt d’un dialogue politique en ce moment précis. C’est plutôt l‘organisation des élections qui constitue la priorité des priorités. Il s’agit d’éviter le chaos consécutif à l’illégitimité de tout le personnel politique, comme c’est déjà le cas depuis bien longtemps, des députés provinciaux, des gouverneurs de province et des sénateurs.
Ce n’est un secret pour personne que les défenseurs acharnés du dialogue politique caressent l’idée l’aboutir à transition politique pour un partage de pouvoir, ou mieux des postes ministériels, en dehors de la constitution actuelle de la République. C’est pour cette raison que le MLP n’est ni pour le dialogue ni pour le glissement, ni pour la transition.
Mais si, pour tout autre nécessité, il devrait y avoir une transition politique, la demande nationale est de voir cette transition être conduite par des personnalités congolaises autres que les membres de l’actuelle majorité présidentielle. En effet, ces derniers sont responsables de la crise politique actuelle pour avoir manqué à leur devoir d’organiser des élections crédibles, conformément aux échéances prévues par la constitution et les lois du pays. Il s’agit notamment de l’actuel Président de la République et de ses Premiers ministres successifs.
Autant on n’a pas besoin d’un dialogue pour organiser les élections prévues par la constitution, autant ce qui est plus attendu du Chef de l’Etat, dans le contexte politique actuel, c’est un message, à travers un discours d’apaisement. Par ce message le Chef de l’Etat devrait garantir le respect de la constitution du pays en vue de rassurer l’opinion tant national qu’international au sujet des tentatives de violation de la constitution menées par a famille politique en vue de lui assurer un troisième mandat contre les dispositions de la constitution de la République.
Ce discours d’apaisement devrait être accompagné d’actes de bonne foi telle que la libération des prisonniers politiques et d’opinion, la réouverture des médias privés fermés illégalement par le pouvoir, la garantie de l’accès de l’opposition aux médias publics, ainsi que la garantie du respect des droits humains en général.
VI. CALENDRIER ELECTORAL GLOBAL
Lorsque nous avons demandé la publication d’un calendrier électoral global, ce n’était pas pour qu’on nous sorte, avec jactance, un calendrier indigeste, irréaliste et porteur de germes de glissement pour l’échéance constitutionnelle qu’est l’élection présidentielle de septembre 2016. A ce propos, le MLP a eu à publier en son temps un document qui présente l’ensemble de sa position, y compris la question du découpage territorial.
En tout état de cause, le MLP note, dans le chef de la majorité au pouvoir, le manque de volonté politique d’organiser les élections comme cela est prévu jar la constitution de la république. On ne peut en penser autrement lorsqu’on constate que depuis 2012 jusqu’au premier trimestre 2015, le gouvernement n’a financé la CENI qu’à hauteur de l5% des crédits autorisés, pendant que dans le même temps, la présidence de la République et la primature affichent une consommation de crédits marquée par un dépassement budgétaire qui se chiffre autour de 200%.
Il en est de même de l’installation de nouvelles provinces en vue des élections provinciales prévues pour octobre 2015. Les commissions instituées par décret du premier ministre à cet effet ont été installées le 18 avril dernier et devaient rendre leur rapport 30 jours plus tard. Jusqu’à ce jour, aucune de ces commissions n’a débuté son travail, faute de moyen financiers et logistiques appropriés. Or, d’après la loi de programmation déterminant les modalités d’installation de nouvelles provinces, le processus d’installation de nouvelles provinces devaient se déclencher 15 jours après le dépôt des rapports des commissions. Avec le retard dans la mise en œuvre de ces commissions, cette disposition légale a déjà été violée.
VII. RECOMMANDATION
Le MLP recommande au Chef de l’Etat d’écouter le peule et de se réconcilier avec lui en rejetant ce dialogue. A la place, qu’il se prononce, à travers un message, devant le peuple qui attend qu’il se range du côté du respect de la Constitution, au sujet de la limitation constitutionnelle des mandats présidentiels.
C’est la meilleure voie pour la consolidation de a démocratie et de l’Etat de droit que toute la classe politique et le peuple congolais tout entier ont inaugurée sous son égide avec les élections historiques de 2006.