La nouvelle du décès du professeur Pierre Akele Adau est tombée hier, lundi 22 décembre 2014, à Kinshasa, comme un coup de couperet. Pour tous ceux qui le connaissaient, primaient avant tout sa carrière d’officier militaire de haut rang et sa qualité de professeur d’universités dotée d’une expérience inégalée. La mort vient une fois de plus de frapper au cœur de l’intelligentsia de la République Démocratique du Congo. C’est un coup dur tant pour le pays que pour sa famille.
C’est avec un profond regret et une grande consternation que cette information a été accueillie à l’Université de Kinshasa, à la faculté de Droi,t où il a accompli toute sa carrière académique, comme professeur associé, professeur, professeur ordinaire, doyen et chef de département de droit pénal et criminologie. Pendant ce cursus, il a formé un bon nombre de cadres universitaires dans cette discipline. Et plusieurs responsables des juridictions civiles et militaires, conseillers juridiques se reconnaissent en lui. L’homme n’avait pas d’égal dans son domaine de prédilection où ses arguments étaient d’autorité.
Docteur d’Etat en droit pénal et criminologie, Pierre Akele, cinquantenaire n’était plus homme à présenter, tant sa notoriété avait franchi les frontières nationales, jouissant d’une grande considération dans les milieux scientifiques internationaux, au point que tous ses pairs le présentaient comme l’un de plus grands pénalistes africains et défenseur inconditionnel de ces disciplines sur le continent et ailleurs.
Loin de soutenir l’impunité et toutes les déviations de ce monde, il s’est aussi battu toute sa vie avec acharnement pour l’abolition de la peine de mort, car pour ce scientifique avéré, la vie était sacrée. L’homme s’est également illustré par ses critiques pertinentes et ses positions claires sur la marche des affaires du pays. En scientifique confirmé, le professeur Pierre Akele a éclairé la lanterne des dirigeants sur les risques majeurs de la révision constitutionnelle en République Démocratique du Congo dont la dernière analyse en date porte pour titre « Réviser le constitution ou remanier notre jeu socio-politique ».
Cette tribune publiée dans les colonnes du quotidien de l’avenue colonel Lukusa, a eu pour mérite de jeter un pavé dans la mare, dénonçant toute velléité de modification de la constitution. Dans son regard critique, il estimait à juste titre que respecter la Constitution, c’était d’abord l’appliquer correctement.
Aussitôt la nouvelle connue, il nous a été donné d’apprendre que ce savant s’était rendu pour un court séjour de deux semaines en Europe, comme il le fait chaque année, pour assurer ses enseignements dans les universités du vieux continent, notamment en France, à la Sorbonne, où il était professeur invité à la faculté de droit.
Malheureusement, atteint depuis 2004 d’une cardiopathie, il avait subi la même année, une opération à cœur ouvert très délicate en Afrique du Sud. Il fera ensuite un malaise cardiaque qui l’avait alors conduit une première fois à l’hôpital avant de faire une rechute une semaine après sa sortie. Réadmis pour une seconde fois dans cette même unité de santé pour des soins requis par son état de santé toujours préoccupant, l’homme s’est éteint au moment où l’on s’y attendait le moins.
Rappelons que jeune étudiant, Pierre Akele qui va obtenir une distinction, a été recruté à la fin de ses études dans les Forces armées zaïroises (Faz) où il va subir une formation militaire à la base de Kitona, dans la province du Bas-Congo. A la fin de cette formation militaire, il va porter le grade de capitaine et nommé auditeur militaire. Parallèlement à sa carrière militaire, il poursuit sa carrière scientifique et académique et défend sa thèse sous la direction de son maitre, le professeur Nyabirungu. Au fil des années, il gravit des échelons, se distinguant ses qualités de magistrat militaire. Après le parquet militaire, il accède au siège, d’abord au tribunal de garnison, à la cour militaire et enfin, à la Haute cour militaire. Devenu colonel, il continuait à assurer ses enseignements. Consultant international en droit pénal dans plusieurs universités du monde et conférencier très apprécié, il a senti le poids de toutes ses charges l’écraser, en même temps que la maladie le rongeait à petit feu. Ce qui l’amenera à démissionner des Forces armées de la République Démocratique du Congo pour poursuivre sa carrière de scientifique en toute liberté.
Pour cette énorme perte d’un scientifique hors pair, l’Editeur-Directeur général du journal Le phare et toute sa rédaction s’associent à ses lecteurs, pour présenter ses condoléances les plus attristées à toute sa famille, à ses compagnons d’armes et à la communauté scientifique congolaise.
VAN