André Mbata Mangu (AMB), Professeur ordinaire à la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa et Professeur dans plusieurs autres universités de renom (Université d’Afrique du Sud, Université de Paris Sud…) répond ici aux questions de C-News sur les récents développements politiques au Burkina Faso où Blaise Compaoré a perdu le pouvoir et renoncé aux 12 mois qui lui restaient encore à la présidence en procédant au forcing pour faire réviser l’article 37 de la Constitution par l’Assemblée nationale où il jouissait d’une majorité pour se donner une troisième mandat. Comment allez-vous ?
Avez-vous appris la démission et la fuite de Blaise Compaoré?
Je me porte bien et même très bien. J’ai effectivement suivi la fuite de Blaise Compaoré
ou son « Hégire ». L’homme se croyait incontournable, né pour gouverner et régner pour toujours à cause de sa « rectification de la révolution », de quelques écoles, ponts, routes, hôpitaux et hôtels qui étaient la version de sa « politique de modernité » au Burkina Faso. Sourd à tous les appels, enivré par les louanges et les danses de nombreux flatteurs de sa propre majorité présidentielle, aveuglé par les fanfares militaires et les nombreux passages des troupes en revue, encensé au quotidien par des journalistes et des pasteurs pratiquant un « journalisme et un évangile de la honte » et qui lui avaient promis l’éternité au pouvoir, Compaoré avait perdu tout sens de l’humain et de l’humanité.
Je félicite le peuple béninois qui lui a fait comprendre que le costume, le pouvoir, les honneurs et les nombreuses richesses accumulées pendant les 27 ans de sa présidence n’avaient pas fait de lui un superman et qui l’a forcé de « dégager » et de libérer Kossyam, le palais présidentiel dont il n’était qu’un locateur. C’est une très bonne nouvelle pour la démocratie en Afrique.
Connaissez-vous le Burkina Faso et l’ancien Président Compaoré ?
Bien sûr que oui. Je connais le Burkina Faso. J’ai visité Ouaga à plusieurs reprises. Quant à Compaoré, je le connais aussi bien. Il est arrivé au pouvoir par un coup d’Etat et l’assassinat de celui que l’on croyait son meilleur ami, le Capitaine Thomas Sankara. Avec le soutien des occidentaux, en particulier celui de la France, et de ses nombreux tambourinaires recrutés dans toutes les couches de la société burkinabè, il était resté au pouvoir pendant 27 ans et personne n’avait cru même un jour avant sa chute qu’il allait entrer si honteusement dans l’histoire. Bonne leçon pour plusieurs dirigeants africains qui se trompent d’époques et se croient indispensables. Comme eux, il disait n’avoir pas de dauphin et ne voulait même pas entendre parler d’un dauphin, fut-il son propre
frère François Compaoré. Il croyait que le Burkina Faso n’existait que par et pour lui. Terrible erreur comme il l’a appris très tardivement la semaine dernière. L’Histoire sanctionne impitoyablement ceux qui se fient à eux-mêmes, aux cris des sirènes de leurs convois et aux louanges ou aux « Te Deum » de leurs thuriféraires pour gouverner par défi et naviguer dans le sens contraire. Pauvre Compaoré.
Mais, Compaoré vous connaissait-il ? Le connaissiez- vous ? L’aviez-vous rencontré ?
Vous savez, ce n’est pas une fierté de dire que l’on était connu ou familier d’un dirigeant
autoritaire. Cela se ressent parfois comme une honte. C’est l’heure des reniements
qui a sonné au Burkina Faso. Au Congo, elle avait sonné chez les anciens courtisans de Mobutu lors de la prise de pouvoir par Laurent-Désiré Kabila et son « groupe d’aventuriers » de l’AFDL. Elle sonnera bientôt pour les aventuriers actuels qui sont enivrés du lait des fermes présidentielles sur le continent. Je ne sais pas si Compaoré me connaissait même si je l’avais déjà rencontré lorsqu’il était au sommet de sa gloire. Le contraire ne me surprendrait pas. La plupart des despotes ont des oreilles, mais ils n’entendent pas; ils ont des yeux mais ils ne voient pas ; ils ont des sens, mais ils ne sentent pas leur fin venir. Ils ne regardent jamais dans les yeux ceux qu’ils sont toujours prêts à écraser. Même quand ils vous tendent la main, ils ne vous regardent pas et ne peuvent même pas vous reconnaitre la seconde qui suit. Ils opèrent comme des robots, des monstres. Je n’ai jamais salué de ma main un Président congolais et ne le regrette pas. Quand à Compaoré, je ne l’avais pas vu à la télévision, mais je l’avais salué en le regardant dans les yeux sans être hypnotisé comme cela arrive souvent à de nombreux intellectuels africains qui s’approchent de leurs présidents. Pendant près de 30 minutes, ce n’est pas moi qui l’écoutais, mais c’est lui qui écoutait le professeur congolais parler de la vie après la présidence lors du 7eme Forum africain sur la gouvernance qui se tenait dans sa ville-capitale et je pense sans le regretter qu’il devait au moins me connaitre.
Comment devrait-il vous connaitre, un président qui rencontrait plusieurs milliers de personnes ?
D’accord, mais je pense que même s’ils rencontrent plusieurs milliers de personnes, les dirigeants devraient s’intéresser davantage aux personnes qui leur disent la vérité dans leur propre intérêt et ne recherchent ni leurs pouvoirs, ni leur or ni leur argent. Compaoré devait se souvenir de moi en raison de ce qui s’était passé à Ouagadougou
en octobre 2007. Il y réfléchit probablement en ce moment où il s’est réfugié à Yamousoukro, près de la Basilique où il ne recevra aucun miracle pour lui permettre
de reprendre le pouvoir.
Que s’était-il donc passé à Ouaga en octobre 2007, il y a de cela 7 ans ?
Le 7eme Forum africain sur la gouvernance y avait été organisé par le PNUD et la Commission économique pour l’Afrique du 24 au 26 octobre 2007. Plus de 300 participants venant de tous les pays africains y étaient conviés. Le Président Paul Kagamé du Rwanda et l’ancien président mozambicain Joaquim Chissano y prenaient également part. Consultant du PNUD, j’étais l’unique universitaire africain sélectionné pour y présenter une communication sur le respect des constitutions et la vie après la présidence en Afrique lors de la séance d’ouverture. Pour la première fois de ma vie, je m’étais retrouvé à la même tribune officielle pris en sandwich entre le Président Compaoré, président de séance, et l’ancien président Chissano avec qui j’avais voyagé dans le même avion et qui devait commenter ma communication. J’avais alors terminé par un conseil à tous les Présidents africains, y compris Compaoré et Kagamé qui semblaient me suivre religieusement : « Il y a une vie après la présidence qui peut même être meilleure que celle que l’on menait en tant que président. Il faut alors quitter le pouvoir avant que le pouvoir ne vous quitte.».
Quelle était alors la réaction de Compaoré?
Sa réaction était propre à tous les dirigeants autoritaires. Dans ses remarques comme modérateur, il rappelait qu’il était Président par la volonté de son peuple qui l’avait très massivement élu et plusieurs fois réélu. Celui qui se croyait aimé de son peuple à cause de sa « révolution de la modernité », de la « stabilité » apportée au pays et des progrès réalisés par son gouvernement sur le plan « macroéconomique » vient d’être contraint par le même peuple de prendre la poudre d’escampette comme un vulgaire bandit.
C’est même allé trop vite ?
Oui, aussi rapidement qu’il s’était retrouvé à la tête de l’Etat, moins de trois heures
après son coup d’Etat. Les marches des palais peuvent être longues à grimper mais il est plus facile d’en descendre. Revoyons le film des évènements : alors qu’il lui reste encore 12 mois de mandat, il reste sourd à tout appel interne et international pour dialoguer avec son peuple et ne pas utiliser l’Assemblée nationale où il dispose d’une majorité pour changer l’article 37 qui lui interdit un troisième mandat. Le matin du jeudi 30 octobre 2014, il n’écoute personne d’autre que ses thuriféraires et tente de faire un forcing en faisant convoquer une session de l’Assemblée nationale pour réviser l’article 37.
Avant midi, sans demander une quelconque autorisation de manifester et sans même faire une simple déclaration comme on le ferait à Kinshasa, Brazzaville, Bujumbura ou Kigali, plusieurs milliers de Burkinabès se jettent dans les rues de Ouaga en direction du siège de l’Assemblée nationale pour interdire aux Députés de siéger. Plusieurs Députés de la majorité présidentielle qui passaient leur temps à applaudir Compaoré et ses ministres et s’apprêtaient à voter la révision de l’article 37 sont sauvagement battus à l’Hémicycle qui est pillé, ce qui rend impossible la session du Parlement. Quelques temps après, le Ministre de communications et médias, porte-parole du gouvernement
et le « perroquet national burkinabè » annonce le retrait du projet de loi de révision constitutionnelle pendant que les manifestants s’en prennent à ses biens dans sa ville natale. Après l’Hémicycle, ils se dirigent vers Kossyam, le palais présidentiel, et demandent à son locataire de dégager sans préavis. Les éléments de la garde présidentielle qui auraient dû mettre la main sur la gâchette et tirer à bout portant comme ce serait le cas dans plusieurs capitales africaines sortent par contre
sans armes et les mains en l’air pour dialoguer avec le peuple et l’assurer que l’armée et la police étaient de son côté comme étant l’armée et la police du peuple et non celles d’un homme. En quelques heures seulement, Compaoré qui était encore Président la veille et même le matin cesse de l’être et est forcé de fuir le pays. Au même moment disparaissaient dans la nature tous ceux qui lui conseillaient de réviser la Constitution pour se maintenir au pouvoir.
Quelle comparaison faites-vous entre le fameux article 37 de la Constitution du Burkina Faso à la base du départ de Compaoré et l’article 220 de la Constitution de la RDC ?
L’article 37 de la Constitution
burkinabè prévoit que le Président de la République est élu au suffrage universel pour un mandat de 5 ans. Il est rééligible une seule fois. Cet article correspond à l’article 70 de la Constitution de la RDC. Cependant, sous la Constitution du Faso, le nombre et la durée des mandats présidentiels ne sont pas des matières verrouillées comme sous la Constitution de la RDC. Les seules matières verrouillées (Article 165) sont la nature et la forme républicaine du gouvernement, le système multipartiste et l’intégrité du territoire. Au Burkina Faso, toute révision constitutionnelle est faite par référendum à moins qu’elle n’ait été approuvée par l’Assemblée nationale à la majorité des 3/4. Quant à la Constitution de la RDC, comme je l’ai souligné à plusieurs reprises sans être contredit par un seul juriste de la Majorité présidentielle au Congo qui a fait croire le contraire à son autorité morale, cette constitution ne permet ni révision de l’article 220 ni référendum sur les matières verrouillées. Ce qui explique que le Président en fonction devra impérativement dégager en 2016 et que cela n’est pas négociable car si les politiciens peuvent négocier entre eux et se faire des compromis, avec qui va négocier le peuple souverain qui avait approuvé à plus de 80% cette constitution par referendum ? Le Président RD congolais ne peut donc pas recourir au Parlement sous prétexte qu’il y a une majorité pour se donner un troisième mandat pour la simple raison que cet article ne peut en aucun cas être révisé.
Il ne peut pas non plus convoquer le peuple au référendum même sur base d’une pétition d’un milliard de congolais qui n’existent pas encore tout simplement parce que le référendum est prévu sous le Titre VII qui traite de la révision constitutionnelle et qu’ il ne peut donc concerner les matières exclues de toute révision comme le nombre et la durée des mandats présidentiels. Interrogé sur la situation au Burkina Faso par Radio Okapi, le Porte-Parole de la MP, Luzanga Shamandevu, avait répondu : « La situation que traverse actuellement le Burkina Faso ne concerne que les Burkinabès et non la RDC», ce qui revient à dire que les Burkinabès ne sont pas de Congolais. Je ne suis pas sûr que la personne que vous citez et d’autres comme notre « perroquet national » ou les chantres et danseurs de « Kabila Désir » croient réellement en ce qu’ils disent et en tant que patriote congolais j’ai à plusieurs reprises conseillé au Président de se méfier de nombreux flatteurs ou encore de cette multitude d’oiseaux de divers plumages
qui envahissent régulièrement la basse-cour de la ferme présidentielle. C’est vrai que les Burkinabès ne sont pas des Congolais. Toujours est-il que la situation au Burkina Faso n’était pas différente de celle en RDC où la MP veut amener son autorité morale à changer la Constitution pour se donner un troisième mandat. Comme au Burkina Faso, au Congo, au Burundi, ou au Rwanda, les arguments sont les mêmes : préserver la stabilité et la sécurité, parachever la révolution et la modernisation.
Si la situation au Burkina Faso n’avait rien à avoir avec celle de la RDC, on devrait demander déjà Mr Luzanga Shamandevu pourquoi la MP avait envoyé une importante délégation de ses communicateurs qui serait dirigée par l’Ambassadeur Atundu, l’ancien patron des services de sécurité de Mobutu, et qui serait actuellement bloquée à Ouaga en attente d’une évacuation. Je me demande aussi comment l’autorité morale de la MP peut faire confiance à des hommes qui avaient disparu dans la nature après le départ de Mobutu et qui n’avaient pas réussi à sauver son régime après l’avoir mal conseillé.
Vous admettez au moins que les Congolais ne sont des Burkinabès?
Je n’en disconviens pas. Les Burkinabès aussi pensent qu’ils ne sont pas des Congolais
et ils ne veulent même pas être identifiés aux Congolais comme l’exprime la pancarte qu’ils ont fait circuler lors des manifestations de Ouaga et sur laquelle on peut lire: « Blaise Compaoré, si tu veux un 3ieme mandat, va au Congo- Kinshasa, la ou les peuple(s) sont des idiot(s) manipulé(s) par les pasteur(s) et la musique pas ici. (Nous) Nous somme(s) (un) peuple fort ».
Ne pensez-vous pas qu’il s’agit d’une injure à l’endroit du peuple congolais?
C’est effectivement révoltant. Déjà, aucun de pays voisins n’a le moindre respect
pour nous. Nous sommes effectivement un pays merveilleux où on peut dormir païen et se réveiller prophète ou pasteur le lendemain ; un pays où il y a une église, un pasteur, un orchestre, et un musicien à chaque coin de rue ; un pays où des personnes sans aucune formation reconnue peuvent se voir attribuer de grandes responsabilités publiques ; un pays où un petit diplôme suffit pour se présenter comme un économiste maîtrisant la macroéconomie, où n’importe quel griot intellectuel devient analyste politique et où n’importe qui devient juriste et tout juriste ou même des personnes qui ont été refusées à l’université se présentent comme des constitutionnalistes.
Je considère plutôt comme un défi ce message du peuple burkinabè au peuple congolais. C’est à nous de prouver le contraire aux Burkinabès, aux autres peuples d’Afrique et du monde en nous opposant pacifiquement mais farouchement à toute tentative de déverrouillage du nombre des mandats présidentiels prescrit à l’Article 220 et en faisant de sorte qu’ il n’ y ait aucune prolongation du mandat présidentiel devant expirer le 19 décembre 2016. S’ils peuvent réserver aux chantres de la révision ou du changement de la Constitution le même sort ou un sort beaucoup plus détestable que celui qui vient de leur être réservé au Burkina Faso, les Congolais auront réussi leur pari. Par contre, s’ils laissent passer ce que le peuple du Burkina Faso n’a pas su toléré, les Congolais auront donné raison à ces Burkinabès qui les ont qualifiés de « peuple des idiots, manipulé par les pasteurs et la musique » et qui feraient mieux de recevoir Compaoré pour son troisième mandat. J’espère que nous allons leur prouver le contraire et leur démontrer que nous sommes un peuple plus grand et plus fort.
Pensez-vous qu’il y a toujours une vie après la présidence même pour Compaoré ?
Bien sûr. Compaoré vit déjà sa vie après la présidence en Côte d’ivoire où il est malheureusement considéré comme le « virus d’Ebola ». Il risque d’en être ainsi pour ceux qui suivront ses pas partout où ils auront cru trouver refuge.
Ils seront autant détestés que les chauves-souris considérées comme l’un des véhicules de la maladie, reniées à la fois par les oiseaux parce que les chauves-souris volent certes mais ne pondent pas des oeufs et par les autres animaux parce qu’elles sont aussi des mammifères, mais ne volent pas comme eux. La qualité de la vie après la présidence dépend de la manière dont on l’a quittée. Si vous quittez le pouvoir avant que le pouvoir ne vous quitte, c’est sûr qu’il y aura une meilleure vie après la présidence. Mais si le pouvoir vous quitte avant comme dans le cas de Compaoré, on devient tout malheureux.
Voyez comment en un seul jour, Compaoré a annulé au stylo rouge à l’encre indélébile tout le bien qu’il aurait fait pendant ses 27 ans de présidence pour entrer dans l’histoire comme un piètre dirigeant, un despote qui mettaient les habits d’un démocrate avant d’être dénudé en plein jour.
Au regard des évènements du Burkina Faso, puisque vous êtes en route vers le pays de Barack Obama, que pensez-vous du message qu’il avait adressé aux chefs d’Etat africains lors du sommet USA-Afrique pour respecter les limites constitutionnelles de leurs mandats et de nombreuses réactions qui avaient suivi ?
Barack Obama n’avait dit que ce que nous n’avons cessé de répéter depuis plusieurs années sans être compris et malgré les menaces et même des promesses d’argent et de postes de responsabilité pour acheter nos consciences
et nos intelligences et faire de nous des garçons de course ou des porte-parole
du pouvoir comme cela est déjà arrivé à plusieurs d’entre nous. En appelant au calme au Burkina Faso, les Etats-Unis ne faisaient que se moquer de Compaoré qui avait assisté au sommet et croyait à une blague quand Obama leur demandait de respecter la Constitution. Certains dirigeants africains étaient revenus dans leurs pays en prétendant que le respect de la limitation du nombre de mandats présidentiels était une imposition américaine figurant dans des constitutions étrangères qui nous étaient imposées et qui sont du reste considérées comme « sataniques » par des pasteurs corrompus au service du pouvoir. Le peuple burkinabè vient de démontrer à Compaoré que le constitutionnalisme et l’Etat de droit sont aussi africains. Dans tous les cas, Compaoré n’a pas fui parce qu’on lui a envoyé des parachutistes français ou des marines américains. C’est le peuplé burkinabè avec des mains nues bravant les chars et les canons de la puissante garde présidentielle qui l’a fait partir après avoir marché sur le siège du parlement et le palais présidentiel sans informer au préalable le tambourinaire du pouvoir que Compaoré avait fait élire comme Maire de la Ville de Ouaga et qui a disparu également dans la nature.
Un message aux artisans des violations des constitutions et aux artisans de la monarchie présidentielle en Afrique?
Il n’est pas normal que l’on se dise constitutionnaliste et même juriste si en échange du pouvoir et de l’argent on devrait investir toute son intelligence
pour chercher les voies et moyens de violer la constitution de son pays et de justifier toutes les violations constitutionnelles et toutes les fraudes à la constitution. Il est vrai que malgré certains
démentis politiciens, la RDC est considérée comme étant la capitale mondiale du vol et du viol. Alors que voler n’est déjà pas bon, on adorerait à présent le viol, y compris le viol des lois et de la constitution.
Pourtant, et ce n’est pas Dr Mukwege qui me contredira, pendant qu’on est surpris en
flagrant délit de viol de sa propre mère tout comme du viol de la « mère de la nation » qu’est la constitution, on ne peut pas se permettre de convoquer le peuple pour se justifier en disant : « soyez calmes et ne vous mêlez pas de mes affaires parce que ‘violer sa propre mère, c’est aussi la respecter’ ».
Pour terminer avez-vous un conseil à donner à d’autres Chefs d’Etat africains
qui veulent tripatouiller leurs constitutions et se pérenniser au pouvoir ?
Le même conseil que j’avais donné à Compaoré chez lui à Ouagadougou en 2007: Madame et Messieurs, respectez la constitution et laissez le pouvoir avant que le pouvoir ne vous quitte car il y a une vie après la présidence. Vous n’êtes que des locataires des palais présidentiels qu’il faudra dégager lorsque le bail arrive à son terme. Le moment venu, ne nous inventez pas des « histoires », ne faites pas faire des livres ni fabriquer des prophéties, ne commandez pas non plus des pétitions. Faites un grand discours de remerciement à votre peuple en lui précisant ce que vous auriez accompli et aussi en demandant pardon
pour vos nombreuses promesses non tenues et le tort que vous avez fait à vos compatriotes. Je suis sûr que ce peuple vous sera reconnaissant
et vous pardonnera tout en vous assurant une vie heureuse après la présidence.
Le contraire serait un suicide politique.
C’est votre propre vie, votre propre histoire. Cessez d’écouter les thuriféraires et les tambourinaires intellectuels,
religieux, civils ou militaires de votre pouvoir qui vous abandonneront le moment venu. A bon entendeur, salut.
De Paris, correspondance particulière