Malgré Inga, seuls 9% des Congolais ont accès à l’électricité

Mercredi 18 mai 2016 - 10:38

« Modalités de mise en œuvre du traité de développement du projet Grand Inga ». C’est à question orale avec débat du Sénateur Siluvangi Lumbu Raphaël, lui posée au cours de la séance plénière du vendredi 13 mai 2016 ainsi que d’autres questions incidentielles suscitées lors du débat général, que le ministre de l’Energie et Ressources Hydrauliques a tenté d’apporter des éclairages le lundi dernier.
Jeannot Matadi Nenga Gamanda a dû regrouper les préoccupations lui posées autour de trois thèmes ci-après :

L’état d’avancement des projets de réhabilitation des centrales hydroélectriques de Zongo 1, Mobayi-Mbongo et Bandera, ainsi que les projets de construction des nouvelles centrales hydroélectriques de Grand Katende, Kakobola, Zongo 2, et Ruzizi 3 ;
L’utilisation des formes d’énergies renouvelables autres que la ressource hydraulique – précisément le solaire, l’éolienne et la biomasse – pour alimenter en électricité le milieu rural et les nouvelles provinces ;
Le déficit énergétique récurrent, avec sa conséquence inéluctable, le délestage généralisé des abonnés du service public de l’électricité : les usagers domestiques, professionnels et industriels.
« Le secteur de l’énergie électrique de notre pays, comme vous le savez, vit un contraste saisissant entre son énorme potentiel estimé à 100.000 MW pour la ressource hydraulique seule. Sur ce potentiel, 44.000 MW sont concentrés sur le seul site d’Inga. 56.000 MW sont disséminés sur plus de 800 sites hydrauliques de capacités diverses, répartis inégalement à travers le territoire national comme l’atteste « l’Atlas des énergies renouvelables de la RDC », confectionné il y a peu avec le concours d’une branche spécialisée des l’Organisation des Nations Unies.
            Malgré ce potentiel inégalé, notre pays affiche un taux d’accès des populations à l’électricité très faible, de l’ordre de 9% seulement, à comparer à une moyenne de 35% en Afrique subsaharienne ». La précision est du ministre de l’Energie et Ressources Hydrauliques.
            Des statistiques publiées par des institutions internationales autorisées font état d’une auto-génération d’électricité par groupes électrogènes à concurrence d’au moins 50% des besoins industriels, à des coûts dix fois plus élevés que le tarif de vente administré par les services compétents de l’Etat. Cette situation s’est curieusement étendue progressivement aux usagers domestiques de l’électricité.
Par ailleurs, le déficit en énergie électrique qui n’épargne aucune province du pays est évalué à 450 MW à Kinshasa et à 750% dans l’ancienne province du Katanga.

Sept causes du déficit énergétique

            Soulignant que le déficit énergétique frappe tout le monde, sans exception, le ministre Matadi Nenga indique que plusieurs raisons découlent de la situation, dont les principales sont au nombre de sept. Il s’adit notamment de :
– Vieillissement avancé des équipements, dont la plupart sont frappés d’obsolescence;
– Vétusté des centrales en place, dont beaucoup datent des années 50, 40, voire 30. Inga 2 a 34 ans d’âge, Inga 1 a dépassé 44 ans, sans que soit intervenue une révision générale de ses machines, comme il se devait tous les 5 ou 6 ans. Pire : une des 8 machines qui équipent Inga 2 tourne sans arrêt depuis 25 ans ;
–           Absence de programme national de développement cohérent et intégré, parce manque de planification et faibles dotations budgétaires au secteur de l’énergie : il n’y a pas eu de constructions nouvelles de centrales pendant un quart de siècle, Mobayi-Mbongo ayant été la dernière réalisation en 1988, avant Kakobola, Katende et Zongo 2 depuis 2012 ;
–           Absence de politique de maintenance systématique ou de rénovation programmée des installations en place, à mesure qu’elles prenaient de l’âge ;
–           Tarifs de vente révisés au coup par coup – quelquefois même à la baisse – et maintenus largement en-deçà des coûts d’exploitation, tordant ainsi le cou à toute possibilité de maintenance minimale, encore de rénovation ou d’expansion ;
–           Absence de politique d’adaptation des compétences des personnels exploitants aux avancées technologiques, faute de plans de formation ou de mise à niveau systématique ;
–           Long monopole de l’Etat sur ce secteur pendant plus de 40 ans, depuis sa nationalisation en 1972. Ce qui a fermé la porte aux capitaux privés, sans contrepartie en termes de plan de développement du secteur sur le long terme, ni de moyens financiers palliatifs aux conséquences induites par la mesure de nationalisation.
            A propos du coût des installations de production de l’énergie hydroélectrique, le ministre Jeannot Matadi a indiqué qu’installer 1 MW de puissance hydroélectrique sur un site requiert au moins 2 millions et demi de dollars en infrastructures de production, sans compter celles d’amenée vers l’usager final.

1300 MW sur 2500 MW actuellement disponibles

            « Aujourd’hui, la puissance électrique disponible sur l’ensemble du territoire national est estimée à 1300 MW, pour une capacité totale installée de l’ordre de 2500 MW », renseigne le ministre.
Au regard de ce tableau sombre de la situation, Jeannot Matadi Nenga n’est pas allé par quatre chemins pour déclarer : « ne nous voilons cependant pas la face : le déficit et les délestages vont perdurer quelque temps encore d’ici que les capacités de production d’autrefois aient été totalement restaurées ».
            Avant de fournir quelques informations relatives aux travaux qui sont en train d’être faits actuellement en vue de remédier à la situation. A ce sujet, il a annoncé que les centrales d’Inga 1 et 2 sont en cours de rénovation pour un accroissement de 400 MW ; la centrale de Tshopo à Kisangani vient de subir une réhabilitation partielle de ses machines ; une 2ème ligne de transport Inga – Kinshasa sera bientôt inaugurée ; un partenariat public-privé a été mis à contribution pour moderniser les centrales de Nseke, Nzito et Koni dans l’ex-Katanga ; idem pour la ligne à courant continu Inga-Kolwezi vielle de 43 ans.
            L’achèvement de Katende, Kakobola et Zongo2, injectera 200 MW de plus au potentiel énergétique national global.
            Notant la nécessité de réhabiliter les anciennes centrales afin de booster la puissance désirée avant de construire de nouvelles, il a renseigné qu’Inga 1 qui a 6 machines, 2 sont en panne. Tandis qu’Inga 2 qui en dispose 8, 4 sont à l’arrêt. « La réhabilitation d’une machine d’Inga2 coûte plus ou moins 50 millions de dollars et dure 24 mois ».
            Concernant le barrage de Katende d’une capacité de 64 MW, devant alimenter les villes de Kananga, Mbuji-Mayi, Bunkonde et Tshimbulu, le ministre renseigne que les travaux sont exécutés à 60%. Et qu’ils connaissent un ralentissant par suite de quiproquos administratifs en voie de solution avec la SNCC.
            Une autre cause deuralentissement des travaux est née de la décision de l’organisme de financement indien d’écarter de son financement l’adjudicataire des travaux de génie civil de la centrale. Ce litige, rassure-t-il, est aussi en voie de solution.
            « Le coût de l’ensemble des ouvrages de production et de transport reviendra à 399 millions, de dollars, dont 40 millions soit 10% sur ressources budgétaires, 359 millions soit 90% financés par EximBank of India. L’adjudicataire des travaux de construction de lignes de transport sera sélectionné en octobre prochain. Son déploiement sur le site des travaux est prévu au tout début du premier trimestre 2017 ».
            Quant au barrage  Kakobola, d’une capacité de 10,5 MW, pour alimenter Kikwit, Idiofa et Gungu, les travaux sont en train d’être achevés. Il restera à construire les lignes de transport et les réseaux de distribution qui n’avaient pas été prévus dans les financements originels.
Dom