La conversation téléphonique entre les présidents américain Barack Obama et congolais Joseph Kabila, intervenue le mardi 31 mars, et dévoilée à l’opinion tant nationale qu’internationale le mercredi 01 avril 2015, a longuement flirté avec le « poisson d’avril » avant d’épouser les contours de la réalité. Commenté en sens divers, cet entretien a confirmé une constance : la préoccupation de Washington de voir la RDC connaître des « élections crédibles et pacifiques », organisées « en temps voulu », « qui respectent la Constitution et protègent les droits de tous les Congolais ».
L’autre message délivré par le patron de la Maison Blanche avait trait à « l’héritage du président Kabila, qui a fait sortir la RDC de la guerre et l’a mise sur la voie du progrès démocratique. Un héritage qui serait consolidé par des élections libres et équitables en 2016 ».
Des analystes politiques avertis soutiennent que le président américain, en parlant d’héritage, s’est résolument placé dans la perspective de l’après-Kabila, qu’il considère comme un acteur politique dont la mission touche à sa fin à l’horizon 2016. Il s’agit là d’une façon élégante de l’exhorter à ne pas s’accrocher au poste et à se retirer avec le sentiment du devoir accompli. Dans l’esprit du maître des USA, la pacification d’un Etat comme la RDC et sa remise dans la voie de la démocratie constituent des actes politiques et historiques inoubliables. Leur auteur, Joseph Kabila, devrait logiquement se satisfaire d’un bilan aussi positif.
Pour une sortie honorable de Kabila
En principe, la position américaine au sujet du processus électoral congolais ne devrait plus donner lieu au moindre doute. Car, avant de s’exprimer lui-même, le locataire de la Maison Blanche avait commencé par dépêcher à Kinshasa son Secrétaire d’Etat en personne, John Kerry, afin qu’il vienne communiquer de vive voix, aux gouvernants de la RDC, l’impératif de ne pas tripatouiller la Constitution, de respecter la durée et le nombre des mandats des animateurs des institutions de la République, mais surtout, d’organiser les élections législatives nationales et présidentielle avant la fin de l’année 2016. Le même discours était relayé par Russ Feingold, son Envoyé Spécial pour les Grands Lacs et la RDC. On signale à ce propos que ce sénateur s’était attiré les foudres des décideurs politiques congolais, qui voyaient en lui un zélé occupé à tenir des propos qui n’engageaient que lui-même.
Avec l’entrée en scène de Barack Obama lui-même, Kinshasa ne peut plus feindre ignorer la position de Washington, qui souhaiterait voir Joseph Kabila entrer dans l’histoire congolaise et universelle par la grande porte, en terminant en beauté son second et dernier mandat. Cette sortie honorable devrait absolument passer par la tenue d’élections libres et transparentes, en vue d’une alternance citoyenne et apaisée au sommet de l’Etat congolais.
Cela laisse penser que quelque part, Washington voudrait voir les autorités congolaises, Kabila en tête, ne pas interférer dans le processus électoral en cours et l’accompagner de manière à ce que les urnes reflètent la volonté populaire. On se souvient que l’année dernière, dans la fièvre des préparatifs du Sommet USA-Afrique tenu au mois d’août à Washington, Barack Obama avait envoyé un signal fort aux dirigeants africains en insistant sur l’émergence d’Etats forts en lieu et place d’hommes forts. Apparemment, ce type de discours n’avait pas plu à certains, comme Blaise Compaoré du Burkina Faso, qui avait répliqué, avec une pointe d’ironie, que pour construire des Etats forts, l’Afrique devait d’abord compter sur des hommes forts. L’histoire lui a démontré le contraire, en effaçant d’un revers de la main tout le bien qu’il avait apporté à son peuple, pendant les 27 ans de son règne.
La recommandation d’Obama en direction de Joseph Kabila est une invitation implicite à son jeune homologue de ne pas gâcher son passage à la tête de la RDC par des actes de nature à remettre en cause le processus électoral ou le vicier. En ce qui concerne les bons exemples de fin de règne, il peut s’inspirer de celui du président sortant du Nigeria, Goodluck Jonathan.
Kimp