Evoluant chacun dans sa sphère d’activités, et depuis toujours sans se référer l’un à l’autre, le parlement congolais et le monde des affaires de la RDC ont conclu à la nécessité de créer un cadre de dialogue et d’échanges réguliers. Cette initiative originale du président national de la Fédération des entreprises du Congo, Albert Yuma Mulimbi, a été matérialisée le jeudi 9 octobre 2014 dernier, à la Fête parfaite de la Gombe, avec les membres des Bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat. Deux autres associations économiques étaient associées à cette soirée. Il s’agit de la Fédération nationale de petites et moyennes entreprises du Congo ( Fenapec) et la Confédération des petites et moyennes du Congo ( Copemeco).
Soulignant l’importance de cette rencontre, Albert Yuma Mulimbi a indiqué d’emblée qu’un des mandats importants de députés et sénateurs reçus des électeurs, est de produire des lois qui permettent l’éclosion d’une activité économique qui entraîne le développement économique et social de nos populations, avant d’ajouter que parlementaires et monde des affaires sont donc obligés d’œuvrer ensemble pour que ces lois votées aident à stimuler l’activité du secteur privé, seul moteur véritable de création d’emplois et de richesses.
Aussi, le président national de la FEC a-t-il plaidé pour l’instauration d’un partenariat constructif entre le Parlement et la communauté des entreprises membres de la FEC, Fenapec et Copemeco, de manière à contribuer à l’accomplissement de nos missions respectives à l’égard de nos populations qui nous regardent, vous les parlementaires et nous les hommes d’affaires comme des privilégiés.
Ce cadre, a-t-il fait remarquer, devrait permettre à la communauté des affaires de s’exprimer et d’émettre son point de vue sur les projets de loi soumis à l’examen du parlement, avant leur adoption en vue de réduire au maximum les difficultés qui peuvent surgir lors de leur application. Ce serait l’occasion donnée aux milieux économiques de proposer des projets de lois à porter par les parlementaires en fonction des préoccupations des membres qui oeuvrent au quotidien aux côtés des populations.
Albert Yuma en a profité pour échanger avec les membres des bureaux et les présidents des commissions économico-financières, sur certains projets de loi à caractère économique et social soumis à leur examen et approbation, notamment les projets de lois se rapportant aux finances 2015 , à l’agriculture, au code de sécurité sociale, à la réforme de l’administration publique, à la libéralisation du secteur d’assurance, à l’hydrocarbure, à l’industrie et à l’énergie.
« Produisez-nous de bonnes lois et nous allons vous produire une benne économie »
Après avoir salué le projet du budget évalué à 8.363 milliards de FC, soit l’équivalent de 9 milliards de dollars, dont 80 % en ressources propres, le cadrage macro-économique qui projette un taux de croissance du PIB à 10,4 %, un taux d’inflation de 3,5 % en fin de période, le, président national de la FEC a émis le vœu de voir le pays atteindre un taux de réalisation élevé de ce budget et que cette croissance projetée à deux chiffres soit inclusive et distributive.
A la lecture de ce projet de loi, la Fec constate que le gouvernement a institué de nouvelles mesures fiscales et en a reconduit quelques autres de l’exercice 2014, dont certaines malheureusement ont eu un impact négatif sur l’activité économique. Il s’agit, a-t-il noté, des mesures fiscales reprises à l’article 6 de ce projet de loi des finances qui reconduit notamment les articles 10, 11 et 22 de la loi de 2014.
Le président national de la FEC a relevé les contradictions par rapport aux prescrits de la Constitution, faisant remarquer que la loi budgétaire a des effets limités par rapport à son contenu, son champ d’application et sa durée. Elle est donc limitée dans son contenu en ce qu’elle arrête le budget des recettes et des dépenses de l’Etat. C’est pourquoi, en vertu du prescrit de l’article 175, la loi n° 11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques consiste à déterminer, pour un exercice, la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’Etat en tenant compte de l’équilibre économique et financier qu’elle définit.
Pour Albert Yuma, il en découle que les lois de finances ne sont pas constitutionnellement habilitées à prendre des mesures fiscales portant création des impôts ou modification des taux applicables, sauf si une loi fiscale les habilite préalablement et ce, de manière expresse. Il retient à ce sujet, que la loi de finances est limitée dans son champ d’application dans la mesure où elle s’adresse aux institutions publiques et régies financières chargées de l’exécution du budget de l’Etat, et ne peut de ce fait, créer de nouveaux impôts, ni d’en établir de nouveaux taux à charge des entreprises privées.
A son avis, le fait que le projet de loi de finances 2015 d’avoir en son article 10, modifié le taux de l’impôt minimum sur les bénéfices sans en avoir été préalablement et de manière expresse, habilitée par la loi fiscale en vigueur, est inconstitutionnel en vertu des articles précités de la Constitution. Car, il s’agit d’une matière qui relève exclusivement de la loi fiscale et non, de la loi annuelle de finances.
Sur le plan économique, le président national de la Fec a d’autre part fait observer que les entreprises se voient obligées de payer un impôt sur les recettes réalisées et non, sur les bénéfices et profits qui doivent représenter la différence entre les produits encaissés et les charges d’exploitations supportées. En d’autres termes, la base ou l’assiette de calcul de cet impôt n’est plus constituée du résultat de l’exercice réalisé, mais du chiffre d’affaires.
Par ailleurs, il a fait savoir que la loi congolaise sur les prix détermine le taux minimum de la marge bénéficiaire, lequel taux n’est pas atteint par les entreprises à cause du niveau du pouvoir d’achat de la population, des conditions d’exploitation et de la concurrence déloyale dans certains secteurs.
Prise en compte des
revendications
L’article 10 de la loi de finances a modifié fondamentalement la logique fiscale qui a prévalu depuis l’introduction de l’IBP minimum en 1998. Cette modification, Albert Yuma en reste convaincu, consiste en la fixation de l’IBP forfaitaire minimum exprimé en ad valorem du chiffre d’affaires en lieu et place de spécifique (2.500 FC, 2.500.000 FC ).
Les opérateurs économiques estiment ainsi qu’asseoir un prélèvement sur les bénéfices et profits au regard des recettes réalisées revient à imposer tous les éléments constitutifs du chiffre d’affaires avec comme conséquence la double imposition et la décapitalisation des entreprises.
A ce sujet, la FEC propose la modulation des taux de l’IBP minimum suivant les marges bénéficiaires autorisées et l’alignement au taux desdites marges et non, sur le chiffre d’affaires et ce, par une loi fiscale.
Pour terminer, le président national de la FEC a relevé également, et entre autres, les effets négatifs des redressements fiscaux fantaisistes, du double emploi comme de la double imposition, les perceptions imposées par la DGRAD qui a enjoint aux différentes joint-ventures minières de payer au trésor public 50 % des pas de porte et des royalties qui sont dus aux entreprises du Portefeuille.
Au nom des membres des Bureaux de l’Assemblée nationale et du sénat, l’honorable TshimangaBuana, rapporteur adjoint à l’Assemblée nationale, a dans une brève allocution remercié le président de la FEC pour l’organisation de cette rencontre d’échanges qui a permis de jeter les bases d’un partenariat entre les deux institutions, de dévoiler les préoccupations des hommes et femmes d’affaires sur certains projets de lois qui feront l’objet de débats au parlement.
L’honorable TshimangaBuana a émis le vœu de voir le monde des affaires apporter aux deux institutions parlementaires un certain éclairage sur certaines questions économiques. Voilà pourquoi il a accueilli avec intérêt croissant le projet de création d’un cadre de dialogue. Car, le parlementaire écoute toujours, avant de voter des lois, effectuer des contrôles parlementaires, au nom du peuple souverain qui les a mandaté.
Plusieurs interventions ont toutes tournées sur la nécessité d’établir ce cadre de dialogue et d’échanges, afin, d’aider les parlementaires à voter et adopter de bonnes lois qui favoriseront le développement de l’économie et la création d’une classe moyenne congolaise forte. J.R.T.