Hier lundi 12 janvier 2015 Kinshasa a vécu l’une des journées les plus secouées politiquement en ce début d’année. La ville était à moitié paralysée car trouver un taxi pour se rendre notamment au centre-ville était un exploit. Retourner à son domicile était tout autant un casse-tête. Plusieurs kinois ont parcouru de longues distances à pied pour trouver un taxi pour les plus chanceux. Les autres sont rentrés carrément à pied à leur domicile.
Les avenues Triomphal, Huileries, et 24 novembre étaient bouclées et un important dispositif sécuritaire était visible autour du Parlement et sur l’avenue Enseignement QG des partis politiques. Le Parlement lui-même était ultra militarisé.Et pour cause la loi Boshab sur les élections dont la lecture a débuté hier à l’Assemblée nationale. Loi que la Majorité veut faire passer coûte que coûte car en conditionnant les élections générales (présidentielle et législatives) de 2016 au recensement de la population comme le prévoit son article 8 alinéa 3, c’est un mandat d’au moins 4 ans qu’elle offrirait à son autorité morale dont le deuxième et dernier mandat file désespérément vers sa fin en 2016. Pour s’assurer du vote de cette loi, la Majorité n’a pas fait les choses à moitié, elle a pris toutes les précautions. A part le dispositif sécuritaire mis en place tout autour du Palais du peuple, l’argument financier a été aussi utilisé pour conditionner les députés de la Majorité. En effet, la plénière d’hier lundi avait été précédée par une réunion politique des députés de la Majorité autour d’Aubin Minaku à l’hôtel Venus le dimanche 11 janvier 2015. Selon un député de la Majorité présent, les parlementaires ont exigé la somme de 200.000 USD $ pour voter la loi Boshab. Le Secrétaire général de la Majorité présidentielle leur a promis la somme de 100.000 USD$ renseigne notre source. Cette somme ne leur a pas été versée toute de suite ni aucun acompte. Promesse leur a été faite qu’ils verront la couleur de cet argent après le vote de la loi controversée sur les élections. Un véritable marché des dupes ! Il faut pour tenir promesse, que le patron de la Majorité présidentielle dispose d’une cagnotte d’au moins 3.500.000 USD pour honorer un tel engagement car ils étaient à peu près 350 députés à avoir répondu à l’invitation de l’hôtel de Venus.
Somme qu’il n’a pas. Les promesses n’engageant que ceux qui y croient dit-on. Après la réunion les députés de la Majorité ont reçu quand même chacun 500 USD au titre de collation. C’est honteux que les députés de la Majorité se comportent de la sorte face aux questions d’intérêt général. Eux qui touchent déjà plus de 9000 USD, c’est-à-dire plus de 100 fois les revenus d’un fonctionnaire rd-congolaise, se laissent manipuler avec l’argent public. Pas aussi étonnant car on sait que pour la plupart d’entre eux, le mandat de député est leur premier job. Mais cela n’est pas une excuse pour se laisser prendre dans un projet de loi qui risque de déstabiliser le pays. Le travail des députés c’est de travailler à améliorer les conditions d’épanouissement collectif. Quelle que soit la somme leur remise, la pauvreté morale s’attachera à eux pour de bon. Et cette misère de l’esprit les ruinera tôt ou tard comme elle a ruiné la plupart des mobutistes qui avaient indûment amassé l’argent sur le dos des rd-congolais. Quant à l’opposition, elle a pris ses responsabilités en descendant dans la rue hier matin pour empêcher la séance plénièredémocraticide. La population convergeait vers l’avenue de l’Enseignement pour faire jonction avec les leaders de l’Opposition mais a été violement dispersée à coup des balles réelles et des gaz lacrymogènes. Plusieurs manifestants ont été blessés par balles notamment KuduraKasongo, ancien porte-parole de Kabila et président de Fis.
Il a été atteint à la jambe par deux balles. On a tiré sur lui sans sommation raconte un témoin qui a assisté à la scène. Vital Kamerhe était aux côté de Kudura qui après avoir été atteint de plusieursballes aux membres inférieurs a été évacué pour aller se faire soigner. La police a multiplié bavure sur bavure pour disperser la foule afin qu’elle ne se dirige pas au Palais du peuple. Mis en échec les députés de l’Opposition ont opté pour une autre stratégie. Allez perturber la séance plénière. Il fallait pour entrer à l’hémicycle montrer patte blanche. Arrivés, ils se sont mis à siffler. Et quand ils se dirigeaient vers l’estrade, un groupe de députés de la Majorité leur a barré la route. Une bagarre s’en est suivie. Malgré l’appel au calme de Minaku, la plénière n’arrivait pas à retrouver sa sérénité. Malgré les bruits, Minaku a quand même donné la parole au ministre de l’Intérieur Evariste Boshab pour défendre sa loi. Il a été sérieusement chahuté. Les députés ont entonné « voler n’est pas bon » pour rappeler ses frasques financiers. Mais la séance s’est poursuivie tout de même. Les opposants ont fini par jeter l’éponge et quitter la salle des Congrès. Une réunion de crise s’est tenue au siège provincial de l’UNC de Vital Kamerhe. Tous les opposants y étaient presque. Jean-Claude Muyambo, Delly Sesanga, José Makila, Martin Fayulu, Basile Olongo, Fabien Mutomb, Gabriel Mokia, KuduraKasongo, Samy Badibanga, Jean Lucien Bussa, Jean Claude Vuemba, Franck Diongo, Pascaline Kudura, Baudoin Mayo, Claudel Lubaya notamment. Vital Kamerhe et ses partenaires ont été séquestrés pendant un moment car la Police dirigeait par le controversé Kanyamacraignait que la population en les voyant ne les suive. Les opposants loin de se décourager ont appelé à la mobilisation générale de la population. Pour eux pas question d’user des subterfuges juridiques pour prolonger le bail de Joseph Kabila à la tête de l’Etat à travers le projet de loi électoral sous examen.Mais on peut quand se demander qui de la Constitution et de la loi électorale prime sur l’autre. N’est-ce pas à la loi électorale de se conformer à la Constitution qui veut que les élections générales soient convoquées 90 jours avant l’expiration du mandat en cours. Si le recensement prévu par la loi Boshab repousse la convocation de la présidentielle notamment, elle est anticonstitutionnelle. La solution est de détacher le recensement à la tenue de la présidentielle et des législatives de 2016.
MTN