*Tous les Députés du Groupe parlementaire MSR et Alliés ont préféré s’abstenir lors du vote de la loi électorale, le samedi 17 janvier. L’article 8, qui fait du recensement de la population, un préalable à l’organisation de la présidentielle et des législatives nationales, divise la Majorité Présidentielle. Tous les regards sont tournés vers le Sénat qui examine, en seconde lecture, la loi électorale, avant sa transmission au Président de la République pour promulgation.
L’Assemblée nationale a adopté, le samedi 17 janvier 2015, la loi électorale qui a pris la direction du Sénat, Chambre haute du Parlement, pour une seconde lecture. Une loi qui comporte trois articles. L’article 1er modifie 49 articles de la loi de 2006 déjà reformulée en juin 2011. De toutes les innovations apportées, le grand public aura retenu la disposition reprise à l’article 8 qui oblige la CENI d’élaborer sa liste électorale sur base des données démographiques et de l’identification de la population. Pourtant, le législateur a voulu mettre en avant plusieurs nouveautés. Entre autres, la majoration des frais de dépôt de candidature, le changement de la circonscription électorale pour l’élection des conseillers de chefferie ou de secteur, à savoir, la chefferie ou le secteur, en lieu et place du groupement, la cooptation des chefs de groupement dans les Conseils de secteur ou de chefferie, l’approche genre dans l’établissement des listes électorales et dans l’attribution des sièges, etc. L’article 8 a profondément divisé l’Assemblée nationale. C’est essentiellement à cause de cette clause que l’Opposition parlementaire a boycotté toutes les plénières consacrées à l’examen de la loi électorale. Réunis au Centre Béthanie, le 15 janvier dernier, afin d’évaluer la situation politique du pays, les Groupes parlementaires de l’Opposition, auxquels s’étaient joints les membres de la Société civile, ont directement accusé la Majorité de monter des subterfuges pour retarder les prochaines élections. En effet, selon les opposants, qui citent certains experts, le recensement pourrait nécessiter 4 ans. Une hypothèse que le Porte-parole du Gouvernement, Lambert Mende, qui intervenait en fin de semaine dernière sur RFI, n’écarte pas. Le ciel ne tombera pas, a-t-il dit, si la présidentielle et les législatives nationales se déroulaient en 2017. Parce que, expliquait-il, le Sénat, les Assemblées provinciales et les Exécutifs provinciaux continuent à fonctionner alors qu’ils sont sans mandat depuis bientôt 4 ans. Une exception serait ainsi en passe de devenir la règle. Utilisant le même canal, le Doyen de la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa a, le jour suivant, donné son avis d’expert sur la présidentielle. Il affirmait que la Constitution, à ce sujet, ne posait aucun problème d’interprétation. Le scrutin présidentiel, notait-il, doit être convoqué 90 jours avant l’expiration du mandat du Président de la République. Le Porte-parole du Gouvernement, par contre, appréhende les choses différemment. Pour Lambert Mende, l’article auquel on fait allusion ne parle que de la convocation du corps électoral. Au passage, il rappelle qu’en 2006 et 2011, le scrutin présidentiel avait été retardé pour cas de force majeure. Mais, un cas de force majeure n’est pas prévu deux ans avant, parce qu’il s’agit d’un imprévu. Comme on peut le constater, le recensement de la population, à lui-seul, ne règle pas totalement le problème.
Une loi qui fait jaser
A coup sûr, les conditions dans lesquelles la loi électorale a été adoptée par l’Assemblée nationale marqueront, pour très longtemps, l’opinion publique. Les stratèges de la Majorité ont réussi à contourner l’Opposition parlementaire qui a lancé, depuis le Centre Béthanie, un appel à manifester ce lundi 19 janvier 2015. Ainsi, l’Assemblée nationale a-t-elle avancé de deux jours la plénière relative à l’adoption de la loi électorale. Pour ce faire, les Députés ont travaillé d’arrache-pied, le samedi 17 janvier, pourtant, jour férié déclaré chômé et payé. Par ailleurs, la loi électorale a fait des mécontents au sein de la Majorité Présidentielle. Les Députées membres de la Majorité ont vivement manifesté leur colère après qu’elles se soient rendues à l’évidence qu’elles n’obtiendront aucun traitement de faveur. L’article 13, qui aurait pu accorder aux femmes le droit d’aligner le tiers des candidats dans les circonscriptions électorales à plus de 2 sièges, a été supprimé. C’est une disposition jugée anticonstitutionnelle en ce qu’elle favorise la femme, au lieu d’encourager la compétitivité entre les deux sexes égaux. Le retour au piédestal n’a pas été facile à digérer pour ces femmes qui croyaient se taper une place au soleil au moyen de quelques arrangements.
Une abstention significative
Comment ne pas souligner la position du Groupe parlementaire MSR et Alliés dont les Députés, une quarantaine environ, se sont abstenus au moment du vote. A la base, l’article 8 relatif au recensement. Le MSR, depuis un certain temps, n’hésite plus à prendre ses libertés. Au plus fort du débat sur la révision ou non de la Constitution, la position du MSR avait surpris plus d’un observateur. Ce parti, présenté comme la deuxième force de la Majorité Présidentielle, exigeait un débat de fond qu’il n’a peut-être pas encore obtenu. Comment, alors, interpréter l’abstention du MSR ? Pour les uns, la consigne de vote n’a pas été suivie. Pour d’autres, aucune consigne de vote n’a été donnée. Les Députés ont joui de leur liberté d’expression. Si tel est le cas, cela devrait constituer une grande avancée au sein de la Majorité Présidentielle. Rien n’est moins sûr. Quoiqu’il en soit, l’examen de la loi électorale a remis au devant de la scène des dissensions internes au de la famille politique présidentielle. L’unanimité n’est donc plus de mise.
La Pros.