Phase II de la réforme des entreprises publiques : des experts balisent la voie

Vendredi 3 juin 2016 - 13:52

Après un temps de flottement, le gouvernement pense, avec l’appui de la Banque mondiale, relancer le processus de réforme des entreprises publiques. La phase II de la réforme est en gestation.

 

Pendant deux jours, soit les 2 et 3 juin 2016, des experts conviés par le Comité de pilotage de la réforme des entreprises du portefeuille de l’Etat (Copirep) ont pris quartier au Centre d’évènements Roméo Golf pour débattre de nouvelles stratégies à mettre en œuvre pour amener à bon port ce processus.

Présent à l’ouverture, hier jeudi de ce séminaire-atelier, le vice-Premier ministre chargé des Postes, Téléphone et Nouvelles technologies de l’information et de la communication (PT&NTIC), Thomas Luhaka Losendjola, a réitéré tout l’intérêt que le gouvernement attache à la réforme des entreprises publiques. Il a voulu d’emblée fixer le cadre de cette rencontre qui, selon lui, « n’est pas un séminaire de contestation ou de règlement de comptes ».

 

Convaincu que la critique pour la critique n’aboutit à rien de positif, il a fait remarquer que « ce séminaire doit plutôt servir de participation, de conjugaison d’idées sur la meilleure manière de finaliser la réforme des entreprises publiques, avec des échéances pratiques ». De ce fait, il a appelé les participants à s’inspirer des expériences réussies d’autres pays qui ont eu à faire aboutir avec succès la réforme des entreprises publiques. Il s’agira plutôt d’adapter ces expériences « à notre contexte» en vue d’aider le gouvernement à « définir les pistes et stratégies qui doivent nous conduire aux résultats escomptés, à savoir restructurer profondément nos entreprises publiques afin de leur insuffler une dynamique nouvelle et ainsi libérer leur potentiel de production et de rentabilité ».

 

Thomas Luhaka a salué la forte adhésion de -la Banque mondiale qui, malgré les ratés de la première phase de réforme, n’a pas hésité à soutenir cette deuxième phase. Dans la foulée, il a également jeté des fleurs au Copirep pour « le courage, l’abnégation et l’expertise dans le pilotage de cette réforme sous la conduite et le contrôle du gouvernement par le biais du ministère du Portefeuille ».

 

Il est d’avis que trop d’obstacles jonchent le chemin de la réforme. «Il faut des épaules solides pour, résister aux menaces et pressions de toutes les sortes et tenir le cap fixé », a-t-il martelé, soulignant que « le gouvernement attend de ce séminaire-atelier « des recommandations utiles pour amener la barque de la réforme à bon port ».

 

Après avoir brossé un bref aperçu de la place des entreprises publiques dans la mise en œuvre d’une stratégie de développement en Afrique, le directeur des opérations de la Banque mondiale pour la RDC et le Congo, Ahmadou Moustapha Ndiaye, est largement sur les grandes attentes de la Banque mondiale. Il a tait mention de la pertinence de toutes les réformes entreprises ultérieurement, notamment l’adoption en 2008 de la loi relative à la transformation des entreprises publiques et le règlement des dettes croisées en 2011.

 

Selon lui, « dans l’ensemble, ces réformes ont permis de réaliser certains progrès dans la transparence et la publication des états financiers, ainsi que la maîtrise des coûts et l’augmentation du chiffre d’affaires de certaines entreprises ».

Il s’est plaint de la situation qui demeure « préoccupante », en dépit de tous les efforts, rappelant que « les réformes opérées n‘ont pas encore permis d’améliorer significativement les performances des entreprises, ni restaurer leur viabilité financière ». A ce jour, il note que les entreprises publiques continuent à constituer une « charge sur le budget de l’Etat et sur l’économie, au lieu d’agir comme un levier de croissance ».

 

DES CHIFFRES ALARMANTS

Des chiffres le prouvent. La contribution .fiscale des entreprises publiques est faible, voire négative. Les recettes des participations ne dépassent pas 2,1% des recettes de l’Etat, &ors que dans les années 1960, ces mêmes entreprises contribuaient à plus de 40% des recettes. Les subventions et interventions de l’Etat en faveur des entreprises ont doublé entre 2009 et 2012, passant de 35 millions à 70 millions Usd. Nombre d’entre elles continuent de bénéficier dé subventions indirectes sous forme de fixation de tarifs et prix avantageux. La part des salaires et autres charges sociales dans les dépenses totales reste très élevé en raison d’effectifs pléthoriques. En 2015, les entreprises publiques ont accumulé une dette sociale estimée 1,5 milliards Usd, soit 2 à 3 fois leur chiffre d’affaires.

 

Pour la Banque mondiale, il y a donc lieu d’inverser cette tendance. Aussi, entend-elle à ce que ces assises se penchent sur quelques fondamentales et stratégiques pour l’avenir du pays, notamment le rôle de l’Etat comme actionnaire et la sélectivité dans les investissements compte tenu de l’ampleur des défis face à des moyens limités. C’est une question de choix, a dit le directeur des opérations de la Banque mondiale en RDC, entre « un Etat qui produit et commercialise lui-même et un Etat qui facilite l’investissement par le secteur privé ».

 

Dans tous les cas, il a confirmé «l’engagement de la Banque mondiale à soutenir les efforts du gouvernement dans l’accélération des réformes, étant entendu que ce genre de réformes constitue un effort de longue haleine ».

 

Une vision qu’a partagée avant lui le ministre du Portefeuille, Mme Louise Munga Mesozi, pour qui « la réforme est arrivée à un stade de non-retour». Ainsi, après les phases de stabilisation et du redressement, c’est le temps, pense-t-elle, d’une « restructuration profonde ».

Ce qu’a également confirmé le secrétaire exécutif du Copirep, Alex N’Kusu Dongala Siya qui, à l’instar de la Banque mondiale, a reconnu que la réforme des entreprises publiques est une « œuvre complexe, ardue et de longue haleine ». Selon lui, ces deux jours d’échanges servent à « réfléchir et à réorienter la réforme », tout en balisant au mieux l’avenir en vue de conduire le processus à terme.

 

C’est aujourd’hui vendredi que se clôture ce séminaire-atelier qui, sans doute, inaugure le lancement de la phase II de la réforme des entreprises publiques.

Par F.K.