Les militants du mouvement Lutte pour le changement (Lucha), basé dans l'est de la République démocratique du Congo, ont appelé mardi le peuple congolais à "défendre sa liberté", alors que plusieurs jeunes gens appelant à une meilleure gouvernance sont détenus au secret depuis plus de quinze jours.
Lucha "appelle le Peuple Congolais à ne pas céder ni à la peur, ni aux intimidations, ni à la propagande et à la désinformation, mais au contraire à défendre sa liberté d’opinion, d’expression, d’association et de manifestations pacifiques, si gravement menacée", a déclaré Luc Nkulula wa-Mwamba lors d'une conférence de presse avec cinq autres militants de Lucha à Goma, capitale de la province du Nord-Kivu (est).
Le 15 mars à Kinshasa, les forces de l'ordre ont arrêté une trentaine de personnes, parmi lesquelles plusieurs militants congolais - dont Fred Bauma, de Lucha - ainsi que trois activistes Sénégalais et un Burkinabè qui participaient à une rencontre sur la bonne gouvernance et la démocratie en Afrique, parrainée en partie par les Etats-Unis.
Le 15 mars au soir, des journalistes et un diplomate américain ont été relâchés. Le 18 mars, les Sénégalais et le Burkinabè ont été expulsés et, le lendemain, six rappeurs congolais ont été libérés. Il reste au moins six militants encore détenus, selon Me Sylvain Lumu, leur avocat, qui a porté plainte contre X pour "arrestation arbitraire".
Lucha entend lancer samedi l'action "filimbi" (coup de sifflet, en swahili) pour demander la libération des militants et le "respect des libertés publiques en RDC à l’approche des élections", a annoncé M. Nkulula wa-Mwamba. Chaque jour jusqu'au 15 avril, les participants devront symboliquement "siffler" ou "faire du bruit" à 18h00 heure de Kinshasa (17h00 GMT) et pendant 5 minutes.
"Nous ne sommes pas un parti politique mais plutôt un mouvement citoyen qui milite pour le changement", a tenu à préciser M. Nkulula. "Nous, nous sommes là pour parler à la place" des sans voix, comme "ces femmes vendeuses de braises, de haricots (dans la rue) qui n'ont pas d'espace pour parler".
Les arrestations du 15 mars ont eu lieu dans un climat politique tendu à l'approche d'échéances électorales importantes.
Le président Joseph Kabila est à la tête de l'État depuis 2001 et la Constitution lui impose d'abandonner ses fonctions fin 2016 mais l'opposition accuse son camp de comploter pour lui permettre de se maintenir au pouvoir au-delà du terme de son deuxième mandat, fin 2016 - une perspective qui divise même au sein de la majorité.
En janvier, 27 à 42 personnes, selon les sources, ont été tuées (essentiellement à Kinshasa) lors de troubles survenus dans plusieurs villes du pays à l'occasion de l'examen d'une révision de la loi électorale. Promulguée depuis lors, la nouvelle loi risque, selon ses détracteurs, d'entraîner un report de la prochaine présidentielle.