Prévue le 30 août 2015, l’élection des gouverneurs et des vice-gouverneurs de provinces est reportée au 10octobre 2015. La date limite pour le dépôt des candidatures est quant à elle prolongée au 21 août prochain. Justifiant le réaménagement du calendrier de ce scrutin, la Ceni a mis en exergue le nombre incroyablement bas des candidatures enregistrées à la date limite d’hier mardi 2 juillet. En effet, sur plus de 90 formulaires retirés par les différents prétendants dont une cinquantaine par les partis et regroupements politiques, seuls six formulaires ont été déposés.
On croirait que ces postes des plus stratégiques et juteux n’attireraient pas les acteurs politiques.
L’annonce de ce deuxième report des élections des gouverneurs et vice-gouverneurs des 15 nouvelles provinces issues du découpage après la mise en veilleuse par la Ceni du calendrier publié par le vice premier ministre en charge de l’intérieur, Evariste Boshab, a surpris plus d’un observateur. La prolongation va jusqu’à moins de trois semaines des élections prochaines provinciales prévues, elles, le 25 octobre 2015, dont les assemblées provinciales éliront de nouveaux gouverneurs (définitifs) trois mois après. Il ne faut pas porter des lunettes pour s’apercevoir que des divergences persisteraient encore au sein de la Majorité présidentielle pour la tenue de ce scrutin des “gouverneurs de provinces intérimaires”.
Des sources rapportent, en effet, que certains faucons de la MP entreprendraient des démarches pour convaincre le Chef de l’Etat de nommer les gouverneurs intérimaires à la tète de ces 15 nouvelles provinces au lieu de les faire élire par les actuelles assemblées provinciales, ce qui constituerait une grave violation de la constitution. D’autres dignitaires de la MP proposeraient la nomination des hauts fonctionnaires pour assurer les fonctions des gouverneurs dans ces nouvelles provinces. D’où la cacophonie observée sur cette question entre le gouvernement et la Ceni et les fortes pressions exercées sur les dirigeants de la centrale électorale pour ne pas tenir ce scrutin.
La question mérite qu’on s’y attarde en interrogeant la loi. Le président de la République, au regard de la loi, est-il habilité à nommer un gouverneur de province ? Un juriste interrogé est formel à ce sujet. Il conseille vivement aux faucons de la MP qui tentent de monter ce coup politique d’y renoncer. Puisant dans la constitution et dans les lois, il ne voit aucune possibilité pour une nomination des gouverneurs de provinces évoquant, le principe de la libre administration des provinces garanti par la constitution (articles 3, 195 et 198 de la constitution et la loi n° 08/12 du 13 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces.)
Interprétant ces dispositions constitutionnelles et légales, il soutient qu’en provinces, seuls l’assemblée provinciale et le gouvernement provincial exercent le pouvoir d’état et sont habilités à définir et à conduire les politiques publiques et les matières dévolues par la constitution aux provinces. Ces institutions provinciales, ajoute-t-il, ne peuvent être composées et fonctionner que selon les modalités et les règles définies par la constitution et la loi portant libre administration des provinces.
Catégorique, notre interlocuteur affirme qu’il ne peut être institué aucun organe législatif ou exécutif provincial de toutes autres natures et statut que ceux prévus par la constitution et la loi sur la libre administration des provinces. Il ajoute qu’à l’instar des députés provinciaux qui les élisent, les gouverneurs et les vice-gouverneurs ne peuvent être que les élus en vertu de l’article 198 alinéa 2 de la constitution. Les gouverneurs et les vice-gouverneurs sont des cadres politiques et non des fonctionnaires. “Le constituant et le législateur congolais n’ont prévu aucune possibilité de nomination des gouverneurs et vice-gouverneurs bu de leur remplacement, même à titre intérimaire par des fonctionnaires”, tranche-t-il.
De même, précise ce bouillant juriste, spécialiste en droit constitutionnel, l’ordonnance d’investiture des gouverneurs et des vice- gouverneurs par le président de la République ne peut valoir leur élection ni la remplacer. Elle ne consacre que l’entrée en fonction du gouverneur et de son adjoint. Bien plus, dit-il, en se référant des dispositions de l’article 81 de la constitution, les gouverneurs et les vice-gouverneurs ne figurent pas dans les catégories des agents publics relevant de la nomination du pr4sident de la République.
Dans l’actuel climat politique du pays déjà tendu, la MP n’a aucun intérêt d’envenimer la crise politique qui profile à l’horizon sur cette question de l’élection des Gouverneurs, alors qu’elle a toutes les chances de remporter ce scrutin dans la grande majorité de nouvelles provinces.
Par FKB