
Ecoles publiques, privées et consulaires fermées, marchés et petit commerce tournant au ralenti, entreprises publiques et privées en service minimum. Voilà l’image qu’on a observée à Kinshasa et dans les grandes villes de la RDC, hier mardi 16 février 2016. Répondant à l’appel de l’Opposition qui a appelé à une ville morte, la population a préféré se terrer à la maison. Pendant ce temps, le PPRD, le parti présidentiel, qui avait promis de manifester le même jour, a renoncé en dernière minute à son projet. Le 16 février 2016 est le prélude d’une année à rebondissements.
Le mardi 16 février 2016 a été une journée exceptionnelle. Dans la ville de Kinshasa, on s’est cru un jour de dimanche avant les différents cultes. Rien d’un jour ouvrable. A Kinshasa, capitale grouillant d’activités, tout a tourné au ralenti.
Aucune école publique, privée ou consulaire n’a ouvert ses portes aux écoliers. Les marchés, même celui de la Gombe, communément appelé Zando (le plus grand de la ville), n’a pas affiché complet. Sur l’avenue de commerce, les grands magasins sont restés fermés. Dans les entreprises publiques, c’est sous les menaces d’une mesure disciplinaire que quelques fonctionnaires se sont présentés à leurs lieux de travail. Juste pour signer leur présence. Et même là, ce sont des policiers qui s’étaient improvisés agents de pointage. Mais, dans les entreprises privées, l’arrêt était total.
Bref, le mardi 16 février 2016, il y avait une ambiance de deuil dans la ville. Même cas de figure dans d’autres villes de la RDC. A Matadi, Goma, Kananga, Bukavu, Goma, Lubumtashi et ailleurs, le mot d’ordre de la ville morte a été largement suivi. Que dire ? Sinon, l’Opposition a réussi son coup. Si bien que, même le PPRD, le parti présidentiel, qui promettait depuis toujours de marcher le 16 février 2016, a dû au dernier moment renoncer à son projet. Motif : l‘Hôtel de ville de Kinshasa n’aurait pas accordé son autorisation à cette manifestation publique (sic !). « L’hôtel de ville de Kinshasa nous a refusé l’autorisation; la marche (…) n‘aura pas lieu», a déclaré à l’AFP Henri Mova Sakanyi, secrétaire général du PPRD.
En outre, interrogé par l’AFP, le ministre de l’Intérieur de la ville province de Kinshasa, Emmanuel Akweti, a affirmé que le gouvernement de la capitale n’avait « autorisé aucune manifestation demain (mardi) sur toute l’étendue de la ville de Kinshasa » et assuré n’avoir reçu aucune notification de manifestation de la part de qui que ce soit.
Le recul du PPRD est un mauvais signe qui ne maquera pas d’influer sur la stratégie que tente de mettre en œuvre la Majorité présidentielle pour contourner le verrou constitutionnel de l’article 220, Serait-on déjà en train de comprendre les signes de temps dans les rangs de plus durs de la Majorité ? Dans tous les cas, l’hypothèse n’est pas exclue.
TOU RNANT DÉCISIF
Le plus évident est que la journée ville morte du 16 février 2016 marque un tournant, très décisif, dans la poursuite du processus électoral. La Majorité a certainement mesuré la capacité de l’Opposition à mobiliser. Cette réussite conforte aussi l’adhésion de la population à la position que défendent les leaders de l’Opposition.
La Majorité sait d’ores et déjà à quoi s’en tenir. Ignorer la portée de la journée du 16 février 2016 dans sa stratégie serait une grave erreur d’approche qui pourrait lui être fatale.
A noter que l’appel à la journée ville morte, en commémoration de la marche des chrétiens du 16 février 1992, n’a été lancé qu’il y a une semaine par une frange importante de l’opposition. Dans son message, l’Opposition, qui appelait plutôt à une journée pacifique, invitait la population à ne pas vaquer à ses occupations, pour marquer son désaccord à la volonté manifeste de la Majorité de faire glisser le cycle électoral.
Auparavant, la Cenco avait promis il y a quelques mois de célébrer la journée du 16 février 2016 par une série de manifestations. Pressée de toute part, la Cenco est revenue sur sa décision, craignant une récupération politique. Ce n’est pas pour autant que l’Opposition a désarmé. Bien au contraire, celle-ci a réussi à associer la population à la célébration de la journée martyre du 16 février qui avait vu, en 1992, le président Mobutu céder la pression populaire en rouvrant la Conférence nationale souveraine (CNS).
La journée du 16 février 2016 inaugure un nouveau départ. Gare à ceux qui tenteraient de se mettre en travers. Sans doute, la roue de l’histoire, qui tourne à gran.de vitesse, se chargera de leur sort. Le mardi 16 février 2016, l’ensemble de la population de la RDC a lancé un message très audible. Il se résume en un mot : l’alternance démocratique au sommet de l’Etat.
Par LE POTENTIEL